Once upon a dream

684 18 7
                                    

Evidemment, au milieu de ces rêves où je changeais de nom sans cesse, mon prince changeait le sien tout aussi souvent au gré de mon humeur. Jamais, avant de le connaître en dehors de ce monde onirique, je ne l’avais appelé de son vrai nom, puisque je l’ignorais tout à fait. J’ignorais même qu’il était plus qu’un simple personnage de conte de fées, pensant avoir inventé l’homme qui était parfait à mes yeux, avec ses qualités et ses défauts. Je connaissais son allure générale sans pouvoir pour autant distinguer ses traits avec précision. Et ce n’est que plus tard, bien plus tard, que je finis par comprendre qu’une destinée étrange que je ne pouvais pas tout à fait expliquer moi-même l’avait attiré à l’intérieur de ces histoires enfantines pour y changer leur cours et leur donner une vie propre. Imperceptiblement, sans que je ne le réalise moi-même, je perdais petit à petit le contrôle de mes histoires pour le laisser me guider vers une autre issue, et c’est avec stupeur et amusement que je m’enthousiasmais de ce que mon imagination pouvait donner au-delà même de mes expectatives. 

Dès lors, ma vie, celle que je me devais de mener dans le monde physique, perdit tout son attrait, et je me contentais de suivre machinalement ce que l’on attendait de moi, souriant ou baissant les yeux selon l’humeur de ceux qui s’adressaient à moi. On me sollicitait peu. J’avais assez de temps libre pour me consacrer à mes histoires, et personne ne pouvait m’en empêcher. D’ailleurs, est-ce qu’on comprenait vraiment l’importance qu’elles pouvaient avoir ?

Et mon prince m’attendait, toujours fidèle au rendez-vous. Peut-être parfois continuais-je un peu mon histoire sans lui, mais il semblait pouvoir la rattraper au fur et à mesure, et me guider à nouveau vers des éléments qui l’intéressaient. Combien étrange et déroutant cela aurait-il été si j’avais compris, dès cet instant, qu’une âme avait percé mes remparts, et que celui que j’aimais tant vivait vraiment, quelque part, et voyait de ses propres yeux un monde que j’avais créé, pensant qu’il ne serait connu que de moi seule.

Réminiscences - Daydream believer (Eralin intermède)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant