Izac écoute du Chopin depuis une heure et demi... J'ai perdu l'habitude d'avoir un compagnon de chambre. Lui et moi sommes très différents. Il a la peau basanée, des cheveux noir de jais ondulés mi-longs et des yeux sombres mais étrangement lumineux. L'infirmière m'a dit qu'il ne resterait que 2 semaines, je devrais tenir le coup.
Je suis persuadé qu'Izac est le genre de gars qui débarque dans la vie des gens sans crier gare, comme un boulet de canon ou un rayon de soleil en plein milieu de l'hiver. Il ouvre les portes en grand, tire les rideaux et éclaircit les dimanches de pluie. Il doit être le genre de type qui ressemble comme deux gouttes d'eau à un héros de roman.
En ce moment, il griffonne, concentré, sur un carnet deplumé à force d'en arracher les pages.
Bref.

Qui que tu sois, je sais que tu as peur. Peu importe de quoi : foule, solitude, hauteur ou petits espaces, araignées ou chèvres. Tu as forcément peur d'un truc. Quand j'étais gosse c'était le silence, la solitude et la nuit. Une peur panique du silence que j'ai appris à masquer en mettant de la musique très forte quand il s'installait et que j'étais seul. En arrivant ici, on m'a fait comprendre que le silence est roi. J'ai dû affronter deux de mes peurs : le silence et la nuit. La nuit angoissante, remplie de petits "bip" répétitif de et entêtants.

La poésie me manque dans ce monde de sciences.

Un jour, j'ai aimé. C'est con de dire ça à mon âge, comme si ça allait être la seule et unique fois. C'était un éclair, un coup de cœur. Et un crève-cœur quand l'histoire a vécu sa fin, son déclin. Tu sais, j'ai autant perdu que gagné dans cette aventure. J'ai aimé au point d'en perdre mes mots, à en avoir des vertiges. J'ai gagné un cœur, enfin, je crois. J'ai goûté mes plus belles nuits, mes plus belles inspirations. Je me suis senti viba'y, heureux, ivre, vieux et fatigué. Je me suis senti invincible sous l'orage et en sucre face à quelques gouttes de pluie. J'ai vécu l'euphorie d'une vie au jour le jour à la Bonnie et Clyde.
Mais vois-tu, les histoires d'amour finissent mal quand les frissons et les soubresauts du cœur plient bagage pour l'hiver. Je n'ai pu lutter à aucun moment, possédé par ses yeux bleus. Une rose pleine d'épines qui a rendu mes doigts rouge sang au fil du jeu. Ses canines dans mon cou, si elle me quitte, c'est la fin. C'est la fin. C'était si facile de me casser la gueule dans ses bras. C'est si dur de s'en remettre.
Je n'ai, aujourd'hui, plus de nouvelles. Il ne me reste que des miettes de souvenirs, des brides de sensations et des images en pagaille derrière mes paupières. Et son rire au creux des nuages de ma mémoire.
Le temps guérit les blessures de l'âme, quelle belle connerie, elle a garder la mienne dans la poche de son jean troué.



Elio 🍃

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⏰ Dernière mise à jour : Jan 03, 2020 ⏰

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