IL ETAIT UNE FOIS

THOMAS ET CATLEEN

Hawaï. L'île de Maui. Thomas était là pour faire des photos du Parc National de Haléakala et des plages sur la route de Hana. Le boulot fini, il décida de rester plus longtemps, les lieux l'avaient ensorcelé.

Il occupait un petit bungalow sur la plage, isolé du reste du complexe hôtelier. Les chambres trop climatisées et les bords de piscine envahis de monde, non merci. Il avait plutôt l'habitude de dormir à la belle étoile dans des lieux, Dieu soit loué, épargnés par la civilisation moderne. Le bungalow lui sembla un bon compromis. Un coin pour dormir, se laver, préparer les repas, il ne demandait pas plus. Les deux autres bungalows voisins étaient inoccupés pour le moment. Il était seul sur ce bout de plage et cela lui convenait très bien.

En deux semaines, il prit certaines habitudes. Il se levait aux aurores pour aller à la pêche puis au marché. Déformation professionnelle oblige, il prit d'autres photos immortalisant la vie quotidienne des autochtones avec lesquels il lia connaissance. Il pouvait satisfaire son appétit pour la lecture en dévorant Anna Karenine, installé dans une chaise longue. Le soir, il se promenait sur la plage, se baignait dans l'océan et ne ratait jamais le coucher de soleil. Cette sédentarité provisoire lui plut assez et le cadre enchanteur y contribuait.

Un soir, il décida de reprendre contact avec la civilisation en allant prendre un verre au bar de l'hôtel. Pour cela, il dut traverser le restaurant. A peine entré dans la salle, sa chemise blanche se retrouva maculée de jus de tomate et, une jeune femme était étalée à ses pieds. Comment s'y était-elle prise pour tomber? Mystère. Aucun obstacle sur le sol parfaitement plat. Il l'aida à se relever.

-Ca va?

Deux magnifiques yeux bleus le regardèrent avec embarras.

-Je suis vraiment, vraiment désolée. Je ne sais pas comment j'ai fait pour glisser.

Elle épongea le devant de la chemise de Thomas avec le bas de sa robe, ce qui le fit sourire.

-Ce n'est rien, laissez cela. Ce n'est qu'une chemise.

-Pourquoi ça n'arrive qu'à moi des trucs pareils, marmonna-t-elle.

Elle ramassa son verre qu'elle posa sur la première table venue et sortit de la salle en boîtant légèrement, le visage rouge de honte. Thomas souriait encore quand il atteignit son bungalow. Rencontre intéressante.

Le lendemain, il déposa sa chemise au pressing de l'hôtel et, quand il  la récupéra, l'employée l'informa que la note était déjà réglée. Il se douta bien par qui et voulut connaître son identité.

-Qui a réglé la note?

-Mlle Catleen Williams, une cliente de l'hôtel.

Ainsi, il ne serait pas difficile de la retrouver. Direction la réception.

-Bonjour, je voudrais laisser un message pour Catleen Williams.

-Je suis désolée Mr Miller mais, Melle Williams a quitté l'hôtel cet après-midi.

En fin de compte, ce ne serait pas aussi facile que prévu. Inutile de demander à la réceptionniste les coordonnées de la jeune femme, elle ne lui divulguerait jamais ce genre d'infos.

"Laisse tomber mon vieux, dans quelques semaines tu seras au fin fond de la Chine."

En revenant de sa promenade nocturne, il remarqua que le bungalow voisin du sien était allumé. Il s'approcha. Un gros sac de voyage trônait sur la terrasse devant la porte mais, nulle trace de son propriétaire. Il continua son chemin l'esprit focalisé sur une paire d'yeux bleus.

Le jour suivant, Thomas se réveilla tard. Il avait très mal dormi et son lit ressemblait à un chantier. Il se préparait un solide petit déjeuner  quand il entendit un gros bruit venant de l'extérieur et une voix féminine crier. Son voisin était une voisine, hystérique de surcroît. Adieu le calme et la tranquillité.