Chevalier dragon

Chapitre 31 : Progrès

Le jeune homme n'était pas sûr de parvenir à faire taire sa peine mais il essaya de suivre les conseils de son maître. Il décida de diminuer l'intensité avec laquelle ils'entraînait. Le soir-même, il consacra plus de temps à Hydronoé. Ils bavardèrent longuement après le dîner et le dragon d'eau lui fit une démonstration de l'avancée de sa magie. Il fit s'élever l'eau d'un verre et la mania avec fluidité dans la chambre. C'était comme un long serpent aqueux qui obéissait au moindre de ces gestes. Il s'amusa à lui donner la forme d'un dragon et Aymeric applaudit la performance. Son jumeau n'était même pas essoufflé par l'effort, signe qu'il progressait à grands pas dans le domaine de la magie.

Le lendemain, il se promena en forêt avec Lysange. Ils connaissaient les bois mieux que le château lui-même et passaient beaucoup de temps à discuter sous les frondaisons.

- Tu as meilleure mine, lui dit la jeune femme.

- J'ai pris le temps de me reposer et de...Faire le point.

- Tu es admirable à mes yeux, déclara t-elle en escaladant un tronc d'arbre couché au travers du chemin.

- En quoi ? ricana t-il. Je n'ai fait que pleurer et vous causer de l'inquiétude.

- C'est naturel, tu faisais ton deuil. Souviens toi de notre première rencontre, je pleurais pour moins que ça !

- Ce n'est pas comparable. Tu étais petite, loin de chez toi dans un lieu inconnu et tu venais de laisser entrer Ourania dans ta vie. C'est beaucoup de changements d'un coup pour une enfant.

- Pour être honnête, ce n'étaient pas les seules raisons pour lesquelles je me lamentais sur mon sort. Ma famille a joué un rôle dans cette histoire.

Aymeric s'arrêta au milieu du sentier qu'ils arpentaient. Pour la première fois depuis qu'il la connaissait,  Lysange abordait le sujet de ses origines. Elle restait toujours très discrète là-dessus, impossible de lui arracher un mot. L'adolescent ne répondit rien et la laissa continuer, de peur qu'elle se rétracte.

- Chez nous, les sylphes, les dragons ne sont pas bien vu. On pourrait même dire qu'ils sont détestés. Mon peuple pense qu'il est issu du grand arbre qui est le centre du monde et qui a diffusé la vie sur le territoire. Pour nous les dragons démiurges ou primordiaux ne sont qu'une fausse religion inventée de toutes pièces par les autres hommes qui ont oublié d'où ils venaient. Les miens haïssent donc tout ce qui se rapporte aux dragons de près ou de loin et c'est pour cette raison qu'ils vivent loin des autres nations. Je fais partie d'une famille noble particulièrement prestigieuse. Mon père avait le projet de faire la paix avec les royaumes environnants en concluant des pactes de non-agressions. Il désirait ouvrir les nôtres au monde, leur montrer que ce n'est pas parce que d'autres pensaient différemment qu'il fallait les mépriser. J'aimais son enthousiasme et je partageais ses idées même si j'étais toute petite. Un jour, il m'a emmené en voyage à Ondre. Il devait s'entretenir avec le roi pour établir des échanges commerciaux. Et là...Je n'aurais pas dû établir de lien de sang avec Ourania :c'était un pur accident. Mais le mal était fait si je peux le formuler ainsi. Nous sommes rentrés avec Ourania en essayant de dissimuler son existence mais un membre de ma famille l'a appris et il a tenté de...De me supprimer.

Elle prit une grande inspiration et cligna des paupières pour chasser les larmes qui menaçaient de jaillir avant de poursuivre :

- Il m'a poussé dans le vide. Ourania a senti le danger et c'est à ce moment-là qu'elle s'est métamorphosée pour me protéger et me ramener à Ondre.

- Et ta famille ? Elle pense que tu es...

Il ne termina pas sa phrase mais son amie comprit et secoua la tête.