Sans H

Chapitre 7

Une neige fine tombait tranquillement sur les bâtiments de l'école. Depuis l'une des fenêtres de sa classe, Lyndsey voyait les flocons se balancer au gré du vent sans vraiment savoir pourquoi elle les contemplait. Autrefois, elle se souvenait qu'elle faisait des bonhommes de neige avec Val, Sara, Cindy et Eliot. Ils en ressortaient tous trempé, le sourire s'étirant jusqu'aux joues.

C'était une belle époque. Tout était différend. Elle se surprit même à vouloir retourner dans ce passé si serein, comparé à son présent tant tourmenté. Néanmoins, elle craignait plus ce que lui réservait l'avenir. L'approche imminente de « l'anniversaire » la stressait immanquablement.

Dérangée dans ses réflexions par les acclamations d'un petit groupe posté à côté d'elle, Lyndsey détourna le regard du paysage et lissa machinalement sa jupe bleue sombre. Elle entreprit de faire de même avec sa cravate striée de bleu et de rouge, sans oublier d'arranger son pull plus tout à fait droit. Pourquoi se sentait-elle si nerveuse ? Avait-elle une peur ridicule qu'on est épié ses pensées ?

Quelle idiote elle pouvait être, parfois. Son imagination n'avait vraiment aucune limite...

Revenant au chahut régnant dans la salle, elle pencha sa tête sur le côté pour découvrir par-dessus l'épaule d'un élève, le sujet de toutes les attentions. Val était assis, dos à elle, au centre des moqueries. Ses mains étaient crispées et sa tête était baissée vers sa table. Depuis qu'elle l'avait taquiné pendant la bataille de carte devant toute sa classe, le pauvre garçon se faisait charrier plus souvent qu'il ne pouvait en supporter.

Décidée à ne pas laisser ses injustes taquineries le démoraliser, elle s'assit sur la table de son ami et foudroya de ses yeux glacés chacun des visages moqueurs devant elle. Le calme revint bien vite et ils se retrouvèrent tous les deux mis à l'écart. Cela ne la dérangeait absolument pas. Elle n'avait pas besoin de ses singes pour mener sa vie quasi parfaite !

Comme Val ne levai toujours pas la tête dans sa direction, elle balança tranquillement ses jambes dans le vide en silence. Il avait eu l'air complétement désemparé hier. Et c'était grandement de sa faute, en plus. Lui remémorer la claque monumentale qu'il s'était prise par Sara était un comportement qui ne lui ressemblait pas.

S'excuser était devenu primordial.

« Pardon pour hier. »

Aucune réponse. Elle se sentait de plus en plus coupable et ça, elle n'arrivait jamais à le supporter bien longtemps. D'un mouvement brusque, elle fixa ses cheveux ondulés qui cachait ses yeux, et reprit la parole :

« Je n'avais pas le droit de te dire ça, surtout devant Cindy. Pardonne-moi, j'ai été la pire des amies. Je ne suis bonne qu'à faire des erreurs... » termina-t-elle en baissant elle aussi les yeux sur cette table.

Du bout de l'ongle, Val enlevait des petits copeaux de bois. Il ne semblait pas se soucier de ce qu'elle pouvait bien raconter. Ne voulant pas le perdre, elle commença de nouveau à prendre la parole lorsqu'il se leva subitement pour partir de la salle de classe. Inquiète, elle le suivit à la trace tandis qu'il contournait les étudiants campant dans les couloirs en attendant la reprise des cours. Avait-elle vraiment fait quelque chose d'irrémédiable ?

Ne se sentant pas à même de supporter une nouvelle amitié déchirée, elle courut après lui et le rattrapa au moment où il franchissait la porte des toilettes pour mecs. Les miroirs plantés au-dessus des lavabos lui reflétèrent une image larmoyante d'un Val complétement abattu. Le laissant s'affaler sur le mur carrelé de blanc, elle bloqua la porte des toilettes avec son pied pour empêcher les autres de rentrer, et regarda son ami se laisser aller aux sanglots.

Tout ça, c'était à cause d'elle ! Lyndsey se sentait plus mal que jamais.

« Tu as le droit de me dire toutes les insultes que tu veux. Allez, vas-y ! Dis quelque chose ! »