lettre à elena

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t'étais juste une fille comme ça
ni trop belle, ni trop moche
une fille qui marchait sous les nuages trop lourds
une fille qui écoutait jsais pas quelle musique dans son casque bleu
une anonyme grise au milieu des passants pressés

on se jtais des regards de loins
on était pas si proches que ça hein
pourtant on s'est cernés en quelques coups d'œils

t'aimais les mêmes trucs que tout le monde
tu t'habillais comme tout le monde dans des magasins sureclairés
t'allais voir les mêmes films, les même blocbusters nuls avec Dwayne Johnson
tu bouffais au mcdo le mercredi midi, tu dépensais 8€35 dans un wrap trop sec
tu postais des selfies avec les filles que t'admirais, histoire qu'on t'aime un peu
mais tu les détestait ces filles,
elles étaient grises
et pis leur manucures et leurs manières te foutaient la gerbe

t'avais le poids des nuages dans la gorge Elena

j'ai compris que ce que tu voulais, toi, en vrai, c'était d'enlever tes Converses rouges pour poser tes pieds nus sur le macadam nuageux,
et de courir avec un sourire aux lèvres et une fleur jaune dans les cheveux,
courir là où il n'y a plus les gens gris, et ces filles que tu pouvais plus supporter
tu voulais être libre
et ne croire qu'aux utopies

et pis y'avait moi
un gars qui se riais de toi
de ces filles grises, des gens gris, de tout le monde en fait
je riais de vos efforts pour briller
des immeubles, des rues, des nuages, des étendues grises
je riais pour oublier que je suis comme vous
gris

on était un peu les mêmes Elena
on aurait pu s'aimer, ptet
on aurait pu se tnir la main en sortant des cours
on aurait pu s'offrir des roses

mais ici, les fleurs noires sont axphysiées par les étendues grises

et pis t'étais pas assez belle, et j'étais pas assez beau
on était pas assez courageux pour s'aimer
on se regardait de loin
tes yeux étaient gris, et tes cheveux noirs
tu te fondait bien dans le décor en noir et blanc
pourtant je te trouvais belle, moi

et pis y'avais valentin
valentin, c'était celui que t'aimais
le mec blond aux yeux bleus
le mec qui te faisait glousser avec tes copines
celui qui t'avais bousculé dans le couloir, puis qui t'as aidé a ramasser tes livres

t'étais une fille grise Elena
une fille comme tout le monde
tu lisais des histoires de bad boy et tu croyais au prince charmant

Alors quand tes mains ont frolées celles de valentin
tu as cru être une héroine
mais c'est faux elena
tu es une passante
une fille grise qui se fonds dans les immeubles

tu veux pas l'admettre,
alors tu mettait des vêtement colorés
couleurs criardes
t'as teint tes cheveux noirs en rose
mais les couleurs, dans les étendues grises
sont fades et trop délavées

on étais deux ados ,
deux étoiles éphémères qu'arrivent plus à briller,
qui auraient pu s'aimer si ils avaient été un peu moins gris et plus courageux

je t'écris une lettre, des années après le collège,
alors qu'on s'est jamais revus
alors qu'on s'est quittés comme ça sans un au r'voir
d'vant le bâtiment morne qu'on avait côtoyé quatre ans
on s'est oubliés ptit à ptit,

aujourd'hui, on tous les deux 60 ans et j'ai vu des Converses rouges posées sur un pont
sur le bitume
face à la mer
j'ai su que c'était les tiennes

tu voulais briller
pour que les gens t'aiment
pour que les gens gris soient attirés
comme des papillons de nuit par la lumière
mais t'y arrivait pas
comme tout ces gens gris ces passants ces anonymes ces éphémères
tu étais terne Elena, mais y'avais du vert dans lfond de tes yeux gris

y'a tes converses sur le pont
et un bouquet de fleurs jaunes
t'as passé 60 ans à suffoquer, les nuages dans les poumons
t'as couru jusqu'a la mer Elena
pis t'as volé loin des étendues grises

courons loins des étendues grisesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant