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Juste quelques secondes suffisent pour qu'un changement brusque se fasse. Qu'on se retrouve débordés, que plus rien ne soit identique à l'instant d'avant. Il eut suffit de quelques secondes pour que le feeling passe, que l'accroche se fasse, tout comme il n'en a fallut que quelques unes pour que tout vole en éclats. N'est-ce pas ironique, au fond ?

* * *

Les morceaux brisés de deux cœurs qui ont sûrement un jour battus à l'unisson s'écrasent sur le sol. Elle regarde son écran comme si la catastrophe pouvait encore être réparée, mais les mots ne viennent pas. Ou plutôt, plus ils viennent et plus la situation empire. Comment ça "douée avec les mots" ? Ta poésie ne te sauvera pas ici, elle ne sauvera pas ta princesse. Submergée par la chose elle regarde impuissante les petits points danser sous ses yeux, la colère se déverser à chaque nouveau message. Une, deux, trois personnes... Une de plus, encore, et encore, et encore, cela n'en finira donc jamais. Tout avait commencé par quelques petites pics amusées, le courant était passé avec merveille, la personne derrière l'écran semblait souriante.

Puis elle avait compris que son sourire était fragile. Alors elle voulut prendre sa princesse sous son aile, mais quelle grossière erreur, ma pauvre fille n'apprendras-tu donc jamais ? Chaque fois que tu fais cela, tu sais très bien comment tout se termine. Non, cette fois ce sera différent. Cette personne si fragile mais si forte, regarde la, vois son sourire comme il a du potentiel, et son cœur, son cœur oui regarde le, si beau. Elle ne le voit pas, il faut le lui montrer. Laisse moi le lui montrer. Ma chère petite princesse, je veux que son sourire lui reste gravé. Regarde, elle est comme moi, regarder comme on se ressemble ! Une information pourtant capitale que tu as ignorée. Non, vous ne vous ressemblez pas, elle n'est pas toi, elle ne te comprend pas. Vous ne vous connaissez pas. Quel jeu dangereux tu es en train d'entamer, tu vas encore le regretter et tu le sais pertinemment, il est encore temps de te stopper.

Mais tu me connais, tu sais que je n'en suis pas capable, n'est-ce pas ?

En effet.

Alors tant pis, à deux pieds dans la gueule du loup et advienne que pourra.

Je ne pourrais pas te consoler.

Je ne t'en demandais pas tant.

Insouciante, elle se mit à discuter avec joie avec elle. Le courant passe si bien, vois comme elles s'entendent, n'as-tu pas été trop médisante ? De toute façon elle ne m'aurait pas écouté. Elle le verra bien. Comme son ange le lui a si bien dit, elle va se brûler les ailes. Mais quelles ailes, ne sont-elles pas déjà couleur cendre ? Elle est une horreur, un fléau vivant qui sème le trouble et brise les gens. Elle le sait, n'est-ce pas ? Oui, crois-moi, elle en a conscience. Mais l'autre personne en elle ne lui permet pas de s'en sentir coupable. Elle le veut, elle veut être triste, ne penses-tu pas que ce soit la raison pour laquelle elle s'entête quand elle sait qu'elle ne devrait pas ? Elle va finir par étouffer. Peut-être cherche-t-elle juste à pleurer.

La princesse lui a fait découvrir des choses. Elle espérait pouvoir lui en faire découvrir en retour, elle espérait pouvoir lui transmettre sa joie. Mais visiblement, grosse erreur. Les deux se sont culbutées et les sentiments se sont annulés. Ils ont disparu, c'est aussi simple que ça. La princesse s'est détruite à petit feu, et les ailes n'ont pas brûlé, non, elles ont lentement été arrachées. La princesse lui a fait découvrir les plaisirs charnels, elle l'a initiée. Le sait-elle ?Bien sûr que non, ne se serait-elle pas sentie coupable d'avoir ainsi entraîné la décadence ? D'avoir voulu aller toujours plus loin ? Alors elle s'était tue, laissant la princesse croire qu'elle n'avait jamais été innocente. Au fond, cela collait. Elle en avait l'air, mais parfois absolument pas. Sans gêne. 

Lui dira-t-elle qu'elle s'est un peu forcé ? Car elle voulait satisfaire la princesse ? Bien sûr que non, surtout pas. Elle veut voir le sourire sur son visage, elle ne veut pas instaurer la culpabilité dans son cœur. Regarde, tout va bien, je peux aller encore plus loin. Tu vas te brûler les ailes. Et alors ? Très bien, [...]. Oui, madame.

Un ordre, une exécution. Des histoires, un secret. Deux personnes, combien de kilomètres. Juste reliées par des messages. La princesse donne le tempo et elle la suit. Elle a confiance. Pour une fois. Il aurait fallu regarder l'entourage, chérie. Il aurait fallu prêter attention aux indices. En avait-elle laissé suffisamment ? Étais-tu concentrée ? Non, bien sûr que non. À qui la faute ? Ce n'est la faute de personne. Princesse ressaisis-toi ! Tu saisis qu'il est déjà trop tard ? Laisse-moi, juste laisse-moi, je peux encore la sauver ! Je peux sauver la princesse ! Regarde, plus les jours passent et plus la situation empire. Tu es impuissante.

Facteurs aggravants : sentiment d'impuissance. Ah, il faudra que j'évite les situations qui pourraient y conduire. Tu as sauté dedans à pieds joints, qu'espères-tu à présent ? C'est encore possible ! Non, c'est fini, regarde. Tu n'as plus les mots, ton esprit s'embrouille. Tu ne peux plus lui parler, ta tête tourne. Tombée. Une aile d'arrachée. J'ai mal, j'ai si mal, mais je n'arrive pas à pleurer. Bien fait. Qu'ai-je fait ? Tu n'as que ce que tu mérites. Regarde, je t'avais dit que ce n'était pas une bonne idée. Laisse-moi ! Si je t'écoutais, je ne ferais rien, jamais rien ! Si je t'écoutais, je n'aurais jamais découvert cette perle rare ! Ma princesse peut encore être sauvée !

Et elle s'entêta. Encore, et encore. Elle essayait. Mais elle n'avait pas les mots, ou plutôt tous ces mots devenaient les maux de sa princesse. Sans qu'elle ne s'en rende compte. Sa princesse sombrait un peu plus à chaque instant, elle l'a voyait couler, elle tendait la main, dans le vide, personne pour la prendre. Mais elle la laissait là, elle la renvoyait, elle se penchait toujours plus jusqu'à tomber elle-même. Pour se rendre compte que la princesse était dans son dos, accrochée à sa deuxième aile. Si elle avait été plus vive, elle aurait pu la remarquer, tapie ainsi qui attendait juste. Il fallait réfléchir. Et pour réfléchir, il fallait se poser. Pose-toi. J'y arrive pas. T'es sur les nerfs. Je sais. Pose-toi. Il faut. Il faut, je sais. Tant pis pour toi.

La deuxième aile perdue, enfin les larmes se sont mises à couler. Tant d'accusations, elle avait mal fait les choses. Elle avait perdu ses deux ailes, détruit une personne supplémentaire. Jamais ne s'était-elle donné le surnom de prince et fort heureusement, car le prince parvient à sauver la princesse. Ici, elle aura causé sa perte. Non, ce n'est pas elle. Mais elle va le prendre ainsi. Parce qu'elle était la seule personne à la figure de laquelle on pouvait cracher les injures.

C'est ta punition pour avoir joué avec le feu. J'assume. Je suis désolée. Tes mots ne suffiront pas. Ta belle prose ne sert à rien. Je sais. Comme si elle avait un jour servi. Au moins tu en es consciente. Tes excuses ne sont pas acceptées. Je sais. Elles ne sont pas voulues. Je sais. Tu ne l'étais peut-être pas non plus. Je sais. Tu ne fais rien. J'essaie. Je suis, désolée, Ana.

PrincesseWhere stories live. Discover now