Cela faisait quasiment une demie lune qu'ils étaient revenus à Akhaël, et le froid mordant de l'hiver approchant était chaque jour un peu plus présent. Ezran se réjouissait d'être arrivé à la cité avant que les conditions n'empirent : il n'était pas sûr de réussir à nouveau la traversée de l'Echine en l'état actuel des montagnes. Le froid aurait été d'autant plus insoutenable avec l'altitude, et nul doute qu'ils auraient eu toutes les peines du monde à se nourrir. Il faudrait être fou pour se lancer à l'assaut des sommets en cette période.
Ezran avait repris son entraînement avec Jahrim presque immédiatement après son retour, le vieil homme ne lui laissant que peu de repos. Cette journée n'échappait pas à la règle. Le jeune homme s'était réveillé dès les premières lueurs du jour, avait mangé précipitamment dans la salle commune de l'auberge dans laquelle il résidait puis prit la direction de la porte sud de la cité. Il marchait vite, chacun de ses pas résonnaient sur les pavés puis se répercutaient sur les bâtiments en s'élevant jusqu'aux plus hauts clochers. Il arriva vite et trouva Jahrim, debout à côté d'un magnifique destrier, la tête haute et le regard perdu dans le lointain, les bras croisés sur sa poitrine. Son maître ne réagis qu'à peine à son arrivée. Ezran attendit dans un silence presque religieux, comme il convenait de faire. Enfin, le vieil homme daigna bouger. Il s'installa sur sa monture en regardant le jeune homme dans les yeux :
- Aujourd'hui je suis las de t'enseigner des arts nécessitant concentration et frustration ; de plus j'estime que tu t'es bien remis de ton périple avec Lymna. Du moins, je l'espère pour toi, car tu n'as pas le choix : tu vas me suivre et tenter de rester à mon niveau. Je veux voir ce qu'il te reste de nos courses estivales !
Il s'élança sans plus d'explications, mais Ezran réagit tout de suite et se mit à courir à sa suite. Il était heureux d'enfin faire une pause d'apprentissage théorique, et il était tout aussi curieux que son maître quant à ses performances. Courir, même sur une longue distance ou chargé n'était pas un problème ; mais les températures actuelles devaient flirter avec le négatif, et sa gorge ne tarda pas à lui brûler. Bientôt elle fut si sèche que le garçon émettait un petit râle à chaque inspiration, qui se transformait en un petit nuage devant son visage. Le sol aussi semblait déterminé à le faire céder au plus vite, la terre était gelée et dure comme de la pierre. Chaque impact de pas se répercutait jusqu'au crâne du jeune homme, faisant claquer ses dents. Il savait cependant qu'abandonner avant d'avoir parcouru une demie-lieue ne lui était pas permis. Il continua donc, ignorant le froid et la douleur, ne se concentrant que sur le cheval qui trottait à quelques pas devant lui. Il courut ainsi jusqu'à ne plus rien ressentir d'autre que cette impression qu'une main aux ongles acérés lui entaillait la gorge de l'intérieur.
Assez vite le temps changea, les nuages devinrent noirs, et une pluie intense se mit à battre le sol. Les trombes d'eau glaciales lui frappaient le visage et le gelait jusqu'à la moelle, mais lui permirent d'étancher sa soif et de clamer un peu les brûlures que lui avait causé le froid. Malgré tous ses efforts, au bout de quelque dizaines de minutes, il s'effondra, incapable de continuer plus longtemps dans ces conditions. Sa vision se brouilla, il entendit Jahrim (ça ne pouvait être que lui) mettre pied à terre et s'approcher ; il senti qu'on le soulevait, puis il perdit connaissance.
Ezran reprit ses esprits peu de temps après, ballotté dans doutes les directions comme un vulgaire fétu de paille. Il était allongé sur la monture de son maître, en travers, et ce dernier marchait à côté. Il ne semblait pas inquiet de l'état du garçon, aussi ne remarqua-t-il pas tout de suite qu'il était réveillé.
- Combien de temps ai-je tenu ?
- Pas assez longtemps. Ce n'était pas mauvais compte tenu de la situation, mais tes performances restent en dessous de mes attentes.
Il n'y avait pas une once de volonté de blesser dans sa voix, mais ses paroles atteignirent son élève avec plus de précision qu'un carreau d'arbalète.
- J'ai pourtant été jusqu'à la perte de conscience...
- Alors c'est que tu n'es simplement pas encore assez entraîné. Je veillerai à l'amélioration de ta résistance à l'effort comme aux éléments. En attendant, repose toi dès que nous serons rentré à Akhaël ; et descends de ce fier destrier, mon corps est fatigué.
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FantasíaSalut ! Je met en ligne ce bout de récit (en français) afin de recevoir des avis/ critiques. On y suit deux jeunes gens dans un univers à tendance fantasy. Déjà merci beaucoup si vous le lisez, et c'est avec plaisir que je prendrai en compte vos rem...