Chapitre 3: les files du destin

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Éline venait de transplaner sur ce qu'elle appelait désormais son plan de méditation. Là, face au soleil couchant elle sentait son affinité naturelle avec ses pouvoirs grandir et elle savait que pour la suite des opérations elle aurait besoin de bien plus que tous les sorts qui lui étaient venus naturellement. Malgré toute l'assurance dont elle avait fait preuve face au sergent Ervar, la jeune arpenteuse savait pertinemment qu'elle prenait un énorme risque en s'engageant à régler un problème dont elle ignorait la gravité. Mais c'est comme si au fond d'elle son étincelle avait éveillé un courage qu'elle avait dans le passé ignoré. Après une heure de méditation elle cessa de cogiter et se releva. Elle aurait préféré avoir plus de temps pour étudier son pouvoir mais elle savait que le temps jouait contre elle. Alors elle transplana chez elle. Quand elle arriva et qu'elle ressaisit son ordinateur portable elle se rendit compte que le soleil s'était couché. Cela constituait une preuve de plus que cette mystérieuse plaine propice à la méditation était d'un autre monde. Elle commença à rechercher tous les articles parlant de créatures métalliques saccageant la ville et après plusieurs heures de recherche elle tira les conclusions suivantes. Tout d'abord la personne derrière tout ça devait fabriquer ces choses à l'abri des regards vues leur taille elle devait être difficile à cacher une fois construites. Ensuite Éline supposait que malgré sa magie, l'arpenteur à l'origine des monstres de métal devait disposer d'une certaine quantité matière première. Finalement en constatant la fréquence des attaques, une créature faisait son apparition environ une fois par semaine, Éline fut convaincu que celui qu'elle cherchait travaillait sans relâche pour construire le plus rapidement possible ces instruments de destruction. Au vu de l'heure tardive Éline ferma son ordinateur et le mis en charge. Elle prit le temps de grignoter un plat de pâtes qu'elle eut rapidement cuisiné pendant ses recherches mais son appétit s'estompa rapidement. La jeune arpenteuse était persuadée d'une chose qui la rendait des plus nerveuses, son adversaire était sans nul doute plus expérimenté qu'elle. C'est avec cette dernière pensée qu'Éline s'endormit tant bien que mal.

Le lendemain après avoir déjeuné correctement elle ne put résister à l'envie de transplaner pour avoir des nouvelles de celui qu'elle aimait. Elle fit un passage rapide à l'hôpital ,où le regard des infirmières comme des patients la rendaient des plus mal à l'aise. Elle se sentait différente et lisait une certaine amertume dans les yeux de patients qui semblaient avoir été blessés par des arpenteurs. On lui refusa de pouvoir voir son petit ami du fait que l'heure des visites était plus tard mais on lui assura qu'il serait sorti d'ici une semaine maximum. Elle remit donc une lettre écrite la veille au personnel soignant. C'est avec un léger pincement au cœur qu'elle transplana au centre de la ville où elle menait son enquête. Éline vagabonda quelques heures dans la ville. Il n'était pas difficile de remarquer qu'en ces temps troublé les passants se faisaient rare et les soldats, au contraire, très fréquent. Malgré le malaise qu'elle ressentit au début, Éline finit par s'habituer aux regards tantôt méfiants tantôt haineux des soldats et des rares passants. Après avoir fouillé les moindres recoins de la ville et n'avoir trouvé que des regards méfiants et haineux, Éline transplana au parc. En cette fin d'après-midi il était presque vide et la présence d'une arpenteuse finit de décider les derniers flâneurs à partir. Elle y resta longtemps songeant à la réaction de celui qu'elle aimait face à sa nouvelle nature. Elle se fichait de l'attitude des inconnus vis-à-vis de cela, mais lui allait- il la repousser ? Allait-il prendre peur ? À cette pensée son cœur se serra et elle usa tant d'énergie à retenir ses larmes qu'elle finit par s'assoupir sur le banc où elle s'était assise. Alors qu'une lumière crépusculaire illuminait les feuillages renaissants des arbres, Éline se réveilla. Dans son sommeil elle avait compris son erreur lors de son enquête en ville. Il n'existe aucun lieu assez propice à la création de ces araignées de métal en ville mais en périphérie rien n'est moins sur. Suite à cette illumination Éline transplana à la décharge en périphérie de la ville. Là elle fut accueillie par les cris agaçants des mouettes et par l'odeur nausée à bonde qui les avaient attirés. La jeune arpenteuse aperçut qu'il restait encore quelques ouvriers sur le site elle attendit donc que le soleil se couche et que ceux-ci s'en aillent pour commencer à fouiller l'endroit. Une fois les ouvriers partis, Éline conjura à nouveau les deux esprits qui lui avaient porté secoure la première fois qu'elle avait utilisé ses pouvoirs. Elle fit du premier son éclaireur et du second son garde du corps. Elle avança prudemment dans la décharge en suivant, avec une dizaine de mètres d'écart, la lueur blanche de l'esprit qui ouvrait la marche. Alors qu'il s'engouffrait dans un passage étroit rarement emprunté par les ouvriers, une dizaine de pieux métallique jaillirent brusquement des parois de déchets et vinrent transpercer l'esprit qui guidait Éline. L'essence de l'esprit ayant été endommagée celui-ci disparu. Éline resta, quant à elle, un instant immobile pour s'assurer que cela était bien un piège et non une attaque directe. Une fois rassurée par le fait qu'elle avait encore une chance de discuter, la jeune arpenteuse s'inquiéta de croiser un autre piège. Elle prit donc la décision d'emprunter la voie des airs afin d'éviter un autre piège éventuel. Depuis le ciel elle aperçût rapidement une zone plus dégagée dans le fond de la décharge, où quatre tonneaux métalliques servaient de brasero de fortune. L'endroit était juste assez éclairé pour pouvoir y travailler et juste assez éloigné pour ne pas être remarqué. Avant de se poser elle vit un arpenteur d'une vingtaine d'années autour duquel des bulles de métal liquide flottaient, il semblait être occupé à perfectionner sa dernière créature, qui trônait inerte devant lui.
Éline atterrit délicatement en se tenant à bonne distance de l'artisan et de sa création pour s'adresser à celui-ci: - C'est donc toi qui crée ces araignées de métal. Dit-elle en fixant le regard du arpenteur.
- Effectivement! Dit-il avec fierté. Ces créatures sont mes formidables créations chère collègue.
Le jeune homme à l'apparence fatiguée et sale semblait cacher une certaine méfiance dans ses paroles.
Éline rétorqua alors: -Je ne pense pas que l'on puisse juger formidable la tâche que vous ordonnez à vos créations cher collègue. Dit-elle sèchement. C'est d'ailleurs pour ça que je suis là, je suis fatiguée de voir mourir des innocents de la main de mes semblables. Dit-elle d'un ton faussement agacé.
L'homme prit de colère suite à ces paroles fit un pas en avant et répondit avec fermeté: - Des innocents ?! Tu te moques de moi ! Les escouades de "protection" ne sont là que pour nous supprimer à la moindre occasion. Depuis que nos étincelles se sont éveillées nous sommes seuls contre tous ! C'est pour vous protéger vous, mes collègues arpenteurs, que j'organise ces attaques. Ils nous supprimeront tous un jour ou l'autre!
Déstabilisée par ces paroles Éline ne su quoi dire et resta silencieuse laissant l'artisan continuer son monologue.
Celui-ci reprit avec ardeur: - Si nous ne faisons rien nous disparaîtrons ! Et tu sais que j'ai raison, c'est dans leurs yeux... L'humanité nous craint et nous hait!
Éline rétorqua enfin en tentant de cacher son anxiété: - Tu ne peux pas dire ça ! Peu importe nos pouvoirs nous sommes humains malgré tout! Tu ne peux nous dissocier d'eux...
-Et pourtant. Dit-il mélancolique. Tu verras que tous ceux qui te sont chers te tourneront le dos...
Suite à ses mots Éline pensa à celui qu'elle aimait, son cœur se serra si fort qu'elle ne put retenir quelques larmes. Et avant même que son interlocuteur eut le temps de se demander se qui se passait, elle projeta cinq filaments d'ombres d'un revers de main sur la carcasse métallique inanimée qui les séparait.
La magie noire de la jeune arpenteuse endommagea sommairement la carcasse et elle dit d'un ton glaçant: - Si tu ne veux pas entendre raison je suis contrainte de devoir couper le file de ton destin dès maintenant.
L'artisan prit alors l'initiative de créer une pince métallique autour de son bras droit avec une partie du métal qui flottait autour de lui.
Il usa du reste pour animer l'araignée de métal endommagée et affirma avec dédain: - Tu n'es qu'une utopiste idiote c'est moi qui vais te ramener à la raison!
Alors le combat s'engagea, Éline dû d'abord esquiver le monstre de métal qui tenta de lui bondir dessus en prenant sa forme d'ombre. Son adversaire profita de ce moment pour tirer une salve de pieux métallique vers Éline, c'est alors que l'esprit qui lui restait sacrifia son essence pour protéger sa maîtresse de cette attaque létale. Éline envoya d'un côté des filaments de mana noir pour transpercer et faire chuter l'araignée métallique. Tandis que de l'autre elle usa de filament lumineux pour contrer la salve de projectiles suivante de son adversaire arpenteur. L'araignée déséquilibrée n'était plus un problème dans l'instantané mais son maître lui changea de stratégie. Il planta sa pince métallique devant lui et fit jaillir un pic métallique du sol, à la hauteur d'Éline. Celle-ci esquiva de justesse l'attaque en prenant forme d'ombre et en serpentant jusqu'à l'assaillant. Une fois à portée elle reprit forme humaine et balaya son adversaire à l'aide de ses filaments lumineux le projetant ainsi quelques mètres plus loin à terre. Alors qu'elle approchait pour porter une attaque supplémentaire à son adversaire, l'araignée chargea Éline et l'envoya valser contre un mur de déchets d'un coup de patte. Tandis que la jeune femme se relevait difficilement la créature de métal chargea à nouveau. Éline se surprit elle-même en tissant un dôme de magie blanche autour d'elle, juste à temps. Le monstre métallique frappa à deux reprises le dôme avant de le briser, mais en le brisant il libéra une puissante onde de magie lumineuse. L'onde fit se retourner l'araignée , tomber deux braseros et aveugla l'arpenteur adverse. Éline en profita pour se replacer dans une zone plus dégagée en prenant forme d'ombre. Alors qu'elle reprenait son souffle elle vit l'artisan user de sa maîtrise du métal pour retourner sa création qui gisait sur le dos. Une fois à nouveau sur ses pattes l'araignée chargea une nouvelle fois. Éline perçut que la chose avait traversé les flammes, des deux braseros tombés, qui avaient proliféré. Elle profita donc que les pattes du monstre fussent assouplies par la chaleur, pour frapper l'une d'elles à l'aide de ses filaments lumineux. Cette attaque magistrale disloqua la patte du serviteur métallique, qui ne put que lourdement chuter. Éline profita de cette réussite pour prendre forme d'ombre et se glisser à nouveau jusqu'à son adversaire, qui lui se replaçait méfiant. En confiance elle brandit ses filaments de lumières comme on brandit des fouets et elle les abattus sur sa cible. Quand soudain une fine couche de métal liquide s'interposa encaissant l'attaque d'Éline, l'homme arbora un sourire satisfait en constatant l'ouverture dans la garde d'Éline. D'un coup en plein ventre il transperça la jeune femme, à l'aide de l'imposante pince de métal qui entourait son bras droit. Alors qu'elle se mettait à cracher du sang et que le métal froid de l'arme adverse sortait lentement de sa plaie béante, la jeune arpenteuse posa un genoux à terre. Elle pensa " C'est donc ainsi que cela se termine, j'ai été naïve de croire que j'avais une chance ....". Quand elle vit le sang couler de son ventre une image atroce lui revint à l'esprit. Son petit ami agonisant au sol avec une plaie similaire. Elle ne devait pas mourir, pour lui. Peu importe qu'il l'aime encore ou non sous sa nouvelle forme. Seul elle pouvait le protéger dans ce monde qui sombrait lentement vers la folie. Elle ne pouvait pas mourir. D'un battement de cœur la magie de son étincelle se répandit dans tout son corps. Les ténèbres lui firent tromper la mort et la lumière referma sa blessure, tandis qu'elle se relevait comme habitée par une énergie supérieure. Son adversaire surprit ,par la lumière qui jaillissait de ses yeux et par les ténèbres qui l'entouraient, ne put qu'écarquiller les yeux face à cette démonstration de puissance. Éline dans la foulée de ce second souffle projeta des filaments de ténèbres qui agrippèrent la chaire de son opposant et des filaments de lumière qui agrippèrent l'esprit de celui-ci. Ensuite les poings serrés sur ses filaments elle dissocia l'esprit du corps de son adversaire. L'esprit hors du corps disparut dans un dernier hurlement consumé par la lumière. Quant au corps il retomba comme un vulgaire pantin de chaire, écorché par les files de ténèbres qui émanaient des doigts de celle qui avait remporté le duel. Épuisée, Éline tomba à genoux. Elle constata avec soulagement que la création de son défunt adversaire était inanimée.

Après avoir soufflé une vingtaine de minutes la jeune femme se releva et décida de transplaner, pour ne plus devoir supporter la vue de l'homme dont elle avait ôté la vie gisant sur le sol. Une fois devant l'hôtel de ville elle missionna un soldat de garde, de rapporter la nouvelle au sergent Ervar et transplana aussi tôt peu désireuse de discuter avec le sergent dans l'immédiat. Si tard il n'existait qu'un endroit ,à sa connaissance, où elle serait loin de tout et où elle pourrait profiter de l'air nocturne pour oublier l'odeur immonde de la décharge. Une fois arrivée devant son école elle flotta tranquillement dans le ciel nocturne afin d'atteindre le clocher de celle-ci. L'école qu'elle fréquentait prenait effectivement place dans un ancien monastère dont seul le clocher et quelques vitraux étaient resté en souvenir. Elle s'assit donc dans la tour et contempla les étoiles dans le ciel nocturne. Elle y resta bien une demi-heure se perdant dans ses pensées comme elle perdait son regard dans les étoiles. Soudainement une silhouette se matérialisa dans les ténèbres flottant face à Éline songeuse. Une longue cape noire flottait doucement dans le ciel nocturne, tandis qu'une capuche terminait de masquer le visage de l'arpenteur qui venait d'apparaître.
La personne s'adressa à Éline d'une voix masculine: -Il n'y a plus de demi-tour possible désormais ma chère Éline....
Elle se leva intriguée et répondit en fixant son interlocuteur: - Tu ne sais rien... Toi et moi nous n'avons rien avoir l'un avec l'autre fait moi confiance.
Le mystérieux interlocuteur fit un léger mouvement de tête et dit: - Je ne nie pas notre différence, mais je sais que tu veux le protéger.
Un mélange de curiosité et d'angoisse habitat Éline a ces paroles, elle rétorqua : - T'es qui au juste pour savoir ça ?
En guise de réponse l'arpenteur en face d'elle lui dévoila son visage et l'enfouit à nouveau dans l'ombre de sa capuche aussitôt.
- Toi ? Alors tu es aussi l'un d'entre nous.... Que veux-tu de moi ?
L'homme sembla esquisser un sourire satisfait et reprit: - Tu souhaites le protéger n'est-ce pas ?
Elle répondit aussitôt : -Plus que tout oui.
L'homme continua calmement: -Ma proposition est de plus simple alors... Rallie-toi à mes desseins et je peux te promettre que tout sera mis en oeuvre pour le protéger. En plus de cela je t'aiderai à la maîtrise de ton étincelle. Ainsi tu pourras servir une cause que je peux te garantir juste mais dont je ne peux pas encore te parler.
La jeune femme prit quelques secondes de réflexion avant de répondre : - Et comment m'aiderait tu à maîtriser mes pouvoirs? Tu ne dois pas avoir acquis les tiens depuis bien plus longtemps que moi...
L'homme rétorqua tranquillement: - Les miens ont l'avantage de me permettre de lire ceux des autres. Je pourrai ainsi t'aider à décoder ce qui sommeille en toi.
La jeune femme hésita longuement. D'un côté il restait un inconnu dans l'équation du fait qu'elle ne savait pas pour quelle cause elle allait devoir lutter sous les ordres de cet arpenteur. Mais d'un autre côté c'était un visage connu qui non seulement proposait de l'aider à maîtriser son pouvoir mais qui surtout garantissait une protection supplémentaire à celui qu'elle aimait. Après quinze longues minutes de réflexion Éline avait fait son choix. Elle s'avança vers lui convaincue de la décision qu'elle avait prise et lui fit part de sa réponse.

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⏰ Last updated: Apr 17, 2019 ⏰

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