Le Culte de la lune écarlate

Chapitre Premier 3/3

Le lendemain matin, Isil s'attela à préparer sa mission. Il aiguisa ses dagues et les enduisit d'un poison paralysant. Dans sa sacoche de cuir, il fourra quelques vivres, de quoi tenir une journée, et quelques fioles à l'aspect peu engageant. Il fut interrompu dans ses préparatifs par l'arrivée d'Aramir. Ce dernier tenait entre ses mains un petit carnet à la couverture en peau, il le tendit à l'elfe.

« - Ta prochaine mission. » lui dit tout simplement le chef de la guilde.

Isil acquiesça en prenant le calepin tendu, il le rangea dans son sac. L'assassin lirait son ordre de mission plus tard, il ne voulait pas s'encombrer l'esprit alors qu'il avait déjà un contrat sur lequel il devait se concentrer. Lorsqu'il releva les yeux vers Aramir il se rendit compte que celui-ci avait déjà filé.

Quand le soleil se cacha enfin derrière l'horizon, l'elfe fit ses adieux à Dorian et Cassandre. Emma s'avança vers lui et l'enlaça tendrement. Il se dirigea vers la porte en bois qui donnait sur la grande place et après un léger signe de tête à l'attention d'Aramir, il sortit. L'assassin se rendit dans les écuries près de la taverne et sella son cheval. En partant maintenant, il devrait arriver chez Carla Von Evereck le lendemain matin et serait rentré d'ici trois jours.

Carla habitait à l'extérieur des remparts d'Asdora, à plus d'une centaine de kilomètre au Sud, dans le petit village elfe d'Auberdine. Elle y possédait une grande maison en bois décrépi, un maigre héritage de son père tué par la guerre plusieurs années auparavant. Cette satanée guerre avait tout pris à Carla, son père, son mari, sa fortune. Aujourd'hui sans le sou, elle devait tenter de survivre tout en élevant un bambin d'à peine cinq printemps. Un enfant illégitime, le fils d'un baron avec qui elle avait eu une aventure avant que la guerre ne ravage toute son existence. Cet enfant qui était tout ce qui lui restait, tout ce qui lui permettait de s'accrocher à la vie, était aussi son seul espoir. L'ultime moyen de se réapproprier sa vie passée. Le sang noble qui coulait dans ses veines lui rendrait sa richesse, elle n'avait qu'à se montrer persuasive. Son fils pourrait grandir dans le luxe et l'opulence, il bénéficierait d'une éducation sans pareil et ne manquerait jamais de rien. C'était tout ce que Carla souhaitait aujourd'hui, comme tous les jours, au moment où le soleil déclinait et que son labeur commençait. La jeune femme travaillait dans le commerce du plaisir, elle n'était bonne qu'à cela. Elle n'avait jamais été préparée à cette vie-là, elle n'avait jamais appris à être indépendante et débrouillarde et elle n'aurait jamais dû avoir à l'apprendre. Mais son monde avait basculé et, comme tous ceux que la guerre avait épargné, Carla s'était adaptée.

Une lueur rosée perçait à travers la fenêtre du premier étage, indiquant à la jeune femme qu'il était l'heure pour elle de quitter la chaleur de son foyer. Elle alla embrasser le front de son fils endormi et vêtue d'une simple robe en toile, elle quitta sa demeure.

Isil l'observait, tapi dans l'ombre. Dès qu'elle fut hors de son champ de vision, il se dirigea vers la grande maison. Agilement, il grimpa à la fenêtre du premier étage et observa la pièce qui s'étendait devant lui, un grand salon plutôt classique. Un grand canapé vieilli faisait face à une cheminée noire de suie dans laquelle un feu agonisait. La fenêtre qui lui faisait face ne possédait plus ni vitres ni volets, il put ainsi se glisser dans la demeure sans peine. Outre les lucarnes brisées, les murs du manoir étaient également en partie dévorés par les mites, ouvrant davantage la pièce au monde extérieur. Le vent s'engouffrait entre chaque planche de bois en poussant de longs cris d'agonie. L'endroit était sombre et lugubre. Ce n'était pas un endroit pour vivre. Isil s'avança à pas léger, veillant à ne pas faire grincer le parquet sous ses pieds. Il se dirigea jusqu'à la seule porte close de l'étage. La porte, à l'image du reste de la demeure était misérable et dénuée de poignée, il n'eut qu'à pousser légèrement celle-ci pour qu'elle s'ouvre dans un grincement déchirant. Le bruit ne sembla pas déranger l'enfant endormi dans son lit de fortune. Il s'agissait sans doute pour lui d'un son familier, du son qu'il entendait chaque soir lorsque sa mère venait déposer un tendre baiser sur sa tempe juste avant de partir travailler à l'auberge. Quoi qu'il en soit, il ne se réveilla pas. Le petit homme était maigrichon et très pâle il semblait si fragile que la moindre maladie l'aurait sans doute emporté. Isil ne se questionnait jamais vraiment sur le bienfondé de ses actes, il appartenait au Culte, à Nox, il était un assassin. Il ne tuait pas par vengeance, par plaisir ou par nécessité, il tuait parce que la mort était son métier. Mais aujourd'hui, il se dit que son geste allait sans doute épargner à cet enfant un avenir misérable. Une vie où il aurait été obligé de se cacher pour échapper aux mercenaires envoyés par son père, une vie où la réputation de sa mère l'aurait toujours précédée. Il était difficile de se faire un nom à Asdora et s'appeler Von Evereck compliquait beaucoup la tâche. Cette famille de noble avait perdu son titre de noblesse à l'issue de la guerre, elle avait été accusée de trahison et de complot contre l'Empire. Aurélien avait été clément en laissant la vie sauve à Carla et à l'enfant.

S'arrachant à ses pensées, l'elfe sorti d'une sacoche de cuir une petite aiguille semblable à celles utilisées en couture et d'un geste assuré il piqua l'enfant dans le creux du cou. L'aiguille était enduite d'un poison qui paralysait et anesthésiait totalement la victime. Isil s'empara alors de l'une des ses dagues et d'un geste net il trancha l'artère carotide. Au bout de quelques secondes, le garçon gisait-là, sans vie, et son âme put rejoindre Nox. Le contrat était accompli.

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Voilà pour le premier chapitre, il est assez long et je ne sais pas encore si les suivants le seront également, ça dépendra de ce que j'aurai à dire dans chaque partie^^

J'espère que les personnages rencontrés vous plaisent (: