Chapitre 4

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Je fus tirée de mon sommeil lorsqu'un bras atterrit brutalement sur mon estomac. Je grognai et me tournai pour voir l'heure sur mon réveil. Sept heures onze. Je m'extirpai donc de ma couette et recouvris Kiara avec. Je pris mes affaires de patinage le plus silencieusement possible pour ne pas la réveiller avant de quitter la chambre. Je descendis prendre un rapide petit déjeuner, un bol de céréales et une pomme feront tout à fait l'affaire. Alors que je rangeai mon bol dans le lave-vaisselle, Katy arriva dans la cuisine.

— Salut ma puce, qu'est-ce que tu fais debout si tôt ? me demanda-t-elle en m'embrassant.

— Bonjour Katy. En fait les petites sœurs de Cassie m'ont réservé la patinoire ce matin.

— Je vois que tu es toujours aussi mordue, commenta-t-elle.

J'acquiesçai avant de me retirer dans la salle de bain pour me préparer. Après une rapide toilette, j'enfilai mon justaucorps par dessus mes collants. Je mis ensuite ma veste par dessus et mes Converse. De toute façon, à cette heure-ci, je ne croiserai pas grand monde que je connaisse dans le bus. Je m'attachai les cheveux en un chignon très serré sur le haut de mon crâne. Je jetai un rapide coup d'œil dans le miroir de l'entrée en sortant et jugeai mon apparence correcte. Je demandai à Katy de prévenir mon parrain que je partais patiner avant de m'éclipser.

Dans le bus, je retins à grand peine mon impatience. J'arrivais quelques fois à avoir la patinoire pour moi seule en France mais celle de Manchester était indéniablement plus grande. Lorsque le bus arriva à l'arrêt de la patinoire, je me dépêchai de quitter cet endroit remplit de têtes encore endormies qui se rendaient au travail et me dirigeai d'un pas vif cette fois vers le hall. 

— Bonjour, vous devez être Amy Jashace. Madame McKenzie m'a chargée de vous ouvrir la grande patinoire.

Les McKenzie avait changé de personnel depuis la dernière fois, avant c'était toujours Charlie Frost qui m'accueillait le matin. Il avait vite fini par se lasser de m'accompagner à chaque fois et me faisait confiance en me prêtant les clés. Je suivis donc la nouvelle employée qui me déverrouilla la salle.

— Voilà mademoiselle, veillez juste à quitter la glace à huit heures, les séniors s'entraînent tôt aujourd'hui.

— C'est compris, merci beaucoup, répondis-je, pressée de monter à nouveau sur cette patinoire. 

Je m'assis sur un banc en bas des gradins pour retirer mes chaussures et les remplacer par mes guêtres et mes patins. Je défis ma veste et la posai sur le banc à côté de mon sac. Pour finir, je sortis mon enceinte et entrepris de la connecter à mon téléphone pour lancer la musique du dernier programme que j'avais créée quelques mois plus tôt. Je me dépêchai de rejoindre le milieu de la glace, je savais que je n'avais que quelques secondes avant que les premières notes ne commencent. Et alors j'oubliai tout.

Quand je patinais, j'étais dans un monde qui n'appartenait qu'à moi. Il n'y avait que la musique, la glace et moi. Toutes restrictions étaient oubliées et mon corps lâchait tout ce qu'il avait. Je passai alors mon heure à m'abandonner à cette sensation si agréable et familière qui me berçait depuis l'enfance, répétant ma chorégraphie encore et encore, inlassablement. J'étais concentrée sur mes mouvements, même si mon corps ne montrait aucun doute en exécutant ces mouvements désormais si familiers. Mon corps s'était lancé automatiquement sur la musique. Je fis une boucle piquée et me lançai un virage plus loin sur une des parties les plus délicates de mon programme,  un double salchow. Même aujourd'hui, beaucoup de patineurs de la catégorie séniors se cassaient les dents sur ce saut. 

Mais pas moi, songeais-je pourtant sans aucune vantardise. 

Je pris position en carre dedans arrière et balançai ma jambe libre de l'arrière en avant pour me propulser dans les airs. Je me réceptionnai avec souplesse en carre dehors arrière. Parfait, j'avais réussi. Je relâchai mon souffle alors que la musique prenait fin sur une pirouette cambrée. Je sentis quelques gouttes de sueur perler sur mon front alors que je relâchai ma concentration. Je fus sortie de ma bulle par des applaudissements. Immédiatement, je tournai la tête pour apercevoir une bande de quatre adultes qui se tenait là, devant les gradins, le regard fixé sur moi. Je commençai aussitôt à paniquer. Merde, je n'avais pas vu le temps passer ! 

— Félicitations jeune fille ! me congratula un brun aux cheveux mi-longs. Tu es nouvelle ici ? Je pense que je me serais souvenu d'une junior avec une aisance et une grâce comme la tienne. Il semblerait qu'Ewen Maxwell ait de la compétition !

Malgré ma gêne d'avoir été surprise, je ne pus m'empêcher de rougir sous le compliment.

— Merci. Et non, je ne suis pas une nouvelle junior. Je passe juste l'été ici et comme je connais les filles des propriétaires ils me laissent patiner un peu seule.

— Oh je vois, répondit le brun sans se départir de son franc sourire. Et bien je pense que tu devrais commencer la compétition petite, aucun doute que tu remporterais des prix.

— J'y penserai, répondis-je de manière évasive, ne voulant pas m'appesantir sur le sujet.

J'ôtai rapidement mes patins pour remettre mes Converses et enfilai de nouveau ma veste. Je jetai mon sac sur mon épaule.

— Bon entraînement à vous, dis-je en guise d'au revoir au groupe de séniors que quelques autres avaient rejoint. 

Je me retournai en entendant la Zamboni arriver pour nettoyer  les traces que j'avais laissées sur la glace quand un mouvement vers le fond des gradins près de la sortie attira mon attention. J'eus juste le temps de reconnaître l'homme en noir de la veille avant qu'il ne file à nouveau. Sans écouter la réponse des séniors, je me précipitai à mon tour vers la sortie. Mais encore une fois, quand j'arrivai au bout du couloir, l'homme avait disparu. Qui était-il ? Pourquoi était-il là? Mais la question qui me taraudait le plus était: depuis combien de temps était-il là ?

La tête pleine de questions après avoir été vue en train de patiner par cinq personnes ce matin, je me morigénai intérieurement et me promis de faire plus attention à l'avenir. En attendant, j'avais besoin de me changer les idées et la pensée de passer l'après-midi me réjouit d'autant plus. Si la rencontre d'hier m'avait montrée que notre amitié était toujours d'actualité, j'avais hâte de savoir ce que j'avais manqué pendant ces trois années. Mais pour l'instant je n'avais qu'une idée en tête, rentrer et prendre une longue douche ! 

Skate with you, Tome 1 [Sous contrat d'édition]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant