Chapitre 2 - LÉO

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Ashes – Celine Dion

Je ne suis pas quelqu'un de bien.

Je m'attelle à me rappeler ce fait chaque jour que ce monde crée. Surtout le 22 septembre. Pourquoi ? D'un, parce que je suis seul et que je n'ai à plaire à personne. De deux, car je suis ce genre de mec capable de boire jusqu'à l'inconscience dans un cimetière sans en avoir quelque chose à foutre que ça offense quelqu'un. Mon comportement n'est pas acceptable, je le sais, mais, en réalité, il n'y a jamais eu âme qui vive pour venir me le reprocher. Alors qu'y a-t-il de plus à ajouter ?

Triste.

C'est comme ça quand on est orphelin. Pas le temps de s'apitoyer sur soi-même. À partir du moment où l'on dépasse ce postulat, on arrête d'espérer être sauvé. Il suffit de faire taire la douleur. Et pour cela, quoi de mieux qu'une bouteille de vodka ?

Il ne faut pas rester là.

On m'attend. Je dois me rendre au QG, le bar étudiant de notre université. Rémi m'a menacé de venir me chercher lui-même si je ne rejoins pas l'équipe. Il pleut des cordes et la capuche de mon gros sweat noir ne me même protège plus.

Pas surprenant. De la pluie pour une journée de merde.

J'ai tous mes circuits sous la flotte et plus rien dans le cœur. Que dalle. Ce jour est gravé à jamais dans mon corps et mon esprit. Une croix marquée à l'encre rouge sur mon calendrier.

Mon jugement.

Je marche donc vers le bar, sachant que je pourrais m'engourdir sous l'alcool une fois arrivé. L'ironie de ma vie, c'est la manière dont je suis entouré de monde. Mes coéquipiers, les WARRIORS, ils sont tout ce que j'ai. Pour autant, je ne suis qu'un corps dans la foule. Pas vraiment là, mais physiquement présent. Il y a erreur dans le script. Je ne mérite même pas d'être sur cette terre.

Lorsque j'entre dans le bar, déphasé, je me dirige vers notre table habituelle, au fond. Je ne pipe mot. J'ai l'alcool silencieux et mes collègues, eux, sont euphoriques. Nous ne buvons pas pour les mêmes raisons. Je suis là pour sauver les apparences. Simplement pour faire bonne figure. Et eux, ils se détendent et s'amusent. Rémi me flique de regards en biais que je m'applique à ignorer.

Qu'est-ce que je fous là, putain ?

— Léo ? Léo Legrand ? C'est bien toi, le capitaine des Warriors ?

Je relève le regard vers la personne qui me parle. J'ai du mal à faire la focalisation.

— Ce qui se dit sur toi est vrai. Tu n'es pas très attentif à ce qui t'entoure.

Je cligne des yeux, saoul et très peu intéressé par ce que prononce l'inconnue en face de moi. Son parfum m'agresse le cerveau.

— Si c'est ce qui se dit, alors... réponds-je d'un ton acide.

Elle s'avance vers moi, au-dessus de la table.

— En tout cas, la rumeur n'avait pas menti non plus sur ton physique, ajoute-t-elle avec un clin d'œil appuyé.

Je lève le menton puis la jauge quelques secondes. Je suis connu pour aimer jouer et il est vrai que j'apprécie la chaleur humaine.

Mais pas ce soir. Non, pas le 22 septembre.

Je me lève et elle m'observe faire. Elle esquisse un sourire amusé et ne le perds pas lorsque je déclare :

— Je dois y aller.

Je contourne la table, prêt à quitter les lieux. Seulement, elle me rattrape par le poignet.

— Ma meilleure amie est dans l'équipe des féminines, alors, si jamais tu changes d'avis, appelle moi.

WARRIORS - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant