Chapitre 2

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Quand ils furent arrivés à leur maison de campagne, Makarof et ses trois fils s'occupèrent à labourer la terre. La belle Lucy se levait à quatre heures du matin et se dépêchait de nettoyer la maison et de préparer à dîner pour la famille. Elle eut d'abord beaucoup de peine, car elle n'était pas habituée à travailler comme une servante ; mais, au bout de deux mois, elle devint plus forte et la fatigue lui donna une santé parfaite. Quand elle avait fait son ouvrage, elle lisait, jouait du clavecin, ou bien chantait en filant. Ses deux sœurs, au contraire, s'ennuyaient à mort ; elles se levaient à dix heures du matin, se promenaient toute la journée, et regrettaient leurs beaux habits, leurs amis et leurs sorties.

« - Voyez notre cadette, disaient-elles entre elles, elle est si stupide qu'elle se contente de sa malheureuse situation. »

Le bon Macarof ne pensait pas comme ses filles. Il savait que la cadette était plus propre que ses sœurs à briller en société. Il admirait la vertu de cette jeune fille et surtout sa patience ; car ses sœurs, non contentes de lui laisser faire tout l'ouvrage de la maison, l'insultaient à tout moment.

Cela faisait un an que cette famille vivait dans la solitude, lorsque le marchand reçut une lettre arrivée de la ville par laquelle on lui annonçait qu'un navire que l'on pensait perdu, sur lequel il y restait des marchandises, venait d'arriver sans encombre à quai.

Cette nouvelle faillit faire tourner la tête à ses deux aînées qui pensaient qu'enfin elles pourraient quitter cette campagne où elles s'ennuyaient tant. Quand Macarof fut prêt à partir à la ville, il embrassa chacune de ses filles et promit à chacune un magnifique présent.

« - De la soie ! Répondît Jenny
- des perles ! Répondit Cherry
- Et toi Lucy ? Demanda Macarof en se tournant vers sa cadette
- Rien merci, murmura-t-elle, juste votre retour
- Cela je te le promet, mais ne veut tu rien d'autre ? Allons dis moi... tout ce que tu voudras
- Je voudrais un prince, pensa-t-elle »
Elle devait à tout prix trouver un cadeau.
« - Pardonnez moi père. Si cela vous fait plaisir j'aimerai une rose, il n'en pousse guère par ici, et cela me manque beaucoup. »
Ses sœurs se moquaient d'elle.
« - Tu auras la plus belle des roses que l'argent peut acheter ! S'exclama Macarof »

Et il partit à cheval.

Mais quand il arriva en ville, la cargaison du navire avait été saisie pour payer ses dettes on lui fit un procès. Et, après avoir eu beaucoup de peine, il revint aussi pauvre qu'il était auparavant. Il n'avait plus que trente milles à parcourir avant d'arriver à sa maison et il se réjouissait déjà du plaisir de voir ses enfants. Mais, comme il fallait traverser un grand bois avant de trouver sa maison, il se perdit. Il neigeait horriblement ; le vent soufflait si fort qu'il le jeta deux fois à bas de son cheval. La nuit étant venue, il pensa qu'il allait mourrir de faim ou de froid, ou qu'il serait mangé par des loups qu'il entendait hurler autour de lui.

Tout d'un coup, en regardant au bout d'une longue allée d'arbres, il vit une grande lumière, mais qui paraissait bien éloignée. Il marcha de ce côté-là et vit que cette lumière venait d'un grand palais, qui était tout illuminé, le vent tomba.

Makarof remercia Dieu du secours qu'il lui envoyait et se hâta d'arriver à ce château ; mais il fut bien surpris de ne trouver personne dans la cour. Il fut étonné du calme qui y régnait. Son cheval qui le suivait, voyant une grande écurie ouverte, entra dedans ; ayant trouvé du foin et de l'avoine, le pauvre animal, qui mourait de faim, se jeta dessus avec beaucoup d'avidité. Le marchand l'attacha dans l'écurie et marcha vers le château, mais personne ne vint l'accueillir, ni valets, ni serviteur. Le heurtoir de la porte était garni de pierres précieuses et était sculptée en or massif. En posant sa main dessus la porte s'ouvrît toute seule. Il entra dans une grande salle, où un beau feu brûlait dans une grande cheminée dont il s'approcha pour se réchauffer. Sur une table un repas y était mis et où il n'y avait qu'un couvert, le repas sentait tellement bon qu'il se régala. Il se servit un poulet qu'il mangea en deux bouchées, et en tremblant. Il but aussi quelques coups de vin ; devenu plus hardi.

Il se disait à lui-même :
« Le maître de la maison ou ses domestiques me pardonneront la liberté que j'ai prise, et sans doute ils viendront bientôt. »

Puis il sortit de la salle et monta l'immense escalier et traversa plusieurs grands appartements magnifiquement meublés. À la fin, il trouva une chambre où il y avait un bon lit et, comme il était minuit passé et qu'il était las, il prit le parti de fermer la porte et de se coucher et s'endormir aussitôt

La Belle et le DragonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant