Quand elle fut heureuse

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Et les trois premières années, si calmes, si douces, s'estompent comme un rêve et s'essoufflent au gré du temps.


Septembre 1961

Ses jambes tremblent. C'est presque tout ce dont elle se rappellera de cette journée. Sa mère lui a tressé les cheveux ce jour-là. Deux tresses lui entourent la tête et lui servent de protection, comme si, lui a dit sa maman, comme si elles sont là pour te protéger, mais son bouclier n'a pas empêché le monde autour d'elle de s'esquisser, flou paysage dans une tête désorientée. Elle lève la tête, une grande porte lui fait face. Elle n'est pas seule : autour d'elle d'autres enfants attendent impatiemment et leur cris et leurs rires et leurs blagues l'empêchent de penser correctement. Du coup elle se concentre sur le tremblement de ses jambes, discret mais pourtant là.

Une femme les rejoint et elle est grande, revêche et sèche, avec un grand chapeau noir sur la tête et des lunettes rectangulaires sur le nez. Devant son regard inquisiteur, Molly ne l'aime pas, et ses sourcils se froncent pour extérioriser son malaise. Elle dut parler, cette dame, sans doute, parce qu'elle voit les lèvres de la femme bouger et ses grands yeux ternes les balayer tous. Elle dut parler, sans doute, mais Molly n'entend rien : ses jambes tremblent et elle ne voit que ça.

Puis d'un simple coup de baguette les portes s'ouvrent devant cette vingtaine d'enfants, ouvrant un monde merveilleux et inconnu ; Molly aurait pu remarquer le plafond qui imite le ciel ou alors le regard curieux des élèves accoudés sur eux, elle aurait même pu regarder le directeur aux cheveux blancs aux yeux pas tout à fait malicieux mais complices. Pourtant, la première chose que Molly remarque, c'est une lumière rouge qui reflète sur les murs. Ça lui attaque les yeux et lui fait penser au sang qui coule dans ses veines. Rouge, n'est-ce pas la couleur de Gryffondor, qu'elle se demande ? Elle lance inconsciemment un regard à la table concernée. Bruyants, brûlants pour une seconde d'attention, la plupart des élèves – les lions se rappelle t-elle, c'est comme ça qu'on les appelle – leur font des signes, un regard chaleureux censé être rassurant. Et Molly se rappelle ; ils ont un jour été à sa place, eux aussi.

Le maigre troupeau s'avance alors et elle sursaute quand un bruit sourd retentit derrière elle ; en voyant la grande porte refermée, elle se sent idiote, alors elle rougit et détourne son regard sur le haut du chapeau de la dame qui les accompagne. C'est toujours dans ces moments aux sonorités dramatiques, portes qui claquent, frissons qui secouent, que dans les livres moldus que son père lui apporte les pauvres personnages sont piégés par les vilains méchants. Souvent des sorciers, d'ailleurs.

Molly retient un sourire.

Puis se cache derrière ses nattes. Peut-être qu'elles la cacheraient, ces fidèles compagnons. Mais elle sent toujours quelques regards sur elle.

Ses camarades buttent sur les dalles de la salle et la dame leur lance un regard sévère, « je vous vois si jamais vous faites quoi que ce soit » semble t-elle dire. Puis elle se tourne vers l'homme âgé qui les dévisagent, sourire au coin des lèvres. Molly se doute bien de ce qui va se passer, dans le Poudlard Express certains élèves plus âgés avaient tenté de leur faire peur, à elle et à ses compagnons, à propos de la cérémonie d'admission. « Vous allez devoir chanter seuls et devant tout le monde, » leur avait dit un élève de Gryffondor avec un regard moqueur, « mais pas avant que vous vous battiez contre le meilleur élève de septième année : ceux qui perdent sont renvoyés chez eux. » Molly ne le croit qu'à moitié, dubitative, et s'en félicite quand elle voit seulement un chapeau rapiécé qui doit faire la taille de son torse posé nonchalamment sur une chaise quelconque.

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⏰ Dernière mise à jour : Nov 17, 2019 ⏰

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