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La tête posée contre la vitre de la voiture, je fixe le paysage qui défile devant mes yeux. J'ai arrêté de pleuré il y a une bonne dizaine de minute. Pendant ce temps, Allan n'a rien dit, le trajet se fait dans le silence complet. Moi je suis épuisée. Épuisée par ma famille, épuisée par notre relation, épuisée par toutes les émotions que je ressens actuellement. J'ai su remonter la pente une première fois, mais je ne pourrais pas le faire une seconde fois.



L'atmosphère entre Allan et moi est différente cette fois. Il n'y a pas d'animosité, pas encore. J'ai l'impression que lui, comme moi, sommes fatigué par toute cette histoire. Il va falloir qu'on prenne une décision sinon nous allons sombrer dans un profond désespoir chacun de notre côté.



J'envoie un message à Ambre pour savoir si elle se trouve à l'appartement actuellement, ce à quoi elle me répond que non mais qu'elle rentre tard ce soir.



-Ju' ? J'entends qu'il m'appelle.



Putain de sentiment qui me donne envie de pleurer à chaque fois que j'entends sa voix.

-Julia, il faudrait qu'on parle. Il insiste.



C'était donc ça. Il m'a laissé tranquille tout le trajet pour commencer à attaquer une fois devant le bâtiment de mon appartement. Mes poings se serrent fortement, est-ce que je suis prête à avoir cette conversation avec lui maintenant ? Plus important, est-ce que mon cœur va tenir le coup ? J'ai déjà l'impression qu'il va sortir de mon corps.



-On monte. C'est la seule chose que j'arrive à souffler avant d'attraper mon sac et de sortir de la voiture.



Je ne l'attends pas et commence à monter. Je dois à tout prix garder mes distances, c'est notre proximité qui me rend faible.


Les mains tremblantes, j'insère mes clefs dans la serrure et laisse la porte ouverte pour qu'il rentre à son tour. Le silence règne encore une fois entre nous, ni lui, ni moi ne savons par où commencer je pense. Mais c'est alors qu'il se lance le premier.



-J'en peux plus Julia. 



J'entends sa voix résonner dans mon dos. Il s'est installé sur le canapé tandis que je suis accoudée au comptoir de ma cuisine. Je n'ose pas me retourner, j'ai peur de croiser son regard et de m'abandonner dedans.



-Il faut qu'on parle, vraiment. Ajoute-il, voyant que je ne réponds pas.



Sans le voir, j'arrive à savoir qu'il me fixe d'un regard désespéré. Il cherche à capter mon attention, à me faire retomber dans ses filets. La question est, est-ce que je vais réussir à tout lui pardonner ?



-Parler de quoi Allan. Je rétorque d'un ton las, bien qu'au fond de moi j'ai envie de hurler tout ce que j'ai sur le coeur.



-Parler de tout, de rien, de ce que tu veux. Ça fait tellement longtemps que j'attends d'avoir cette conversation avec toi, si tu savais.



Je l'entends se lever et commencer à se rapprocher de moi, mais avant qu'il n'atteigne une distance trop proche de moi, je me retourne brusquement.



-Pourquoi ? Je lui demande, plantant finalement mon regard dans le sien.



Son visage montre qu'il est épuisé, lui aussi doit avoir du mal à dormir. Il cherche dans mes yeux une once de douceur, mais je ne lui renvois que de la haine et du dégout. C'est tout ce qu'il mériterait de ma part, et non la sympathie que je lui ai apporté en l'aidant à ce bar l'autre jour.



-Pourquoi quoi ?



Il est perdu, il se demande ce que je lui demande. A vrai dire je ne sais pas non plus. Pourquoi m'a-t'il trompé ? Pourquoi a-t'il foutu en l'air deux ans d'une relation qui, à mes yeux, avait tout pour fonctionner ? Pourquoi m'a-t'il fait endurer cette horreur alors qu'il prétendait m'aimer jusqu'à en mourir ?

Je ne sais pas, je ne sais plus rien quand il est à côté de moi.



-Pourquoi tu m'as fais ça ? Je lui sors finalement, mes yeux se remplissant de larmes.



Il tente de s'approcher de moi, mais je lui fais par un mouvement sec de ne pas faire un pas de plus. Je vois ses poings se serrer, je vois qu'il se mord la lèvre, je vois qu'il passe sa main dans ses cheveux, montrant sa nervosité.


Je connais tout de lui, j'ai passé deux ans à apprendre chaque petits détails sur sa vie, sa personnalité. J'étais entrée dans sa vie, mais il m'a vite dégagé au final.



-Ju'...



-Julia. Je le coupe.



-Julia..Je ne sais pas. Honnêtement je ne pourrais pas te donner une raison précise parce-que moi-même j'en ai aucune idée. L'influence des autres sur moi peut-être, l'envie de découvrir quelque chose de nouveau. Mais c'est la plus grosse erreur de ma vie Julia putain, je ne sais pas pourquoi j'ai fais ça. Ça me rend fou.



Il pose son dos sur le haut du canapé et prend appui dessus. De mon côté, je sens mes jambes qui commencent à trembler, c'est pourquoi je m'assois sur un des tabourets à ma droite. 
Son regard est suppliant, j'aimerais croire que ce qu'il me dit est sincère. Pourtant je n'y arrive pas, j'ai l'impression que tout ce qui sort de sa bouche n'est qu'un mensonge.



-Ça ne signifiait rien ? Je le questionne, espérant que sa réponse soit réellement sincère.



-Rien, rien du tout. Il m'affirme, droit dans les yeux.



-Ça ne signifiait rien... Murmurais-je pour me convaincre. C'est encore pire putain.



Je me lève brusquement et pars me chercher un verre d'eau, ma gorge devient de plus en sèche au fur et à mesure de la conversation.



-T'imagines ? Cracher sur notre relation pour quelque chose qui ne signifiait rien ? Tu m'as bien respecté là. J'aurais à la limite préféré que tu me dises que tu es tombé amoureux d'elle, j'aurais eu moins de peine.



-J'ai pas réfléchis au conséquence Julia, je sais que j'ai merdé du début à la fin. A aucun moment j'ai voulu cracher sur ce qu'on a vécu tout les deux ou sur toi. Tu sais que je te respecte plus que n'importe qui.



-Non je le sais pas Allan ! Parce-qu'aller baiser une fille que je connais alors que tu es en couple avec moi, je n'appelles pas ça me respecter tu vois.



-Je... Putain je voulais pas dire ça. Il se lève et tente encore de s'approcher de moi.



Il pense que je ne connais pas sa technique, à chaque dispute il avait juste à me prendre dans ses bras pour que je me calme. C'était toujours comme ça, c'est pour ça que je l'aimais. Il était le seul à avoir autant de pouvoir sur mon être entier.


-Je t'ai tout donné Allan. Je commence. Je t'ai aidé à devenir une meilleure personne, à sortir de la misère dans laquelle t'étais et j'ai finis par réparer ton esprit et ton cœur. Quand tu n'allais pas bien, j'étais là pour toi. Je t'ai appris à aimer ta famille malgré tout ce qui s'est passé et je pensais même t'avoir appris à tomber amoureux. Mais apparemment pas. Toi tu m'as apporté une stabilité, tu m'as fais évoluer mais tomber pour toi c'était mon erreur. J'aurais du me douter que c'était trop beau pour être vrai, j'ai juste perdu mon temps avec toi et il n'y a pas une seule seconde que je ne passe pas sans regretter notre relation.

Je reprends difficilement mon souffle après ma tirade. Ça y est, j'ai tout sorti. Mais alors que je pensais être soulagée, je me sens juste vide. Vidée de toute émotion. Le regard qu'il me jette après mes dits me brise le cœur. Je vois les larmes lui monter mais il les chasse d'un revers de main.

Les miennes coulent déjà à flots sur mes joues. J'ai beau essayer de les faire partir, rien n'y fait. J'ai l'impression qu'elles sont ancrées en moi, comme lui l'est dans mon cœur.



-Je comprends que tu sois en colère. Sa voix tremble, il se retient d'exploser, je le sens.



-Je suis pas en colère Allan. Je suis brisée, je souffre putain.

 Tu comprends ça ?Je lui crie en tapant un coup sur le comptoir.

Là, s'en est trop pour lui. Il se lève et se met dos à moi pour cacher les quelques larmes qu'il laisse échapper.

Allan pleure rarement, très rarement même. Mais lorsqu'il le fait, c'est qu'il est réellement touché. C'est pour quoi, à ce moment là, je sais qu'il est sincère et qu'il se sent mal.


Et ça me réconforte de savoir que lui aussi souffre. C'est peut-être méchant à dire, mais heureusement qu'il se sent mal pour ce qu'il a fait, pour ce qu'il a détruit, car moi j'étais à un endroit où je ne pensais jamais arriver dans ma vie. J'étais au plus bas, et heureusement que j'étais bien entourée parce-que je ne sais pas comment j'aurais fais sinon.



-Je suis désolé Julia, je sais pas quoi te dire d'autre. Je suis tellement désolé, je m'en veux, je me déteste pour ce que j'ai fais, réellement. Je m'en voudrais probablement toute ma vie ok ? Il revient vers moi mais cette fois ci ignore la barrière que j'ai instauré entre nous depuis le début.


-Tu te souviens la promesse que tu m'as fait ? Que tu ne me blesserais jamais ? Que tu serais toujours honnête avec moi ? 

Mon ton commence à hausser, mes nerfs lâchent petit à petit.

Son visage se décompose une nouvelle fois, il s'attendait à ce que je cède, sauf que je n'ai pas finis. C'est loin d'être aussi simple que ça.



Après un repas de famille chez lui, lorsque sa relation avec ses parents commençait à s'améliorer, il m'a amené dans sa chambre car il avait une surprise. C'était le cadeau le plus sentimentale qu'on ait pu me faire bien que pour d'autres, c'est peu. Il m'a offert un bracelet, très simple et pas cher, mais il savait que mes parents ne m'en avaient jamais offert, ou n'importe qui d'autre d'ailleurs. Même pas mon ex avant lui.
Ce cadeau a marqué un réel tournant dans notre relation, j'ai appris à lui faire confiance, ce que je fais très difficilement. Aujourd'hui, il a craché sur sa promesse et l'a piétiné.

-J'y ai cru tu sais, j'ai vraiment cru que tu ne me blesserais jamais. J'ai toujours été droite et honnête avec toi. Toi, t'as fais tout l'inverse. Sous le coup des nerfs, je me lève et le pointe du doigt pour l'accuser. Tu ne m'as pas respecté, tu m'as sali en me faisant la pire des crasses possibles. Je m'approche encore de lui et pose mon doigt sur son torse, ce contact me fait frissonner. Je te déteste parce-que tu m'as fais ça. Et je me déteste aussi parce-que j'ai l'impression que je n'arriverais jamais à t'oublier putain.



-Je veux pas que tu m'oublies Julia. 



Il attrape ma main et la remonte doucement vers son visage. Je le laisse mener la danse pendant quelques secondes, le temps que je reprenne un peu de force. Mais il ne s'arrête pas là, il vient déposer un léger baiser sur ma paume, puis un autre. Mes yeux se ferment, remplis de larmes, c'est si douloureux. Je me revois au début de notre relation, lorsque je découvrais une nouvelle façon d'aimer avec lui, une nouvelle façon de voir le monde. Un sanglot s'échappe de ma bouche, je me recule immédiatement d'Allan.

 Encore une fois je me laisse avoir, il a fallu qu'il prenne ma main pour que je perdre contrôle.

Mais les mots qu'il prononce ensuite me font sortir de moi, j'explose.

RemordsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant