Pavel Erkum - Genèse d'un détective lutin

Le Coupable est...

Les traces finissaient par rejoindre les rues pavées de Bellwade et Pavel n’avait pas pu les suivre jusqu’au bout. Frustré d’avoir été si près de la résolution de cette affaire, il rentra chez lui. Il était inutile de retourner à l’agence, il savait qu’il pouvait d’ores et déjà dire adieu à son petit bureau si confortable.

Avec un air lugubre, il ouvrit la porte de son petit appartement coincé sous les combles d’une vieille maison. Il n’avait pas la place de faire un pas de plus sans piétiner quoi que ce soit. Sans entrain, il commença à se frayer un passage en ramassant quelques affaires et les lâcha en pile sur ce qui aurait pu lui servir de lit dans une autre vie, renversant au passage un cendrier rempli de cigarettes à peine entamées.

— Bon sang !

D’un geste rageur, il donna un coup de pied dans les cendres et renversa une pile de journaux qui était dans un équilibre précaire. L’un des titres attira son attention. Il datait du mois précédent, et sur la première page, en photo, se trouvait Mirma Grikel et sa coccinelle.

Pavel renversa tout ce qui se trouvait sur son lit pour s’asseoir et observa de plus près l’article. La directrice générale de l’entreprise Grikel prévoyait de léguer les trois quarts de ses biens à une oeuvre de bienfaisance en faveur des peuplades gnomes défavorisées de son royaume d’origine.

— Mais oui ! s’exclama Pavel d’un ton enjoué.

Le lutin envoya voler sa casquette à travers la pièce et en attrapa une autre, verte celle-ci, avant de sortir de nouveau de son appartement pour prendre la direction du commissariat. Là, il demanda à parler à l’inspecteur Bergamotte.

— Il est cinq heures du matin monsieur. Personne d’autre que moi n’est dans nos locaux… lui répondit avec lassitude le gardien de nuit.
— Bien. Alors je suppose que l’inspecteur a simplement oublié d’éteindre sa lumière, là-haut, au deuxième étage ?

Le gardien leva instinctivement les yeux vers le plafond et soupira d’un air résigné.

— Écoutez, j’ai des éléments concernant l’affaire Grikel-MacKriel. De la plus haute importance, ajouta-t-il devant l’air hésitant du gardien.
— Ne bougez pas, je vais voir s’il est disponible…

Le détective se félicita intérieurement d’avoir pris la peine de mémoriser la disposition des locaux du commissariat. Il s’imaginait que cela lui servirait dans des circonstances plus dramatiques pour lui, comme une évasion pour aller résoudre coûte que coûte une affaire épineuse, mais la vie n’offrait pas toujours la dose de romantisme qu’on espérait.

— Vous ? J’ai déjà dû mettre aux arrêts deux de vos collègues la nuit dernière, vous voulez les rejoindre ?
— Aux arrêts ?

Pavel ne put empêcher un sourire victorieux de venir jouer sur ses lèvres et l’inspecteur haussa un sourcil.

— Je crains fort de ne déjà plus faire partie de cette agence inspecteur. Mais je ne viens pas pour parler de cela. J’ai quelques éléments à vous transmettre concernant le meurtre de Kliene MacKriel.
— Nous tenons déjà le coupable.
— Permettez-moi d’en douter inspecteur.

L’elfe haussa les deux sourcils cette fois-ci, surpris par l’aplomb du lutin.

— Montez donc dans mon bureau, nous parlerons de ça autour d’un café. Je vais en avoir besoin après cette nuit blanche.
— Je prendrai plutôt une tisane.

Sans rien ajouter, l’inspecteur prit la direction des escaliers, et le détective sourit intérieurement. Il avait déjà gagné cette partie là, il n’avait plus qu’à se montrer convaincant, mais il était sûr de son intuition. Les morceaux se recollaient de telle façon qu’il ne pouvait en être autrement.

— Je vous écoute.
— Il faut mettre au plus vite Hektor Grikel aux arrêts.