première partie

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Alors que la fumée s'échappant de la bouilloire semblait l'hypnotiser, Namjoon s'était contenté de prendre appui sur le plan de travail délavé de la cuisine, l'air ailleurs et les yeux dans le vide. En fait, les événements du matin même lui revenaient en mémoire, inlassablement. Encore et encore.

Les murs sales et délabrés de l'appartement occasionnellement occupé ne semblaient plus attirer l'attention. Ses occupants y avaient pris goût à présent. Et à travers l'humidité des lieux et l'odeur désagréable du milieu, il était facile de deviner que la décoration n'était plus leur priorité. 

Depuis quelques heures, un silence de mort s'était installé dans la demeure. Les rires ne résonnaient plus, et les légères discordes s'étaient éteintes. L'ambiance résumait plus ou moins l'humeur générale. 

Du haut de son canapé  Taehyung se contentait d'observer l'homme devant sa cafetière encore vide. Et alors que le silence régnait dans la pièce, le bruit de la bouilloire avait résonné dans un claquement sourd; le son avait fait écho, annonçant la fin du cycle pour l'eau encore chauffante. Namjoon avait enroulé ses doigts autour du manche, pour déverser l'eau dans le filtre dans des mouvements circulaires.

La vérité, c'est que, assis sur son canapé, une jambe pliée sur l'assise et l'autre pendant dans le vide, Taehyung regardait son ami s'occuper de son café comme s'il n'avait jamais tenu une arme dans les mains, quelques heures plus tôt. Comme s'il n'avait pas tué quelqu'un, le matin même. Comme si, à l'apparition des premiers rayons du soleil, il n'avait jamais retiré la vie.

Sans doute était-ce ce qui répugnait le châtain ces derniers temps. Ce qui, lentement, devenait une gêne pour lui. Cette indifférence constamment présente sur le visage figé de Namjoon. Ôter la vie avec une telle aisance, pour finalement agir comme si le sang sur ses mains n'avait jamais existé. Comme si tout ça, ne le faisait même plus réagir. 

Vivre normalement, boire son café dans un calme inquiétant.

Pourtant, il n'avait pas su empêcher son visage de se déformer à la seule pensée que lui aussi, était comme ça. Que son corps ne lui appartenait plus lorsque l'adrénaline prenait le dessus et que sa violence finirait par le rendre dingue.

Ça insupportait Taehyung et il le savait, il ne le supporterait plus très longtemps.

Ses pensées en désordre, le cœur battant étrangement vite et la présence toujours silencieuse, il avait articulé d'une voix grave mais posée.

« T'étais pas obligé de faire ça. »

Son timbre calme dissimulait une colère naissante à mesure que les jours défilaient. Un ton empli de sous-entendus.

Et l'esprit perdu dans un monde aux horizons sans fins, Namjoon avait discrètement sursauté, parce qu'il n'avait pas même remarqué l'entité du châtain toujours installé dans le canapé de cuir abîmé. Il s'était très vite repris toutefois, refusant de ne dévoiler une faiblesse apparente à celui qu'il avait vu grandir.

« Si, et tu le sais aussi bien que moi. En même temps, il s'était retourné, sa tasse désormais fumante au bord des lèvres et le regard enfin relevé vers l'homme à la chevelure décolorée.

- 'Y a des manières beaucoup moins extrêmes que d'ôter la vie. Ça aussi, tu le sais.

- J'crois que les nouveaux ont du mal à imprimer nos valeurs, Taehyung. 

- Et j'crois que tu viens d'arracher l'essence de cet homme. Taehyung avait froncé les sourcils, les poings crispés sur le dossier du canapé. Agacé par le comportement certainement trop indifférent du plus vieux. Et tu viens de briser les rêves d'une femme.

- Je nous ai sauvé la vie.

- En prenant celle d'un autre.

- Je peux tolérer beaucoup de chose, Taehyung. Mais pas la trahison.

- Qui es-tu pour décider de— »

Il n'avait pas eu le temps de poursuivre. Parce que d'un des couloirs de l'appartement venait de surgir la femme qu'il avait appris à admirer. La souplesse de sa chevelure châtaine et sa taille légèrement inférieure à celle des garçons, ne lui retiraient aucunement l'autorité qu'elle avait su imposer.

Sur le sol de parquet usé, ses épais talons résonnaient comme si, par ce simple bruit, sa présence ne s'en trouvait que plus grande. Puis d'une aisance naturelle, elle avait pivoté vers Taehyung, son regard de jade détaillant la silhouette presque avachie de ce jeune garçon encore installé.

Le châtain avait balancé sa tête en arrière tout en soupirant, lourdement.

« C'était toi... Son murmure avait fendu l'air en même temps que le cœur de Namjoon resté silencieux depuis. 'Tu' lui as dit de le faire.

- Je ne lui ai pas laissé le choix, Taehyung. »

Elle avait affirmé, la voix forte et l'air sûr d'elle. C'est ce qui avait fait plier les garçons. 

Cette assurance contagieuse. Une confiance en elle que peu serait capable d'égaler.

« T'as même pas essayé de le comprendre. Il avait soufflé, les yeux baissés. Même pas pris le temps d'entendre ce qu'il avait à dire.

- Crois-moi, Taehyung. Parfois, agir vaut bien mieux que la parole. »

Elle n'avait pas cherché à en dire plus. Parce qu'elle avait compris avec le temps, que Taehyung possédait cette pureté. Que la mort, l'avait toujours répugné et qu'il faisait tout pour l'éviter, même dans ses moments de latence et de folie.

« Dans mon bureau. D'un mouvement de main, elle avait balancé ses cheveux en arrière. Tout de suite. »

Les ordres de la madre, n'étaient pas à discuter.











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Nous étions jeunesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant