cinq ⇢ charlene

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« L'adieu, je veux bien qu'il soit triste ou pas réussi, mais au moins je veux savoir que je m'en vais. Sinon c'est encore pire ».

Salinger


Si mes parents ont remarqué les sentiments divers qui m'habitaient les jours qui suivirent, ils n'ont fait aucune remarque sur le sujet. Pour le moment, seule Claire était au courant que j'étais allée revoir Axel dans l'Hologramme. Elle m'avait posé autant de questions qu'elle pouvait, mais semblait plutôt déçue par mes réponses. S'attendait-elle vraiment à ce que je vive une réelle romance avec un type mort à travers une machine ? À ce que je savais, on n'avait pas encore inventé le Meetic post mortem pour mettre en relation les morts et les vivants...

Il est vrai qu'Axel était un jeune homme foncièrement charmant et séduisant. Mais réduire son image à son aspect extérieur revient à insulter sa mémoire. J'avais compris après nos nombreuses discussions qu'il s'intéressait à énormément de choses que ce soit autant dans le domaine des sciences que dans celui des lettres. Il avait été promis à un avenir brillant et prometteur. « Je ne suis pas un génie », m'avait-il confié. « J'ai vraiment besoin de bosser pour obtenir de bonnes notes. J'ai eu de grandes facilités jusqu'au début du lycée et après, terminé ! »

Il connaissait peut-être plus de choses sur ma vie qu'aucune autre personne de mon entourage. Parler avec quelqu'un qui était mort et qui avait donc moins de chance de pouvoir révéler vos secrets est bien plus facile que je le pensais. Son grand sens de l'humour me plaisait beaucoup. Il arrivait à détendre n'importe quelle situation. J'ai plus souvent tendance à mettre les gens mal à l'aise parce que j'ai un air grave et sérieux, mais Axel n'a jamais semblé perturbé par mon fort caractère. Au contraire, ça semblait beaucoup l'amuser de me mettre mal à l'aise. Quelques semaines plus tôt, je m'en serais sûrement vexée, mais après avoir passé une journée entière à le suivre partout dans un parc d'attractions, je me suis rendu compte qu'il n'était pas aussi insupportable qu'il en avait l'air. En fait, je me suis surprise à l'apprécier.

Tous ces évènements avaient remis en cause tout ce que j'avais pensé d'un jeune homme pendant une bonne partie de ma vie. Comme quoi... Ne jamais juger quelqu'un que l'on ne connaît pas ! À l'avenir, les sermons de mon père n'allaient pas rentrer par une oreille puis sortir par l'autre.

« Juliana ? m'a interrompue une voix rauque. »

J'ai levé les yeux de mon bouquin, un grand sourire étirant mes lèvres, ravie de me trouver face à face avec mon meilleur ami. Je reconnaîtrais le timbre particulier de sa voix de fumeur endurci entre mille autres.

« Simon ! l'ai-je accueillie tandis qu'il se penchait pour m'offrir un baiser sur la joue. »

Il est ensuite venu s'asseoir en face de moi, a zieuté mon verre de jus d'orange puis est venu s'en emparer pour en boire une gorgée. Il a les mêmes habitudes que Charlie. On ne change pas une équipe qui gagne...

« Délicieux, a-t-il susurré. Un vrai jus d'orange et pas ces merdes que nous vendent les grandes surfaces.

— N'est-ce pas ? ai-je approuvé. »

Il m'a offert un sourire amusé. Simon a les dents du bonheur. Avec ses longs cheveux noirs, ses yeux en amandes et son sempiternel blouson en cuir, on lui donne facilement une réputation de bad boy. Rien n'est plus faux. C'est un type doux, gentil et extrêmement peureux. Il crie comme une petite fille quand il a peur. Mais je l'adore. Tout comme Charlie. À eux deux, ils forment un bataillon d'anarchistes et de révolutionnaires peu discret qui se voit bien changer le monde.

Deus In Machina | TerminéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant