4- Sauvez-vous !

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Marie,
l'insurrection à laquelle le royaume fait face est sans précédent. Les protestants sont prêts à tout pour renverser le pouvoir établi par Rome. J'ai appris votre décision de retourner en Ecosse. Êtes-vous sûre que ce soit là une bonne idée ? L'Écosse est un royaume protestant. Bien que vous en soyez la reine, vous ne serez pas plus en sécurité en Ecosse qu'en France. D'ailleurs, ce que réclame les protestants, c'est un roi et non une reine ; et vous le savez mieux que moi, votre demi-frère, celui là même qui assure l'intérim de la royauté depuis la mort de feu votre mère, est protestant et fait le candidat idéal. Réfléchissez-y à deux fois douce reine. Aller en Ecosse sans allié politique, c'est se jeter dans la gueulle du loup. Vous aurez beau Catherine de Médicis comme alliée, celà ne vous avancera à rien vu sa position actuelle. Depuis votre mariage avec François, son statut n'a arrêté de subir les coups de l'oubli. Maintenant que le roi est mort, Catherine de Médicis est morte avec lui. Il ne nous reste que la mère du roi. Le frère de François fait un roi pathétique. Vous l'avez vous même vu. Il n'a ni la sagesse, ni le charisme de son feu frère. Puissiez-vous me faire grâce de votre pardon face à la dureté de mes mots, mais le jeune roi n'a aucune connaissance politique mais se refuse à ce que je vois, de prendre en considération les mots de la Reine-mère la plus maligne et la plus crainte il fut encore un temps, de toute l'Europe. Catherine de Médicis est incontournable. Nul n'est sans savoir combien brillante sont ses idées. Ce qui vous arrangerait maintenant Marie, ce serait le mariage avec le principe Portugais. Ce mariage vous assurerait pouvoir, influence et protection. Arrêtez de trainer ce gentille-homme ma reine. Il pourrait bien se détourner de vous. Pardonnez je vous en conjure, la rudesse de ma lettre. Votre bien être est bien plus important à mon cœur que ma propre vie. Je préfère vous savoir vivante, soumise et dans le luxe, que courageuse, intrépide et pauvre esclave. La reine d'Angleterre, la sanguinaire Elizabeth, ne se reposera que quand vous serez six pieds sous terre. Sa haine vis à vis de vous n'est pas inspirée par le souci de protéger ou d'agrandir son royaume. Cette haine est celle qu'éprouve la biche vis à vis du lion prédateur. Ce n'est rien d'autre que qu'un mélange de peur et d'impuissance tellement intense qu'elle se change en colère. Tant qu'il vous restera un souffle de vie, elle jugera sa tête menacée. Vous lui demanderez une trêve ou promettrez sur l'honneur ne jamais porter offense à sa couronne qu'elle vous posera quand même le glève sous le cou. Votre sang est noble et légitime. C'est une insolence qu'elle ne peut vous pardonner. L'insolence de ce sang qui coule en vous éveille son animosité. Votre grâce lui fait voile. Vous n'êtes pas de taille Marie, fuyez! Pensez à vous même avant tout. Ne retournez pas en Ecosse. Le Portugal est votre meilleure chance. La seule d'ailleurs. J'ai beaucoup parlé ce soir. C'est parce que je me sens mieux. J'aimerais bien ne jamais m'arrêter d'écrire, mais la flamme de la bougie pâlie. Je vous embrasse ma Reine.

Qui vous savez.

Lettres d'un amant mourant Où les histoires vivent. Découvrez maintenant