Migraine

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Migraine terrible, dix heure pile et une envie sournoise de ne rien faire. Il pleut sur Séoul et cela n'arrange rien à ma motivation, celle-ci déserte à la vue d'une seule goutte d'eau. J'ai des papiers à faire, du linge à laver et de la vaisselle qui m'attend, en bordel, dans l'évier. Mais la chaleur de mes couettes m'agrippe, la douleur battant contre mes tempes aussi. J'ai une ville à visiter, des rues à découvrir, des racines à déterrer, un avenir à dessiner, mais elle danse en moi, m'enlace dans son étreinte bien ferme, miss paresse me colle aux baskets. Et comme chaque jour pluvieux, elle sort accompagnée de mélancolie, rendant ma vision du monde bien morose pour une gamine de vingt-et-un ans. À cet âge, on sort, s'embrasse, et se déteste, à cet âge, on expérimente, du moins c'est ce que raconte la société. Mais depuis quand celle-ci a t'elle énumérée un truc raisonnable? Elle ment sans cesse notre société et pourtant on lui répond rien, parce qu'on est ceux qui l'avons forgée.

Mon dix mètres carré m'oppresse, mais j'ai la flemme. Dehors, ça klaxonne, ça parle, ça rit, l'effervescence intemporelle de la capitale coréenne, mon double vitrage ni fait rien. J'entends mes voisins s'engeuler, à nouveau, ils se hurlent dessus à longueur de journée, dans leur dix mètres carrés, ça doit être bien triste. Leurs insultes coréennes jetées à tout va résonnent dans ma chambre, et les murs fins ni font rien. Au moins, je connais maintenant le dictionnaire des injures sur le bout des doigts et rigole parfois, je me suis vraiment foutu dans une drôle de situation.

Je regarde à travers la fenêtre, malgré la pluie, le ciel gris, et toute la morosité qu'il s'en dégage, Séoul reste une ville si animée, presque rayonnante. Comme un phare dans ce déluge. Je souffle, faut que je me bouge, je ne suis pas venue ici pour glander, j'ai un an pour vivre, rire, ressentir. Mais, à vrai dire, le décalage horaire m'a claquée et le mauvais temps ni arrange rien, ça fait trois jours que je suis dans cette appartement à ne rien faire d'autre que dormir et regarder des shows télévisés. "Tu parles du tournant d'une vie, toi" me chuchote ma conscience et pour le coup, je dois bien accepter qu'elle dit la vérité. Je souffle, pose mes pieds au sol, c'est froid. Ma maison me manque, mes parents aussi et mon chien encore plus, je veux rentrer chez moi. Les larmes me montent aux yeux, je souffles, quel bébé je fais. Je me traîne vers ma cuisine, soit faire deux pas, et attrape une boîte de dafalgan en espérant que cela chasse le vilain mal de crâne. Mon frigo est vide et les placards aussi, cela m'étonne pas, j'avais prévu de faire des grosses courses il y a deux jours mais j'ai préféré finir pour la troisième fois ce drama coréen, ma valise n'est même pas déballée. Quel bordel, il faut que je me reprenne. Je saute dans la douche, et en un record chrono, je suis habillée d'un sweat lavande et d'un legging, on repassera pour le style mais ce sont les premiers qui me sont tombés sur la main quand j'ai ouvert ma valise.

Je laisse mes cheveux mouillés retomber sur mes épaules et sautes la case maquillage pour aujourd'hui, préférant simplement appliquer une crème hydratante. Ma frange n'en fait que des siennes et je n'ai pas la patience de l'arranger, tant pis, je l'accroche en arrière, le look de la flemmarde par excellence.

Les chaussures aux pieds et un kway sur le dos, je files. Séoul et son animation me frappe, le vent souffle fort aujourd'hui, mais je n'en démord pas, cette ville fait éclore une motivation nouvelle. Et même si je suis sur le point de taper un crise de nerf parce que je n'arrive pas à trouver cette supérette, je ne n'en démonte pas moins. Et comme une vague, tout m'atteint, l'odeur de la ville, les rires des passants, le bruit constant de la circulation. Je souris.

Cette supérette est un peu trop grande à mon goût, trop de choses, trop de coréen et même pas un brin d'anglais, j'ai l'air bien con plantée avec mon cadi en plein milieu de l'allée. J'ai même pas préparé une liste de courses, je souffles. Je sens les larmes monter, mon semblant de bonne humeur se fane, j'ai envie de rentrer. Je suis fatiguée en plus. Et puis qu'est-ce que je fous là? Je connais rien au coréen, et pas grand chose sur ce pays dont je suis pourtant originaire. Quelle idée à la con. Les larmes dévalent et je me maudis encore plus, la France me manque et me voilà entrain de pleurer au plein milieu d'un rayon.

Prise dans mes tourments, je ne sens presque pas la main qui se pose sur mon épaule, j'en sursaute presque, la réalité me frappe et ma conscience se permet de me glisser un "gamine". Je tourne la tête et pose mes yeux sur l'inconnu, une casquette et un masque, wow y a pas que moi qui a opté pour le look flemmardise aujourd'hui. Je souris un peu mais me reprends vite, je dois avoir l'air d'une folle.

"Vous pouvez vous décaler s'il vous plaît?"

(nda: lorsque le dialogue est en gras et italique c'est que la conversation est en coréenne, lorsque que c'est simplement en italique c'est que c'est de l'anglais et si juste en gras, c'est du français!)

Je souffle, j'y comprends rien, le jeune homme, à en juger par sa posture et les vêtements qu'il porte, me fixe. Il attend de moi quelque chose. Je sens les larmes revenir, mon mal de crâne toujours présent, j'ai chaud, je veux dormir.

"Vous allez bien?" m'interroge le jeune homme, une certaine inquiétude se reflète dans ses yeux.

Mais ça n'y arrange rien, je ne comprends pas vraiment ce qu'il raconte, bien que je penses en avoir une petite idée, et j'éclate en sanglots. Je veux rentrer chez moi, la panique monte et je manque d'air. Je pleures encore plus, je suis fatiguée, c'est trop dur, je regrettes. Je veux rentrer chez moi, je veux que ma maman m'enlace et me dise que ça va aller, dans son coréen chantant. Et même si je ne comprends pas tout, quand elle le parle, celui-ci, semble moins effrayant. Moins effrayant qu'à cet instant même, les larmes ne cessent pas, j'ai du mal à respirer, je sens mes jambes fatiguer. J'ai chaud et je ne sens même pas si l'inconnu est toujours là, j'ai la vue brouillée et les sens éteints. Je ne sens plus, n'entends plus, ne ressens que cette panique imminente. Et j'en suis désolée, ce jeune homme doit penser qu'il a fait quelque chose de mal et s'en vouloir, je ne fais vraiment que des dégâts. Je devrais sûrement arrêter de sangloter, mais rien n'y fait, je suis à bout. J'ai chaud, j'étouffe, je sens que mon corps est sur le point de me lâcher, je suis si fatiguée. Et prise dans mes tourments, je ne sens pas ces mains se poser délicatement, timidement sous mes bras, je n'entends pas les conversations échangées autour de moi, rien ne vient à moi, je suis enfermée, prise au piège. Je ne ressens pas le vent frais de Séoul, la bruit de la circulation semble s'être atténué, j'en perds mes repères. On me traîne, une main sous mon bras et l'autre passée dans mon dos pour soutenir mon corps. On tente de me parler, mais je ne comprends rien, et je pleures. Je pleures encore et encore, je veux mon chien, mes couettes et ma maison française. Je veux partir d'ici. Un portière s'ouvre, on me fait m'assoir, je me laisse faire, comme une poupée de chiffon, je suis si fatiguée. Mes yeux se ferment, l'odeur de l'habitacle se fait rassurante, je sens le sommeil me rattraper.  Et avant même que je prennes conscience de mes actions, Morphée me tire à elle dans une étreinte maternelle.

Et oui, hello! Je suis de retour, après un bon bout de temps, mais bon! J'espère que vous appréciez ce chapitre!

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⏰ Dernière mise à jour : Jan 13, 2020 ⏰

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