La nuit était sombre, la pleine lune émettait un éclat sans réelle lumière : une lumière morte, un éclat fade, une nuit sombre. La brume habillait la rue comme une étoffe de soie pouvait habillait une femme. Seulement, celle-ci était souillée par les rats et la pourriture. Le trottoir était orné de poubelles nauséabondes à leurs pieds pouvaient traîner quelques junkies, quelques traînées et quelques truands à deux sous. Ce fut une nuit sans réel attrait. Et pourtant, et pourtant ! Qu'est-ce qu'elle était belle !
J'aimais marcher la nuit. Ne me demandez pas pourquoi, je ne vous répondrai pas...Ou peut-être que je le ferai. Je ne saurai pas expliquer cela de façon claire, en revanche je peux tout de même essayer. Je trouve que l'air nocturne est différent de celui qui nous entoure le jour. Il me semble plus frais et dans un même temps plus doux. Il me frappe et me caresse, m'effraie et me rassure, c'est un mélange de choses contradictoires qui déferlent simultanément sur ma personne. Marcher dans des rues vides où peu de monde peuvent croiser votre chemin laisse le temps à la réflexion, cela vous permet d'organiser le foutoir dans notre tête qui nous parasite, il pourrait même vous vider l'esprit. On se sent insouciant, léger et oserai-je même dire libre ?
J'aimais marcher la nuit.
Oui, j'aimais marcher la nuit, surtout cette nuit, les parasites n'étaient plus là, ils étaient partis. Ils me laissaient enfin souffler mais ce soir, malgré tout, je n'étais pas seule car elle était là. Tera était là. Son sourire ivoire rayonnait ma nuit et son rire cachait les bruits vulgaires de la ville. J'aimais lui parler, elle n'était pas comme Sarah certes, mais avec elle je pouvais être naturelle, je veux dire vraiment naturelle.
J'ai toujours pensé que nous avions plusieurs versions de nous-même. La première est celle que nous gardons devant des inconnus, une personne cordiale et polie qui se montre sous sa meilleure lumière, ensuite nous avons la vie que nos parents connaissent, puis celle qui est familière à nos amis, elle est d'ailleurs plus frivole dans la majorité des cas. Nous avons aussi celle où nous nous sentons plus libres, en générale celle-ci voit le jour avec les personnes de qui nous sommes le plus proches, comme Sarah ou éventuellement Tony. Vous avez compris le système. Plus on avance en crescendo, plus notre vie semble plus délurée et moins édulcorée. Et pour finir, nous avons le vrai « nous », le vrai « moi », vous savez cette partie de votre vie dont personne, je dis bien personne, ne connaît l'existence. Une vie où vous êtes seul témoin de vos actes, seul juge de vos intentions. Une vie entièrement guidée par ses instincts et ses faiblesses où on se laisse tenter à nos envies ou à nos pensées les plus funestes. On se permet de penser des choses qui seraient outrageuses pour nos pairs voire même nos proches. Ainsi, nous sommes notre seul confident.
Mais bizarrement, j'avais le sentiment profond de pouvoir partager cette partie émergée de moi-même avec Tera. Ce soir-là, elle m'a raccompagné, nous étions rentrées à pieds malgré la douleur à sa cheville. Nous avions beaucoup parlé, les sujets étaient anodins rien de bien fou on abordait les thèmes de cinéma, de musique, de ragots et toute sortes de choses, cependant, je sentais déjà un lien entre nous. Que c'est étrange de se sentir liée ainsi. Quoi qu'il en soit, depuis cette nuit, Tera Ogel et moi étions devenues inséparables. Bien-sûr, Sarah restait ma meilleure amie et rien ne changerait cela, c'était plus que cela d'ailleurs, elle était pour moi une sœur. Mais cette chose avec Tera était unique, cela n'avait pas de nom car il ne suffisait pas d'en parler pour comprendre, il fallait le vivre.
Ce soir-là n'était pas le dernier, ils s'en suivaient des dizaines, les jours passèrent puis les semaines suivirent aussi et on était toujours en contact. En effet, nous avions échangés nos réseaux sociaux et nos numéros, nous nous envoyions souvent des messages, des publications et des vidéos marrantes. Mes proches avaient bien remarqué que j'avais fait une nouvelle rencontre, j'avais toujours le nez collé à mon téléphone, d'ailleurs, Tony et Sarah avaient même pensé que j'avais un petit-ami. La nuit, nous nous retrouvions dans un parc derrière chez moi et on passait des heures à parler, mais étrangement, elle restait tout de même assez secrète sur sa vie. Était-ce intentionnel ? Non je ne pense pas. Je dirais juste que de tout évidence nos discussions étaient tellement animées qu'au final nous ne nous attardions pas à de telles formalités. Comme moi, elle aimait le monde de la nuit, pas forcément les boîtes de nuits mais juste la tranquillité de la nuit. Nos rencontres étaient pour moi une pause de quiétude et de légèreté dans la jungle qu'était ma vie. Il fallait que je respire, entre les recherches d'emplois, la pression de mon père, l'anxiété de ma mère et tout le bordel autours, je me sentais étouffée. Elle me permettait de souffler.
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Small And Weak - ou la folie des grandeurs.
Misteri / ThrillerA trop rechercher la lumière on finit souvent par perdre la nôtre. Aria a grandit beaucoup trop vite pour bien grandir. Aria est jeune, belle et ambitieuse assez rusée pour ce monde. Néanmoins quand la recherche de gloire se fait par les larmes et...