Le Phare (A Fanart's Promise Challenge : LPM en vacances)

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[Aloooors, j'ai tenté une petite participation au très sympathique Challenge : A Fanart's Promise. Je suis en retard, vu que j'ai choisi le thème du 11 septembre et en plus c'est pas rigolo (faut que j'essaye d'écrire quelque chose de plus marrant la prochaine fois :D) et un peu HS

Ça se passe entre les tomes 2 et 3 et le titre complet du thème est : LPM en vacances ! + consigne bonus : ciel et étoiles, je l'avoue j'ai fait un peu cliché à la fin XD, bonne lecture !]


C'est une plage de sable fin. Un sable clair, presque blanc. Il est beau comme un service de porcelaine, délicat comme une collection de coquillages nacrés. J'y marche à pieds nus, je sens les grains qui roulent entre mes orteils. Le vent glacé fouette mon visage et y plaque mes cheveux indisciplinés. Mon écharpe se ressert contre mon cou pour le protéger, je plonge mes doigts gantés entre les fils de laine. J'y cherche un peu de réconfort. 

Cette plage est si longue, j'y avance depuis des minutes, des heures et des jours. Au bout, je finis par y apercevoir un phare. Majestueux, effrayant, il surplombe l'horizon. Sa taille démesurée attire le regard, le rend menaçant. Il fait froid, je vois le ciel gris, les nuages bas. J'y distingue des formes, des figures aux rides tombantes, des chimères à cornes et à plumes. Ça sent la tempête, l'électricité. Mon écharpe est tendue et mes pieds sont gelés. 

Au bas du phare, la pierre plonge dans l'eau. La roche n'est pas régulière, plutôt la réplique miniature de monts escarpés, de crêtes coupantes. Une forêt d'algues gluantes y a élu domicile. Je m'arrête et me demande qui d'autre qu'une mouette affamée voudrait y poser les pattes ? 


Et puis tout d'un coup, vous êtes là. 


Vous êtes assis à quelques mètres de moi. Vous ne m'avez pas vue. Votre long nez, votre long profil, votre long corps, vous de tout votre long. Assis, dans le sable, les bras repliés sur vos genoux, le regard planté vers l'orage qui arrive. 

Que distinguez-vous, Thorn, parmi la brume et les cumulonimbus ? Des griffes transperçant l'avenir ? Comptez-vous chaque molécule et chaque atome, collés les uns aux autres dans une matrice infinie ? Ou alors, sont-ce les aiguilles d'une montre, soufflant des circonvolutions de brouillard à chaque tic-tac. Tic-tac. Tic. Tac. 

Combien de mois depuis notre dernière rencontre, depuis l'ouverture de la porte de votre cellule et votre disparition ? Peu importe. Je ne fais pas de bruit, je m'assois à vos côtés. Je ne détourne pas les yeux jusqu'à ce que nos pupilles se croisent. Il n'y pas besoin de parler. Immobiles, là, comme deux pantins. Sauf que pour moi, le rôle de marionnette est terminé. Je touche votre main et le décor change. Adieu le lugubre littoral, tout semble soudain s'éveiller autour de moi ! Redressée sur mes jambes tout aussi vite, la vie s'enroule autour de ma robe. Je pivote et tourne sur moi-même. J'entends les cris joyeux de mes frères et sœurs au loin. Ils résonnent depuis une clairière nouvellement apparue, derrière des brins d'herbe folle. D'où viennent ces oiseaux multicolores qui papillonnent au-dessus de nos têtes ? Et cette brise agréable, cette douce chaleur sur ma peau, ce soleil aveuglant ? N'est-ce pas Tante Roseline là-bas, campée avec élégance sur une couverture de pique-nique ? Le panier qu'elle déballe est rempli de victuailles. Une petite main tente d'y chiper une friandise. Je suis le tracé du bras potelé. Victoire, balbutiante, retenue avec tendresse par Berenilde. C'est comme si rien ne s'était passé, comme si.. 

Je ne me souviens plus, la mémoire se joue de moi, je n'arrive plus à savoir pourquoi je me trouve là. Ne sommes-nous pas tout simplement venus ici en famille, passer quelques jours de vacances à l'ombre de l'immense phare ? Un point de rendez-vous, comme une promesse. Comme si tout était normal. Est-ce mon souhait ? Une existence normale

Vous êtes debout vous aussi et je me laisse aller dans vos bras. Vos mains osseuses se resserrent contre moi. Je ne le vois pas, mais je sens votre sourire. Un sourire discret, il ne faudrait pas que les autres le perçoive. Pas trop du moins. Je m'emmitoufle dans votre parfum, la séparation a été si difficile. Je glisse maladroitement, légèrement ; vous me soutenez d'un mouvement efficace et ferme. Mes paupières sont si lourdes d'avoir tant observé le vide par la fenêtre de ma chambre. Je les laisse couler, comme moi contre vous. 

Lorsqu'elles se soulèvent à nouveau, il fait nuit. J'étreins mon écharpe contre moi. Il n'y a plus personne. Pour me tenir compagnie reste le ciel étoilé. Allongée sur la plage, détendue jusqu'aux os, j'accorde le droit à mon cœur de divaguer, de décoller vers le firmament. Léger, il s'envole comme un ballon. Ces étoiles ne sont pas une illusion, elles, et où que vous soyez, Thorn, peu importe l'endroit, peu importe l'Arche, j'ai la conviction que vous les admirez aussi à cet instant. Ce n'est plus qu'une question de temps. Tic-tac, tic-tac. Chaque seconde nous rapproche de nos retrouvailles. Je le sais, où que vous vous cachiez, je vais vous retrouver. Je n'ai qu'à suivre la lumière du phare jusqu'à rattraper votre reflet dans le miroir.

Petits textes inspirés de La Passe-MiroirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant