2 ∙ Passer entre les mailles du filet ∙

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Fin juin 2017 : nouvelle poussée

Je suis enseignante, je faisais classe à mes CE1 quand tout à coup j'ai été prise instantanément de douleurs abdominales, de vertiges et de sueurs froides. Pour ne pas faire paniquer les enfants, je me suis assise à mon bureau et leur ai dit de terminer les travaux en cours. J'ai demandé à deux élèves d'aller chercher la directrice, qui était heureusement déchargée ce jour-là. Les enfants ne comprenaient pas ce qu'il se passait, ils me voyaient toute affaiblie et me regardaient d'un air anxieux. Ma collègue est arrivée et a pu prendre ma classe en mains pendant que j'étais partie aux WC et me reposer. Cette maladie peut être difficile quand on exerce un métier face à un public. On ne peut pas se permettre de lâcher sa classe sans personne aux commandes, il faut parfois prendre sur soi jusqu'à ce qu'on puisse avoir une pause. Je suis ensuite rentrée chez moi et j'ai été chez le médecin qui m'a arrêtée pour quelques jours.

A mon retour au travail, un parent s'est exclamé haut et fort tout sourire au portail : « Alors comme ça la maitresse avait la diarrhée ! »

Pas très fin comme remarque ... les gens ne se rendent pas compte parfois à quel point ça peut nous blesser. Cette personne avait trouvé ça drôle que son enfant le lui ai rapporté cette nouvelle un soir et avait jugé bon de m'en faire part. Je ne sais même pas qui avait pu expliquer ceci au gamin car je n'avais dit à personne de l'école la raison réelle de mon absence. Pour lui clore le bec je lui ai répondu que c'était une poussée de la maladie de Crohn.

Juillet 2017 : nouvelle poussée

Fin juillet 2017 : nouvelle poussée

« Ça s'en va et ça revient ! »

Août 2017 : Arrêt de la pilule pour désir de grossesse, mais au même moment une nouvelle poussée apparaît, je ne tente donc rien, j'attends d'abord qu'elle s'estompe.

Deux semaines de régime sans résidus ... aucune amélioration. D'habitude en une semaine la poussée disparait, mais cette fois-ci ça ne fait qu'empirer. J'appelle le cabinet de ma gastroentérologue ... Nouveauté : les rendez-vous se prennent désormais seulement par Internet. Prochain rendez-vous pour fin octobre (nous sommes en août). Même les autres gastroentérologues sont complets. Je me suis demandé comment j'allais tenir jusque-là ... En attendant, j'ai consulté mon médecin généraliste qui m'a donné son accord pour que je débute le Mikicort® que j'avais laissé de côté. Elle me prescrit également un bilan sanguin.

Septembre 2017 : rentrée des classes. Je prends sur moi, je souffre en silence, j'essaie de supporter, je fais comme si de rien était. Dès la sortie des enfants, je cours aux WC en espérant que personne n'y soit déjà et ne passe par là au même instant tellement les bruits peuvent être gênants. Quand un parent m'interpelle au portail, je prie pour que cela dure le moins longtemps possible afin de ne pas trop grimacer et pouvoir aller me soulager. Je vais au petit coin une dizaine de fois par jour même la nuit, il y a toujours du liquide à profusion, du sang, des glaires, j'ai des vertiges, d'insupportables maux de ventre, des nausées, une faiblesse, une fatigue, des tremblements. Je n'en peux plus. Cela fait un mois que je suis sous régime sans résidu (régime sans fibres : ni fruits, ni légumes, ni crudités, ni épices, ni matière grasse, composé principalement de féculents et de viandes maigres), je suis passée de 50 à 43 kg. Je retourne voir mon médecin. Je lui explique mon angoisse face à la quantité impressionnante de sang que je perds (l'équivalent de plusieurs gobelets). Elle consulte les résultats de mon bilan sanguin : mon hémoglobine est en baisse mais reste correcte selon elle. Si je semble perdre beaucoup de sang, me dit-elle, c'est parce que c'est mélangé à une grande quantité d'eau, ce n'est donc pas inquiétant. Plusieurs résultats sanguins sont élevés et au-dessus de la normale notamment les leucocytes et le syndrome inflammatoire (CRP), je manque également de potassium, mais tout ceci ne l'interpelle pas. Elle me conseille de patienter jusqu'à mon rendez-vous de fin octobre avec la gastroentérologue, de ne pas me faire de soucis et de continuer le Lopéramide®, le Smecta® et le Mikicort® même si ce dernier n'a aucun effet sur moi alors qu'il aurait pourtant déjà dû commencer à agir depuis plusieurs jours. Elle ne juge pas nécessaire de me faire un arrêt de travail.

« Votre maladie n'est pas grave. »Where stories live. Discover now