Chapitre 1 : "Angel"

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Le soleil brûle mes paupières closes et me fait froncer les sourcils. Je grogne et me retourne pour empêcher la lumière de me sortir de ce sommeil si agréable. Pourquoi n'ai-je toujours pas acheté des rideaux ? Je remonte ma couverture et me blottis davantage contre mon oreiller.

Je ne dors pas beaucoup, mon cerveau ne cesse de travailler pendant la nuit et cela m'empêche de fermer l'œil, mais quand ça arrive, je veux en profiter un maximum et rester le plus loin possible de mes obligations et de ce sentiment de vide et de colère qui persiste au fond de moi. Je ne fuis pas, je profite simplement.

Mon téléphone vibre. Je le maudis, avant de difficilement me lever et de l'éteindre. Je pince mes lèvres et écarquille les yeux en voyant l'heure. Merde, je vais être en retard.

Je me précipite hors de ma chambre, manquant de trébucher sur un des cartons posés au sol. Je cours m'enfermer dans la salle de bain, attrapant quelques vêtements au passage, et laisse l'eau chaude de la douche et la brume envelopper mon corps et emporter avec elle ma fatigue et mon stress.

Nous avons déménagé il y a quelques jours. Notre ancienne petite ville ne nous convenait plus, que ce soient les habitants ou les logements. Tout dans cette ville nous empêchait d'avancer. C'était un lieu assez petit, tout le monde parlait sur tout le monde, mais surtout sur nous. Nous étions leur principale cible et je les comprends. C'est simple de s'attaquer à une mère, seule, et sa fille.

Je secoue la tête, essayant de chasser tous ces souvenirs de mon esprit. Alors, nous avons changé de ville. C'est aussi petit que la précédente, voire encore plus, mais cela nous convient. Une nouvelle ville est souvent synonyme d'une nouvelle vie. Je suis perplexe, mais je garde tout de même espoir.

Je sors de la douche, m'habille à toute vitesse, me brosse les dents et m'attache les cheveux en une queue-de-cheval. Je mets des baskets et descends les escaliers en courant, espérant ne pas rater mon bus.

Je passe par le salon et remarque que ma mère est endormie sur le canapé. Je grimace en voyant tous les mégots de cigarette dispersés sur le sol et une bouteille de vin vide sur la table basse.

Je me mords la lèvre et m'empresse de tout débarrasser. Je jette le tout dans un gros sac poubelle et vais dans la cuisine lui préparer quelque chose à manger. Je serai définitivement en retard.

Tout ceci ne m'atteint pas. Cela fait partie de ma vie. Je le subis depuis que je suis née, je suis plongée dedans, c'est une habitude. Voir ma mère se détruire est tout ce qu'il y a de plus normal pour moi. Je suis comme... indemnisée contre tout cela. C'est mon quotidien. Mon cerveau l'a assimilé comme tel, mon cœur aussi. Cela peut sembler étrange, voire absurde, mais j'imagine que chaque personne possède sa propre normalité.

Je dépose le sandwich sur la table basse avec un petit mot pour lui souhaiter une bonne journée et la prévenir qu'après les cours, je file au travail. Je l'embrasse sur le front et me dépêche de sortir.

Je monte les escaliers tapissés du bus, je salue le chauffeur et lui montre ma carte étudiante. Il me sourit et me dit d'avancer vers l'arrière du véhicule. Je m'exécute, quelque peu gênée de passer devant tant de gens qui n'hésitent pas à me scruter, chuchotant entre eux. Je lève les yeux au ciel, exaspérée, et trouve enfin un siège de libre.

Je sors mon téléphone de ma poche et mets mes écouteurs.

Cela me fait un bien fou de m'éloigner de cette maison, même si ce n'est que pour quelques heures. Ce vide si intense, si profond que je ressens s'évapore petit à petit, laissant place au soulagement. Les choses ont été compliquées ces derniers temps, entre le déménagement, les achats et ma mère, j'ai eu beaucoup à faire.

L'Ange et ses démons. Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant