Paye moi du rêve!

Chapitre 3 - Premier changement

Je pris le train de 7h53. Mes cours commencent à 8h30. Le temps d'arriver en ville, il sera 8h10. Le temps d'arriver dans l'établissement scolaire il sera 8h15. D'habitude je suis heureux de prendre le train. Cela me donne un semblant d'autonomie, l'impression d'être un adulte. Ça paraît stupide je sais. Mais quand ce sont les parents qui te déposent juste en face de l'école, et qu'ils passent des jours à faire les saintes effarouchées quand on leur en fait la remarque, le train c'est vraiment bien en fait. Sauf que là, ça me faisait ni chaud ni froid. Depuis ce matin, une étrange vague de sensations inconnues me submergeaient. Et c'était bon.

8h13, j'arrive tout doucement...
Je suis là. Viens me trouver.
Sa voix. Encore? Que me voulait il?
Viens me trouver!
Le mal de tête à nouveau. J'étais dans la rue de mon école, entre un rond point et un carrefour mal fichu. Il y avait du monde et de la circulation. Non, ne me dites pas qu'il était ici?! En panique, je cherchais un jeune garçon aux habits trop normaux et au regard de glace. Mais en vein. J'accelerais le pas quand une main calleuse attrapa mon épaule et me força à pivoter.
C'était un vieillard chauve, avec des lunettes de soleil. Il avait une chemise rouge et un short gris, laissant découvrir ses membres tout maigres. Entre sa moustache blanche et sa barbe grisonnante se tenait un cigare fumant. C'était lui.

- A partir de maintenant, tu ne seras plus le même. Souviens toi de la condition et tout ira bien.

La fumée du cigare était bleu vif, cintillante et chaude.

- Quoi ce n'est toujours pas fait! Et que faites vous là, on peut vous voir et...

Je me figea de stupeur. J'ai commis une erreur. Ne jamais hausser le ton. Ne jamais mettre en colère l'entité. Ce sont les livres qui le disaient...
La main se ressera sur mon épaule. Je plissais mes yeux, en attente de quelque chose. Mais il était partit. Le vieillard en face de moi retira ses lunettes de soleil et enleva vivement sa main. Il parut gêné et débousselé. Il murmura de plate excuses et s'en alla. Jamais il saura qu'il avait été possédé.

...

Les cours s'enchaînaient. Les profs défilaient. Toujours la même routine. Toujours les mêmes choses, les mêmes visages... Les mêmes personnes qui font comme si je n'existais pas, qui me snob. Je hais ça! La routine ça tue. En temps normal, j'aurais fermé ma gueule et entammer une mini dépression dans les classes. Encore à m'inventer des scènes iréalistes où l'attention se braquerait enfin sur moi! Mais pas là. Non.

Aie le courage de suivre ton coeur et ton intuition. Ils savent ce que tu veux réellement devenir. Le reste est secondaire!

Ça m'est venu tout seul et je me rendis compte de quelque chose d'important. Une vraie prise de conscience.
Je n'aime pas ce que je fais.
Ce que je veux, c'est être aimé en étant moi même. Rien à foutre du reste.
En plein cour de math, je me suis levé de mon bureau, les mains claquées sur le banc.
Tout le monde me regardait. Le prof me dévisageait.

- Et bien? Que se passe t il? Vos rêveries se sont transformés en cauchemar? La réalité vous rattrape? Asseyez vous!

Rire général. Des regards moqueurs se braquèrent sur moi. Non je ne vais pas m'asseoir.

- Non. Je ne m'assirais pas! Je n'ai pas d'ordre à recevoir d'un homme comme vous! Vous qui traitez les élèves commes des bons à rien, comme des chiffres dans un dossier! Ne vous rendez vous donc pas compte de ce que je vois moi, ici? Non bien sûr! Tout ces élèves sont là à croire que s'ils ne réussissent pas, ils n'arriveront à rien, que leur place est nul part! Personne n'est là pour les aider! Ceux qui ont besoin d'aide, vous les effacer, vous les laisser là dans leur merde jusqu'au cou!

Les yeux du prof s'agrandirent et ses joues rougirent. Qu'il continue je n'ai pas encore finis!

- Fini la lobotomie. Vous nous dictez ce qu'on doit faire sans prendre compte de nos avis, de nos envies. Fini de donner la patte. Au fond, ça vous conforterais dans votre médiocrité, que l'on ne puisse faire ce dont l'on est fait pour! C'est ça, la réalité qui vous rattrappe! Ah, vous vous reconnaissez? Là est le problème! Vous avez raté votre propre vie comment voulez vous élevez la nôtre?!

Wow... Ça viens de moi ça?

Silence intégral. Les regards étaient fuyants. Je ne parlais pas juste pour le professeur. Mais pour tant de gens...
Quel soulagement.
Je me leva et quitta la classe.
Je n'aimais pas ce que je faisais.
Je vais réparer ça à présent.