Ami imaginaire

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Si je me souviens correctement, la première fois qu'il est apparu, c'était la première fois où je me suis senti harcelé, vers mes huit ans. À cet âge, je ne connaissais pas vraiment la signification de ce mot, je pensais plutôt que ces garçons assez populaires voulaient devenir mes amis, mais ne savaient pas trop comment s'y prendre. J'étais un peu naïf, mais aussi très seul. C'est bien plus tard que j'ai compris que les autres me considéraient comme quelqu'un de bizarre. Je ne savais pas trop ce qu'ils trouvaient de bizarre chez moi, j'étais un garçon assez normal, enfin je le pensais. De ce fait, ils ont commencé à me pousser dans la cour de récré, dans les couloirs, et même en classe. Tout ça sans oublier les paroles blessantes qui vont avec.

Pour en revenir à ma rencontre avec lui, c'était ce jour de trop où j'avais fini une fois de plus en pleure, enfermé dans la cabine de toilette pour personne à mobilité réduite, les garçons ne voulant pas que je rentre dans leurs toilettes et ne pouvant pas entrer dans celle des filles, c'était la seule toilette donc j'avais l'accès. Je mangeais les tartines, que ma mère m'avait soigneusement faite le matin même, sur la cuvette, refermée, des toilettes, car les autres enfants ne voulaient pas que je partage la salle de la cantine avec eux. 

Les profs ? Ils avaient tellement d'enfants à surveiller qu'ils ne voyaient même pas qu'en l'un d'eux manquait. Je ne voyais rien, mes yeux étaient fermés et trempés d'eau, mais j'avais entendu une voix. Une belle voix, douce et calme.

« Pourquoi tu ne te défends pas ? »

Ce serait mentir de dire que je n'avais pas été surpris par cette voix sortie de nulle part, mais j'étais aussi très perdu. Comment le garçon qui se tenait devant moi, assis sur l'évier, était entrer alors que j'avais bien fermé la porte ? J'avais parcouru la pièce de mes yeux, cherchant un autre moyen de rentrer, en vain. J'avais alors posé mes yeux sur cet être mystérieux.

Le premier sentiment qui m'avait pris était la peur, ce garçon, qui semblait avoir mon âge, me faisait peur. Ses cheveux, d'un noir profond, avaient les pointes mouillées et tombaient sur son front, ses yeux semblaient se moquer de moi et de mes réactions et ses lèvres pulpeuses entouraient une sucette de manière provocatrice. L'apparence de ce garçon faisait peur, plus que sa soudaine et mystérieuse présence.

Je lui avais demandé, d'une voix tremblante, comment il était rentré, mais je n'avais reçu aucune réponse, juste un regard de sa part. J'avais donc continuer sur mes questions, espérant qu'il réponde au moins à l'une d'elles. Je lui avais demandé qui il était, que faisait-il ici ou encore ce qu'il voulait. Il ne voulut répondre à aucune de mes questions, préférant me regarder impassiblement tout en léchant sa sucette. Déçu, je m'étais contenté de fermer ma bouche et échanger un long, très long, regard avec lui. Aucun de nous deux n'avait bougé pendant de longues secondes jusqu'à ce qu'il ouvre la bouche.

« Je suis là pour t'aider. »

Et c'est bien ce qu'il a fait. Il m'a aidé à combattre ma solitude en restant toujours auprès de moi, il m'a aidé à combattre mes bourreaux en me dictant la manière de faire. 

Il m'a aidé à aller mieux.

Je ne parlais jamais de lui et personne ne me parlait de lui ou ne semblait le remarquer. Quand je me faisais embêter, il était là, quelques mètres plus loin, me faisant signe de me battre et de répliquer. Quand j'étais seul dans les toilettes, il était là, m'obligeant à sortir et aller à la cantine. Quand j'allais mal, il posait sa main sur mes cheveux et me caressait doucement la tête. Il était tout ce dont j'avais besoin. 

Il était la partie de moi qui ne voulait pas sortir, celle méchante, malhonnête, imprévisible, manipulatrice et vulgaire.

Je faisais ce qu'il me disait quand je ne savais pas quoi faire, même si ce n'était pas la bonne manière. 

Bientôt, les autres ne me fuyaient plus parce que j'étais bizarre, mais parce que j'étais devenu méchant et violent. Je me défendais en me battant, en insultant ou en me vengeant de manière fourbe, car il me disait de le faire.

Comme je m'y attendais, j'ai rapidement fini dans le bureau du directeur de l'école, entourer de mes parents. Je me suis fait réprimander comme jamais auparavant et quand on m'a demandé pourquoi je faisais ça, je leur ai donné la seule réponse que j'avais.

« C'est lui qui m'a dit de le faire. »

Tout en disant ça, j'avais pointé le bout de la pièce où il se trouvait, appuyer sur le mur avec toujours une sucette en bouche. Il m'avait souri tout en m'envoyant un clin d'œil alors que mes parents et le directeur m'avaient regardé bizarrement. L'homme à la tête de l'école avait soufflé pour ensuite expliquer que ce n'était pas la première fois qu'il avait affaire à une situation comme celle-ci. Moi, je me contentais de regarder le beau garçon qui se tenait, debout, derrière le directeur et qui me souriait tendrement. 

Est-ce que j'étais en colère contre lui ? Pas le moins du monde, j'avais enfin la paix, je ne me sentais plus seul, je me sentais écouté, ... je me sentais aimé par quelqu'un. Il était ma bouée de sauvetage, celle qui me permettait de survivre dans ce monde.

À la fin de la réunion, on était rentré chez nous et ma mère m'avait expliqué que c'était bien que je me fusse fait un ami imaginaire, mais que je ne devais pas l'écouter quand il me disait de faire des mauvaises choses. Je ne la regardais pas, trop amusé par le noiraud, derrière ma mère, qui levait les yeux au ciel tout en me faisant signe de le suivre en haut.

J'avais abandonné ma mère pour courir après lui jusqu'à ma chambre. On était entré et on s'était couché sur mon lit. J'avais laissé un silence entre nous avant de lui poser une question dont je pensais déjà connaître la réponse.

« Es-tu imaginaire ? »

Il y eut un gros blanc entre nous pendant un long moment avant qu'il ne bouge pour venir me serrer dans ses bras, toujours coucher sur le lit, et m'offrir un bisou sur la joue avant de porter ses lèvres pulpeuses à mon oreille.

« Le penses-tu, Jisung ? »

Mes parents l'appelaient, ami imaginaire.

Mais moi, je ne retenais que le mot "ami".

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--Ahgase--

22/09/19

Hyunjin [Hyunsung]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant