𝐇𝐔𝐍𝐆𝐄𝐑 𝐆𝐀𝐌𝐄𝐒 ₁₈₅

𝟎𝟏 - 𝐋𝐚 𝐌𝐨𝐢𝐬𝐬𝐨𝐧

« 𝐄𝐭 celui-là, tu ne trouves pas qu'il ressemble à une tortue ? »

Syu Hwa, allongée dans l'herbe tendre, le regard fixé sur le ciel au dessus de sa tête. Sur son ventre, roulé en boule presque assoupi, se trouvait Bao. Petite boule de poils envers laquelle la petite Ye s'est prise d'affection depuis son enfance. Tripotant une brindille d'herbe sous le museau de l'animal, la jeune fille restait pensive. Elle se demanda plusieurs fois si la date affichée pour aujourd'hui sur le calendrier était correcte, ou s'il s'agissait d'une mauvaise blague faite à son égard.

Elle détourna ses yeux charbonneux sur l'animal, agrippé à la jupe mauve poudré qui lui resserrait d'ailleurs la taille, et, au passage, lui procurait une désagréable sensation au niveau de l'abdomen. Bao, commençant à manger le gazon qu'elle lui a tendu – par méprise – elle lui retira de la bouche immédiatement, lâchant un soupir d'agacement.

« Ah, sérieusement, ça ne se mange pas ça ! »

Elle jeta la tige découpée en morceaux par les dents de la bestiole, et se redressa. Sa maison, n'est située qu'à quelques mètres, derrière elle. Dernière maison avant de quitter la ville, juste avant un immense carrefour qui menait tout droit à... En fait, elle n'en savait rien. Après ce carrefour, se trouvait un grillage. Un grillage qu'elle n'a jamais osé franchir. Peut-être à une époque, quand une amitié intrépide lui aurait donné envie de risquer sa vie. Mais celle qu'elle menait lui suffisait. Ils vivaient bien. Syu Hwa s'apprêta à aller plus loin, cherchant le moyen de se cacher avant qu'il soit l'heure. L'heure de jouer au loto, bien sûr. Mais désormais pour elle, le même numéro est répertorié six fois.

« Chou.

La voix de son père la sort soudainement de ses pensées. Elle relève les yeux vers lui, adressant un mince sourire. Syu Hwa sait pourquoi il vient. Il devrait travailler mais il est là, il la regarde d'un air qu'elle ne saurait vraiment définir.

— Il est déjà l'heure ?, questionna la noiraude, connaissant déjà la réponse.

Son paternel, tout de blanc vêtu, passa sa grande paume épaisse dans ses cheveux, et hocha simplement la tête.

— Maman est déjà là-bas. Je dois partir moi aussi. On se rejoint sur la place ?

La jeune Ye acquiesça en retour puis se releva, en remettant correctement sa tenue, en retirant les bruns d'herbes immiçés entre les plis. Elle remis Bao dans sa cage, dan un coin du jardin. Elle était enfin debout, alors, le Pacificateur, déposa ses lèvres sur le front de sa fille,

— Puisse le sort t'être favorable. »

𝐋𝐞 miroir reflétait l'image, d'un garçon aux cheveux noirs soigneusement coiffés, à la chemise bleue-ciel qui lui seyait parfaitement, un pantalon marron de qualité, et des chaussures inaccessibles pour la plupart des gens de part leur prix élevé.

« Tu es tellement beau mon Renjun ! »

La mère du garçon s'était interposée devant lui, interrompant l'observation de sa tenue. Elle glissa ses doigts sur le col de sa chemise afin de le réajuster correctement.

Comme chaque année, le jour de la moisson était un stress énorme pour ses parents, même davantage que pour lui. Ils redoutaient atrocement tous les deux de perdre leur fils unique.

Renjun posa ses mains sur celles de sa mère qui tremblaient beaucoup trop à son goût.

« Maman... C'est ma dernière fois, l'année prochaine j'aurais dix-neuf ans et tu n'auras plus à avoir peur. Et d'ailleurs, mon nom n'est écrit qu'une seule fois, alors que je sais que certains l'ont plus d'une cinquantaine de fois. Il n'y a vraiment pas de quoi s'inquiéter. »