angst. fluff.
triggers : violence, viol, inceste.
« Bip. Bip. Bip. »
Les pleurs d'un nourrisson. Les battements de cœurs à l'unisson.
Une nouvelle arrivée. Une vie volée.
Deux êtres liés, qui ne se connaîtront jamais.
Les hurlements d'un époux. La haine d'un père.
Une vie sur le point de commencer, déjà brisée.
Deux êtres liés, qui ne s'aimeront jamais.
« Papa, je t'en supplie, arrête ! »
Tout avait commencé dans la douleur. Des coups, des cris. La peur.
Il s'appelait Seungmin. Neuf années d'existence. Neuf années de souffrance. Avait-il demandé, lui, à naître, à arriver dans ce monde à son égard si hostile ? Avait-il demandé, lui, à voir sa mère s'éteindre avant même de pouvoir prendre conscience de quoique ce soit ? Non. Et pourtant, c'était à lui de subir la colère de son paternel.
Une chambre froide, un parquet abîmé. Un corps recroquevillé. Et ces poings effroyables qui le martèlent. Il ne pleure plus. Il ne crie plus. Il sait maintenant, que c'est inutile. Ça ne s'arrêtera pas comme ça. Est-ce que ça s'arrêtera ? Il en doute. Mais il n'a pas le choix. Il ne peut pas fuir. Alors il subit, le pauvre gosse. Il encaisse la violence de son père en silence, laissant son corps se meurtrir un peu plus à chaque seconde, sombre reflet de son âme.
« C'est d'ta faute si elle a crevé ta mère ! Alors c'est normal qu'tu prennes sa place ! »
Une pièce sombre. Une peur nouvelle. L'enfant tremblant dans un coin. Le regard atroce de son paternel dévalant son corps. Et de nouveau, la douleur.
C'était son père, il n'avait pas le droit de faire ça. Il n'avait pas le droit de toucher ainsi son corps. Il n'avait pas le droit de coller son corps nu au sien. Alors, pour la première fois, le gosse s'était débattu. Pour la première fois, il avait l'espoir de pouvoir s'enfuir. Pour la énième fois, le monde entier lui avait tourné le dos.
Ses cris avait résonné dans la maison. Vide. Son être tout entier s'était définitivement brisé alors que l'homme à cause de qui il était en vie lui volait la dernière part d'innocence qu'il lui restait. Et à jamais ses espoirs de bonheur s'étaient envolés.
« Seungmin, t'es où ? »
Il ne quittait plus la pièce sombre. Et chaque jour, il attendait que le cauchemar se répète, comme un vieux disque rayé qui reste bloqué sur la même chanson, qui n'en joue jamais de nouvelle. Chaque soir, son paternel rentrait. Et chaque soir, tout recommençait. Enfance souillée. Il n'avait que quinze ans, mais il en avait déjà trop vu. Trop vécu.
Incroyable que son corps tienne. Miraculeux que son cœur batte encore. Lui-même ignorait ce qui le tenait en vie. Rien ne l'y forçait. Tout le poussait même à tout arrêter. Mais c'était au dessus de ses forces de mourir. Un jour il sortirait de là. Un jour il fuirait cette vie, pour une nouvelle, pas forcément plus belle. Mais le gosse se le jurait, il se tirerait de là.
« T'es qui, toi ? »
On était venu le chercher. On l'avait sauvé.
Nouvelle maison, nouvelle famille.
Il avait maintenant dix-sept ans. Frêle, trop petit, pas assez beau. Pâleur effrayante, maigreur répugnante. Son image n'avait rien de glorieuse. Qui était-il ? Lui-même l'ignorait. Alors il avait ignoré, n'avait pas relevé le regard vers celui qui lui servait désormais de grand frère. Leur relation lui importait peu. Le gosse voulait plus faire confiance, se tenir loin du monde.
Ça avait duré un an, dans cette famille inconnue qu'il n'avait pas cherché à connaître. Mais ils ne l'avaient pas renvoyé dans son cauchemar. Il le savait, leur fils le détestait. Alors il avait fini par partir.
Et le voilà maintenant bloqué, coincé, pris au piège, sous ce corps répugnant, partageant son sang. Son paternel, son géniteur. Sa pire angoisse.
Ses mains glissent sous son corps, ses larmes dévalent son faciès terrifié. Il ne peut pas bouger. Il sent ses doigts dans son pantalon, et il hurle.
" - Stop, je t'en supplie, stop ! "
Le front couvert de sueur, le corps tremblant, il s'assoit brusquement dans son lit, ses orbes alertées cherchant la moindre trace de son père dans la pièce. Pourtant il ne s'y trouve pas, et Seungmin le sait. Seul son petit ami réside à ses côtés. Ce dernier se redresse d'ailleurs hâtivement, ses bras venant enserrer le cadet pour le serrer contre lui.
Du réconfort, de la tendresse.
C'est tout ce dont il a besoin. Il ne bouge pas, durant de longues minutes. Il attend. Que son cœur se calme, que ses pleurs s'arrêtent. Que ses angoissent se taisent, au moins pour le reste de la nuit. C'est récurrent chez lui, ces cauchemars. Pourtant Seungmin essaie. Il essaie d'oublier le passé. Il essaie d'oublier ce qu'il a vécu. Mais il n'y arrive pas, ça reste là, ancré dans son être.
" - Je suis là Seungmin, je suis là. Tout va bien. Il n'y a que moi. "
Le jeune garçon relève les yeux vers la tête blonde à ses côtés. Bang Chan. Son sauveur. Sa seule réelle source de lumière dans ce monde. En effet, il n'y avait que lui. Et Seungmin avait uniquement besoin de lui.
Sa tête vint se déposer délicatement sur l'épaule de l'aîné, s'accrochant à son t-shirt, pour s'assurer qu'il ne disparaîtrait pas.
" - J'ai tellement peur Chan. Peur qu'il revienne, que tout recommence.
- Ça n'arrivera jamais Seungmin, je te le promet. Moi vivant, plus personne ne te fera de mal. Tout ça, c'est derrière toi, d'accord ? N'y jette plus le moindre coup d'œil. Laisse tes yeux se concentrer sur ce qu'il y'a autour de toi, maintenant, et sur ce qu'il y a devant. Quoiqu'il arrive, je serais là. Avec toi. "
Le calme reprenait possession de son être, alors que le blond basculait doucement vers l'arrière pour les allonger, ne relâchant à nul instant son étreinte. Une main dans sa chevelure, l'autre caressant son dos, il faisait tout ce qui était en son pouvoir pour apaiser son petit ami. C'était détestable pour lui de le voir dans un tel état.
" - Je t'aime tellement Chan.. Merci.."
Le cadet avait prononcé ces quelques mots, avant que le sommeil ne revienne le cueillir, pour terminer sa nuit sans plus de tumultes.
" Je t'aime aussi Seungmin. Plus que tout. "
Et pour toujours.
