Anesthetized Heart

20. C'est pas ma mère ça.

La sœur de Kyle est définitivement géniale, Hilona nous a préparé un petit déjeuner très copieux et extrêmement délicieux. Sentir l'odeur du bacon au réveil est désormais la chose que je préfère. Je suis anxieuse à l'idée de rencontrer les parents de Kyle et de voir sa sœur dans un autre cadre que la fac. Après tout, il ne m'a quasiment rien confié concernant sa famille, il est très mystérieux de ce côté là. C'est clair que c'est un point que l'on a en commun mais j'ai la forte impression que de parler de sa famille est un sujet délicat.
— Quinn, je suis fan de ta robe, dit Hilona en hachant ses mots
Kyle sourit malicieusement.
— Ouais, moi aussi.
Cette robe d'un rouge flamboyant, c'est celle que je portais le soir ou je l'ai rencontré. Elle est parfaite pour une occasion. Nous sommes passés la chercher rapidement à l'appartement ce matin tandis que les filles dormaient, heureusement que j'avais mes clés car j'en aurais vraiment voulu à Kyle de m'avoir prévenu au dernier moment, je n'aurais pas été apprêtée comme il le fallait. Je mordille ma lèvre inférieure car seul lui et moi comprenons mais je ne me sens pas super à l'aise vis-à-vis de sa sœur car je sais à quoi il fait allusion.
Mes joues ont sans doute rougies mais je tente de ne rien laisser paraître.
Hilona sourit en secouant la tête.
Soudainement, le téléphone de Kyle vibre et posé sur la table, je ne peux que voir l'écran.

Je fronce les sourcils lorsque je vois qu'il vient de recevoir un message d'un certain « Jérémy ».
C'est vrai, il n'y a pas qu'un seul Jérémy sur cette Terre mais il faut avouer que c'est étrange et je doute sincèrement que ce soit une coïncidence. Zac est l'ami d'enfance de mon frère et c'est le cousin de Max. Il connaît très bien Kyle et, il a très bien pu emmener mon frère à une soirée étudiante. Etant donner que cela fait plusieurs mois que je n'ai pas vu et écrit à Jérémy, j'ai du mal à savoir qui sont ses fréquentations. Jérémy est comme Zac, il aime prendre du bon temps et s'amuser, mais parfois, il est bien trop insouciant. En ce moment, il est tellement fragile et vulnérable. Je le sais car je passe de temps en temps quelques coups de téléphone à ma mère pour savoir comment ça se passe et comment ils vont. Ils ne sont qu'à quelques minutes de la fac et pourtant je n'arrive pas à retourner chez moi. J'ai enfin compris que je devais avancer, que je devais faire des efforts car je ne suis pas seule, alors, je vais devoir y retourner. Je lève alors les yeux vers Kyle alors qu'il semble mal à l'aise, j'arrive à le remarquer lorsqu'il se gratte la nuque. Il s'excuse en disant qu'il doit prendre cette appel et, curieuse comme je suis, je ne peux pas lâcher l'affaire.

Je m'excuse gentiment auprès d'Hilona en lui disant que je vais aux toilettes qui se trouvent juste en face de la chambre d'amis où je peux apercevoir Kyle grâce à la porte qui est entrouverte. Je ferme celle des toilettes et tend mon oreille.
— Ecoute, t'es encore un gamin, je crois que la dose est suffisante.
La dose ? Mais de quoi il parle ?
— Je t'en fourni à moitié prix, et moi je suis bientôt à sec. C'est pas cette merde qui règlera ton problème, crois moi, tu es encore mineur.
— Jérémy, je te donne un conseil : Arrête maintenant. Je te dis que ça règlera pas tes soucis. Fais comme moi, trouve quelque chose ou quelqu'un qui t'aidera à t'en sortir, quelque chose à quoi te raccrocher.
Il raccroche quelques secondes après mais, je n'avais pas espérée tomber directement sur lui en sortant des toilettes. Face à lui, je reste silencieuse, il me regarde en plissant le front.
— Tu m'as écouté, hein ?
— Je suis désolée, balbutiai-je
Il ne répond pas et se contente de secouer la tête, comme ci ce que je venais de faire était mal. Je suis une éternelle curieuse et ce n'est certainement pas lui qui changera ma façon d'être. Alors oui, la curiosité est un vilain défaut mais elle peut-être aussi extrêmement utile dans des cas particuliers.

— Pardon, mais t'es quelqu'un de très mystérieux et puis je me pose des questions, avouai-je
— Quelles questions ? Elles doivent être certainement personnelles pour que tu écoutes mes conversations téléphoniques. — De quoi est ce que tu parlais ?
Il secoue une nouvelle fois la tête mais, cette fois-ci, je comprends qu'il ne dira absolument rien.
— Kyle.
— C'est pas tes affaires.
— Je crois que ça l'est à partir du moment où j'entends le prénom de mon frère.
En une fraction de seconde, son regard a changé. Aucun son ne sort de sa bouche. Son regard poignant parle à nouveau pour lui, la façon dont il me scrute, la façon dont il fronce les sourcils me glace le sang.
— S'il te plaît, ne me dis pas que tu connais Jérémy et que tu es au courant depuis le début que c'est mon petit frère ? Cette question est purement rhétorique puisque je semble déjà connaître la réponse mais je sens que s'il ne parle pas maintenant je vais avoir des envies de meurtres même s'il est plutôt craquant.
— Pas depuis le début.
Il parle enfin.
— Je l'ai compris à la soirée, c'est en partie grâce à Zac. Ce gosse parle beaucoup.
— Ce gosse comme tu dis a l'âge de mon frère alors je te conseille vivement de me dire ce que tu lui fournis à moitié pr- Je m'interromps, mes pensées s'assemblent et je n'ai pas besoin de terminer ma phrase pour comprendre de quelle dose il s'agissait. Mon frère en est arrivé là par ma faute, parce que je l'ai abandonné. Au moment où j'allais lui hurler dessus, la porte s'ouvre sur ma prof de littérature et très certainement sur les parents de Kyle. Il jette un coup d'œil à sa famille et c'est un homme désemparé qui se tient devant moi. Il se crispe, il serre les poings et ses jointures deviennent presque blanches. Il a l'air tellement en colère. Il daigne enfin à poser ses yeux sur moi et murmure : — Il n'y a pas qu'avec toi que ça va mal se terminer, Quinn. Je suis désolé. Désolé du fait que je vais devoir t'en parler.
— De quoi est ce que tu parles ?
— D'eux, dit-il en faisant un mouvement de tête en direction de ses parents, de cocaïne et de ton frère. Il les fixe avec tellement de tristesse, de rancœur. Lorsqu'il se dirige vers eux, j'attrape son bras, déterminée, j'esquisse un sourire pour lui faire comprendre que tout va bien se passer car j'ai enfin compris qui l'a certainement poussé à se droguer. Quelques secondes avant, j'ai vraiment eu envie de le tuer mais chaque problème a une solution et si lui est parvenu à me pousser dans mes retranchements et à m'aider, je le ferai aussi, pour lui. Et peut-être qu'en l'aidant lui, je pourrai aider mon petit frère, parce que visiblement, même si j'ai tout fait pour ne pas le remarquer, ils ont tous les deux besoin de moi. Kyle me regarde, troublé, ne sachant pas quoi faire, ni quoi dire en face de ses parents.
— T'as une sale mine, mon fils. C'est ça de faire la fête tous les soirs après tes matchs de basket.
— Bonjour à toi aussi maman.
Son père le salue puis sa mère l'embrasse à son tour. Elle lui murmure :
— Regarde moi ces cernes...
Elle allait sans doute faire une seconde remarque jusqu'à ce que ses yeux se posent sur moi.
— Mais qui est cette jeune femme ?
— Une amie à Kyle, maman, dit Hilona
— Bonjour, je suis Quinn, ravie de vous rencontrer madame Smith dis-je en lui tendant la main, avant de la tendre au père de Kyle
— Je t'en pris, appelle moi Virginie, et mon mari est Mark.
Je lui souris et sens Kyle agacé à ma gauche. Il souffle alors discrètement :
— C'est pas ma mère ça. Elle est tellement fausse, son cirque va me gonfler.
Il lui jette un regard noir mais il s'illumine lorsque Alexandra, ma prof de littérature qui est aussi celle de Kyle et par la même occasion, sa sœur. Je pense sincèrement que le petit bout de chou qui l'accompagne va malheureusement subir les conséquences de ce repas.