Chapitre 1 - 1er octobre.

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« – S'il te plaît, Lucie ! Dis oui !

– Non c'est non ! Qu'est-ce que tu ne comprends pas dans ce mot?

Je fusille ma sœur du regard. Cette gamine de dix ans refuse obstinément de lâcher prise. Cela fait plusieurs jours qu'elle veut que je l'accompagne pendant sa chasse aux bonbons qui se déroulera à la fin du mois, lors d'Halloween. Maman lui a dit qu'elle avait le droit de la faire si elle est accompagnée par un adulte responsable. Et d'après elle, je suis une adulte responsable.

– Je n'ai pas envie de me coltiner ta surveillance ! J'ai dix-huit ans, tu devrais comprendre que j'ai d'autre choses à faire que ces âneries !

– Menteuse ! Tu dis ça parce que tu n'aimes pas Halloween !

– Ça n'a rien à voir !

Elle n'avait pas tort, dans un sens. C'est vrai, je n'aime pas Halloween. Je trouve cette fête stupide et totalement dépassée. Les gens se tuent à faire des décorations, martyrisant des milliers de citrouilles. Pas que ces légumes aient une quelconque importance pour moi, hein. Je n'aime juste pas cette célébration. Sortir dans la rue, voir les autres enfants déguisés en monstres... Ridicule.

– Allez, Lucie ! C'est la dernière année ! Après, promis, je ne te le demanderai plus jamais !

Je la dévisage un instant. Son offre est tentante...

– Ça marche, Zoé. Mais plus jamais, c'est plus jamais, on est d'accord?

– Oui ! Promis !»

Je la regarde sautiller de joie, courant appeler son amie Charlotte pour lui annoncer la nouvelle. Malgré mes réticences, la voir comme ça me fait chaud au coeur.

Je sors mon portable pour envoyer un message à Mel, le grand frère de Charlotte. Un mec sympa et plutôt pas mal, même si il ne m'intéresse pas particulièrement. Je le préviens que je fais moi aussi la tournée, et lui propose de m'accompagner pour que je ne me retrouve pas seule avec les deux petits monstres.

Une fois le message envoyé, je sors sur la véranda avant de m'affaler sur la balancelle. Le mois d'octobre est frais dans le New Jersey, et les arbres ont tous opté pour un revêtement orange et mordoré.

Je sursaute en entendant une fenêtre claquer. Décidément, cette maison me fait peur. Cela fait huit ans qu'on habite ici et il y a toujours certains problèmes de tuyauteries, de chauffage... La nuit, dans ma chambre, j'entends des bruits étouffés qui semblent provenir du grenier. Il y a aussi ces détestables sifflements de radiateurs qui résonnent dans mes oreilles, inlassablement.

Un souffle frais sur mon bras me fige. Je tourne la tête de tous les côtés. J'ai la désagréable sensation d'être observée. Mon regard se pose sur le portillon de la cabane du jardin. Quelque chose vient d'y entrer, j'en suis certaine. La porte en bois vient de se refermer à l'instant dans un grincement sinistre. Je me lève et je me dirige vers la cabane. J'ai la désagréable impression d'être observée. Sans hésiter, je donne un grand coup de pied dans la porte qui s'ouvre violemment.

Un cri s'ensuit.

«– Liam... Je peux savoir ce que tu fais là?

– Je souffre !, répondit l'intrus en grimaçant et en se tenant l'épaule droite.

– Avant que tu souffres alors?

– Je suis venu voir Georgia.

Je soupire en l'entendant. Georgia est le nom qu'il donnait au fantôme de la cabane.

– Je t'ai déjà dis que les fantômes n'existaient pas..., dis-je d'une voix las.

– Mais si, ils existent !, réplique-t-il, ses grands yeux bleu nuit brillants.

Liam Williams. Âgé de dix-sept ans, féru de fantômes, esprits diaboliques, connaisseur en matière de films d'horreurs et sortilèges...

Cet énergumène aux boucles brunes et à la peau pâle est mon voisin depuis que je suis arrivée. Déjà, à cette époque, le paranormal l'attirait. C'est devenu une sorte d'obsession. Il voit des fantômes partout et est persuadé que Georgia habite ma cabane.

– Je ne préfère rien ajouter..., grimacé-je.

– Tu es venue tout gâcher..., marmonne-t-il.

– Hé ho ! Je t'entends ! Et je te ferais remarquer que je suis chez moi !

– Non, me corrige-t-il. On est dans ta cabane.

– Ne joue pas sur les mots, Liam. Ici ou dans la maison, tu es sur ma propriété. 

– Lucie, dois-je comprendre que tu refuses de reconnaître la présence de l'esprit qui hante ta cabane?, dit-il tout à coup, le visage grave.

Comment pouvait-il en arriver à cette conclusion? Décidément, tout ce qu'il dit entre en lien avec les esprits. C'est fatiguant.

– Les fantômes n'existent pas, et non, je ne crois pas en l'existence de "Georgia", quoique tu puisses en penser. Et je te demande de partir immédiatement d'ici.

Je parle d'une voix froide, presque tranchante. Il me regarde, le visage peiné.

– Lucie, laisse-moi rester encore un peu ! S'il te plaît !

– Pars, dis-je simplement. Tout de suite.

Il laisse tomber ses bras le long de son corps et baisse le regard. Il me fait de la peine. Je lui ai peut-être parler un peu trop durement. Soupirant, je lui propose alors pour me faire pardonner :

– J'accompagne Zoé pour la tournée d'Halloween. Si tu n'as rien à faire, tu n'as qu'à venir avec nous.

Il relève immédiatement la tête, un sourire éclairant son visage, lui donnant un air gamin.

– Toi qui me propose de venir faire la tournée de la fête de l'horreur? Comment pourrais-je refuser?

– En disant non?

– J'accepte ! J'aurais un déguisement si réaliste que tu en trembleras de peur !»

Et il me saute dessus, m'enlaçant avec ses bras fins avant de poser un délicat baiser sur ma joue. Il me sourit avant de relâcher son étreinte et de partir à vive allure. J'essuie du revers de la main l'endroit où il m'a embrassé. Sérieusement celui-là... Je lui ai pourtant dit que je ne veux plus qu'il fasse ça. Cela pourrait lui causer des problèmes s'il remercie de cette façon d'autres personnes qui ne sont pas habituées. Au pire, c'est son problème. Mais mine de rien, Liam compte pour moi. Il fait parti de mon quotidien. Tout comme ma famille et mes amis. Mais ça, jamais je n'oserai leur avouer.

Je jette un regard dans la cabane. Des vieux meubles, une montagne d'objets inutiles, d'ustensiles rouillés, et tant d'autres choses poussiéreuses. Nombreuses étaient les araignées qui ont élu domicile et tapissé la pièce de leurs toiles. Je passe un doigt sur le dessus d'une table, traçant une ligne fine dans la poussière. Un bruit retentit derrière moi, et je m'essuie rapidement la main.

«– Liam, si tu es revenu pour me faire peur, c'est raté.

Aucune réponse, mais je l'entends entrer et refermer la porte.

– Tu as oublié quelque chose?

Tout en lui parlant, j'ai récupéré une vieille coupe que j'ai gagné plus petite, lors d'un tournois de sport. Avec un chiffon qui traînait, j'enlève la couche de crasse qui la rend sale.

– T'as perdu ta langue? Remarque c'est plutôt pas mal.

Toujours aucune réponse. Sa respiration sifflante me gêne un peu, sans vraiment savoir pourquoi.

Et son odeur... Je ne l'ai pas senti avant mais quelle puanteur ! Une odeur de renfermé, et de relents indéfinissables. Une odeur d'égout, et de rouille. Vomis, moisis... Une puanteur qui me soulève le cœur.

– Merde, Liam, t'es tombé dans une poubelle ou quoi? »

Je me retournai pour pouvoir le voir, mais...

Il n'y a personne.

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⏰ Dernière mise à jour : Sep 08, 2020 ⏰

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