EVIDENCE | TK

• 26. Précieux changement

Sept matins d'affilés, j'avais eu la chance de me réveiller à ses côtés. J'avais été chanceux, au point d'être la première personne qu'il regardait lorsqu'il ouvrait les yeux pour la première fois de la journée. Ce matin, rien. Le calme complet. Le néant sombre. Ce n'étaient pas ses douces et apaisantes caresses qui étaient venues me réveiller, mais plutôt la luminosité de l'extérieur. J'avais complètement oublié de fermer mes volets, cette nuit. Le ciel était gris, et les nuages menaçaient de laisser échapper leur pluie. Peut-être qu'un grand soleil et un ciel bleu m'auraient donné l'envie d'entamer joyeusement cette journée. Peut-être que j'aurais pu vouloir sortir, dépenser, aller de l'avant. Au lieu de ça, j'allais passer cette foutue journée à broyer du noir et à me tourner les pouces, encore une fois. Je pensais à NamJoon et SeokJin, qui allaient enfin se retrouver tous les deux pour profiter pleinement de leurs vacances. Et puis, je pensais à JiMin et YoonGi, qui vivaient leur amour comme s'ils se connaissaient depuis une dizaine d'années. Alors qu'en réalité, le coup de foudre les avait frappé en à peine une semaine.
Mes amis étaient heureux. Ils souriaient à la vie et la croquaient à pleines dents, parce qu'ils avaient conscience que nous n'avions qu'une seule vie, et que cette dernière ne tenait qu'à un seul fil.

Ça me gonflait. Moi aussi, il fallait que je me bouge.

Je me levai rapidement de mon lit, non sans un petit vertige dû à ma précipitation, mais c'était pas important. Je me postai devant mon bureau, observant le dessous de celui-ci. Ça allait être difficile, mais il fallait que je le fasse. C'était maintenant, ou jamais.
Sans hésiter plus longtemps, je me saisis du gros carton se trouvant sous mon bureau. Je le pris de mes deux mains, et je posai celui-ci sur mon lit. Je vins me rasseoir en face du carton. Je soufflai un bon coup et l'ouvrit rapidement. Je ne voulais pas avoir de regrets.

Mes yeux se posèrent sur des tas de feuilles et de crayons de plusieurs couleurs, disposés dans la grosse boîte. Des croquis, des schémas plus avancés, des dessins terminés à la perfection... Ces travaux appartenaient à mon père, qui avait été architecte et qui avait dû tout arrêter lorsque sa maladie fût découverte. Il aimait son métier. Tellement qu'en étant plus jeune, il parvenait à me transmettre sa passion. Il était passionné, et il me passionnait...

Six années en arrière

« Utilise ton doigt pour travailler le dégradé de noir. Tu verras, ça donnera beaucoup plus de réalisme à ton dessin. »

Assis face au bureau de son père, accompagné de ce dernier comme toujours, les deux hommes dessinaient. L'un concevait le plan d'une maison, et le plus jeune finalisait le portrait qu'il avait fait de sa mère. JungKook n'avait que treize ans, et pourtant, son père trouvait son talent totalement dingue.

Celui-ci observait son petit garçon mettre en œuvre la technique qu'il venait de lui apprendre. Il était extrêmement concentré dans ce qu'il faisait, et rien ne pouvait déranger dans sa tâche. JungKook voulait la perfection dans ses dessins, dans ses techniques. Et son père le savait, il avait un don.
JungKook leva fièrement son portrait et le plaça assez loin de ses yeux pour pouvoir l'observer. Il ne pouvait nier le fait qu'il était fier de lui. Ses lèvres s'étirèrent en un grand sourire.

« Tu as assuré, je parie que ta mère va devenir folle de joie en voyant ça ! »

JungKook posa sa tête sur l'épaule de son père.

« Papa, je crois que je veux dessiner toute ma vie...

- Tu as absolument tout pour y parvenir, mon cœur. »