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Papa,
Cela fait un moment que je ne t'ai pas parlé. Depuis ma première lettre, en fait. Quand je dis parler, c'est avoir une véritable conversation. Non, parce que des disputes, on en a eues, c'est sûr. Mais, à ce que je sache, tu n'as jamais réellement pris la peine de m'écouter.
Avoir un enfant trans, tu te rends compte ? C'est vraiment quelque chose d'horrible, hein ? Je sais bien que tu te dis ça constamment depuis que j'ai fait mon coming out.
En réalité, cela fait des mois que nous ne nous sommes pas parlé. Uniquement parce que j'ai pris la décision de partir. Où ça ? Loin de toi, loin de toute la famille. Tu le sais de toute façon, tu as reçu un message dès mon départ. Je suis parti parce que tout le monde m'a rejeté.
Ah, tout ce que j'ai pu entendre, c'est dingue. Vous m'en avez dit des choses. Pourtant, je savais que personne n'allait bien le prendre. J'en étais sûr et certain. Mais j'essayais d'entrevoir une forme d'espoir. Un espoir vain, apparemment. Je n'en trouve plus mes mots.
Vous m'avez, malheureusement, brisé à un point inimaginable. Toute la transphobie que vous m'avez fait vivre m'a fait retomber bien bas. Je ne pensais pas y arriver un jour. Je voulais juste vivre tel que je suis. Avec vous, ce fut un échec.
Oui, je vous en veux encore. 5 mois plus tard. C'est encore très dur à concevoir, à comprendre, à appréhender. Mais, ce qui est dingue c'est que je vous aime tous très fort. Et vous me manquez.
Mais comment veux tu que je revienne ? Vous m'avez fait tellement de mal, vous m'avez tellement brisé. Je ne peux pas me remettre de tout ça en l'espace de 5 mois. Certaines phrases m'ont été fatales, et certains comportements aussi. Je ne peux pas oublier tout ça. Pourtant, j'aurai aimé.
J'aurai aimé revenir vers vous. J'aurai aimé vous serrer fort. J'aurai aimé passer du temps avec vous. Seulement, je n'en trouve ni la force, ni le courage, pour le moment. Tout ceci est beaucoup trop dur.
Je ne sais même pas si tu lira cette lettre, quand tu aura reconnu mon écriture. Je n'en suis pas sûr. Je pense que tu la jettera directement, parce que tu ne veux plus avoir de nouvelles de cet enfant horrible que je suis.
Si jamais tu la lis, je voudrai que tu te souvienne de ceci: je t'aime, et je reste ton enfant.

Alec, ton fils.

Papa, je suis transOù les histoires vivent. Découvrez maintenant