Les Entrailles du Monde

Dans la gueule du démon

— Je ne vois absolument rien ! se plaignit Draco.

— Il faut absolument avancer le plus discrètement possible, chuchota Krouyky.

Depuis plusieurs gnomheures, Krouyky et Draco avançaient à l'aveuglette. Ils guettaient chaque bruit, chaque mouvement d'herbe ou de branche. La peur les tenaillait de plus en plus à chaque pas. L'obscurité était dense et la tension palpable.

— Je suis fatigué ! se plaignit toujours le Dragonnoux. On pourrait s'arrêter un instant ?

Krouyky consentit à faire une pause. Mais la perspective de passer plus de temps encore dans cette forêt maudite lui faisait froid dans le dos.

— D'accord. Par là ça me semble une bonne idée, répondit Krouyky en désignant une petite anfractuosité dans une roche.

Ils s'engouffrèrent dans le passage étroit et ils camouflèrent l'entrée avec des branchages.

Complètement dépouillés depuis leur mésaventure, les deux compagnons n'avaient plus ni feu, ni provision. Il faisait froid dans cette forêt humide et Krouyky tremblait de tous ses membres.

Il essaya la technique employée par son vieux gnom'papy dans les temps d'avant pour faire un peu de feu. Il avait ramassé du bois sec en chemin ainsi qu'un peu de brindilles. Il posa un bout de bois creux sur le sol et il en posa un autre à la verticale sur le bout creux dans lequel il avait au préalable mis quelques brindilles sèches. Il commença à frotter le bâton d'avant en arrière. Le temps sembla passer très lentement.

— J'ai mal aux mains, dit Krouyky au bout d'un moment.

— Je peux peut-être essayer, dit timidement Draco.

Krouyky lui tendit les accessoires et le Dragonnoux prit place devant le bricolage du Gnomhom.

Il resta assis devant sans mot dire. Krouyky allait lui expliquer la technique quand il fut interrompu par le Dragonnoux.

— Je suis un Dragonnoux, dit ce dernier.

— Oui, tu me l'as déjà dit, commença à s'énerver Krouyky, qui avait grand besoin de se réchauffer.

—Les Dragonnoux peuvent cracher du feu.

Krouyky poussa un gros soupir de soulagement.

— C'est génial ! s'enthousiasma-t-il.

— Le problème, tempéra Draco, c'est que je ne sais pas trop comment on fait.

Krouyky ne comprit pas très bien, mais devant l'air honteux de son ami, il n'osa pas demander de détails. Pourtant, il leur fallait absolument du feu ou ils allaient mourir de froid.

— Il y a bien un moyen mais normalement on ne nous l'apprend pas tout de suite car les jeunes Dragonnoux sont très maladroits, et qu'il y a eu trop de problèmes d'incendies avec les jeunes. Dragon'mam pensait que je n'étais pas encore prêt.

— Peut-être que tu pourrais essayer ?

Krouyky comptait désespérément sur son ami. Il avait cruellement besoin d'être réchauffé et d'avoir un peu de lumière. Il n'était jamais resté aussi longtemps dans le noir. Il ne fait jamais noir dans le monde des Gnomhoms. Même quand l'horloge indique la nuit, les torches restent allumées. Les Gnomhoms détestent le noir et l'obscurité de la caverne commençait à l'angoisser terriblement.

— Bon je vais essayer. J'ai déjà vu ma dragon'mam le faire, alors je peux y arriver.

Draco bomba le torse, déploya ses petites ailes, ouvrit grand la gueule et commença à tousser très fort. Il toussa mais cracha un peu de bave en guise du feu promis. Krouyky était en train de se dire que si Draco n'y arrivait pas, il ne pourrait même plus essayer de faire du feu, tellement le bois et les brindilles étaient mouillées par la bave du Dragonnoux.