Il faisait sombre dans la ruelle mal éclairée, le genre de nuit où les ombres semblaient s'étirer et s'emparer de tout. Les étoiles brillaient timidement, à peine visibles à travers le voile épais des nuages. Un cri déchira l'obscurité, suivi par des bruits de pas qui battaient le tarmac à une allure saccadée. Les échos des pas rebondissaient contre les murs sombres, créant une symphonie macabre dans la nuit silencieuse.
Elle courait, les poumons brûlant et le cœur tambourinant dans sa poitrine. La sueur glissait le long de son front et son souffle était haché, chaque inspiration était une douleur lancinante qui lui rappelait ses poursuivants infatigables derrière elle. Les ombres semblaient la traquer, insaisissables, et elle savait que son temps était compté.
Enfin, au coin de la rue, elle apparut, une silhouette tremblante dans l'obscurité. Elle était dégoulinante de sueur, les vêtements déchirés, et une côte fêlée lui faisait un mal de chien à chaque mouvement. Chaque pas était une agonie, chaque inspiration une lutte contre la douleur. Pourtant, elle continuait à avancer, déterminée à ne pas se laisser rattraper.
Elle prit son élan, rassemblant ses dernières forces, et bondit vers une fenêtre à proximité. Sa main gantée frappa le verre avec une violence désespérée. L'impact fut assourdissant, le tintamarre de l'explosion de la vitre résonnant à travers la nuit, vibrant dans l'air épais.
Le fracas du verre brisé se répandit comme une onde de choc, allant bien au-delà de la ruelle étroite. Elle savait que le bruit alerterait tout le quartier, mais elle n'avait pas le temps de s'apitoyer sur cette réalité. Son esprit était en mode survie, ses instincts primaires prenant le dessus sur toute rationalité. Elle devait trouver refuge, trouver une arme, une échappatoire, car déjà elle entendait le sifflement effrayant qui la pourchassait sans relâche depuis des heures.
"Peut-être a-t-il appelé des renforts," pensa-t-elle, essayant de réfléchir entre deux halètements saccadés. Les bruits de pas continuaient de résonner, se rapprochant, se rapprochant toujours plus.
Elle pénétra dans la pièce qu'elle venait de rejoindre, se faufilant dans l'obscurité. Elle se dépêcha de rassembler ses pensées. Tout était en désordre, les objets jetés à terre par son intrusion. Ses doigts tremblaient alors qu'elle tâtonnait dans l'obscurité, cherchant frénétiquement quelque chose, n'importe quoi qui pourrait l'aider.
A tâtons, elle heurta un tiroir, qu'elle arracha avec une impatience désespérée. À l'intérieur, elle trouva un couteau de cuisine, l'acier luisant d'un éclat métallique dans la pénombre. Elle le saisit fermement, sentant le froid du métal contre sa paume moite. C'était une lueur d'espoir dans la nuit noire.
La porte arrière de la pièce grinça alors qu'elle se précipitait à l'extérieur, jetant un coup d'œil furtif autour d'elle. La nuit s'étendait devant elle, une toile d'ombres et de recoins mystérieux. Elle sentit le froid mordre sa peau, l'adrénaline se mêlant à l'angoisse dans ses veines.
Elle se remit à courir, ses pieds martelant le sol, chaque pas faisant écho dans son esprit comme un battement de tambour irrégulier. La sueur coulait dans ses yeux, floutant sa vision, et pourtant elle continua, ne s'arrêtant pas, car derrière elle, son poursuivant ne ralentit pas. La nuit était devenue un labyrinthe de doutes et de peurs, une danse macabre entre la vie et la mort.
Soudain, un grondement lointain se fit entendre, le sol vibra sous ses pieds. Les vibrations annonçaient une voiture en approche. Elle hésita à peine, se jetant sur le trottoir à temps pour voir une camionnette garée, ses feux arrière luisant faiblement. C'était son unique chance. Sans réfléchir, elle s'engouffra dans le véhicule, les clés déjà dans le contact. Le moteur rugit à la vie, et elle démarra en trombe.
La ville défilait autour d'elle, un kaléidoscope d'ombres et de lumières. Ses mains serraient le volant avec une intensité presque douloureuse, ses yeux fixés sur la route. Les lumières clignotaient comme des étoiles lointaines, et pourtant, elle sentait toujours le souffle de son poursuivant sur sa nuque, l'odeur du danger planait toujours autour d'elle, même dans l'habitacle de la camionnette.
Les minutes devinrent une éternité, chaque seconde étirée dans un univers parallèle de crainte et de détermination. Elle s'échappait à travers les rues désertes, cherchant un refuge, une issue. Ses pensées erraient entre le pourquoi et le comment, entre la réalité et le cauchemar.
Enfin, elle se gara dans une ruelle isolée, coupant le moteur. Les battements de son cœur étaient assourdissants dans le silence qui l'entourait. Elle ferma les yeux, laissant les larmes couler, une avalanche d'émotions qui déferla enfin. La tension accumulée dans son corps s'échappa légèrement, laissant place à un mélange de soulagement et de désespoir.
Soudain, une voix résonna dans sa tête, une voix qu'elle connaissait.
"Tu es en sécurité maintenant. Les liens entre les mondes se sont entrelacés, et tu as touché l'équilibre fragile entre le songe et la réalité."
Elle releva les yeux pour rencontrer le regard éthéré de Raison, l'homme qui hantait ses rêves, le sauveur et le guide durant les heures les plus sombres. Il était là, immatériel mais pourtant si réel, un pont entre deux mondes.
Un sourire doux s'étira sur ses lèvres alors qu'elle comprit. Les liens entre les mondes étaient plus complexes qu'elle ne l'aurait jamais imaginé. La frontière entre les rêves et la réalité est mince, fragile, et elle a touché cette frontière, la faisant vibrer de l'énergie de sa propre survie.
-Qui es-tu ? murmura-t-elle, ses yeux se perdant dans les siens, cherchant la vérité.
-Je suis Raison, répondit-il, son sourire évoquant à la fois la tristesse et la solennité. "Celui qui veille sur toi dans les recoins les plus sombres de ton esprit."
Les larmes coulèrent librement sur ses joues, une libération de tant d'émotions refoulées. La réalité et le rêve, les ombres et la lumière, tout se mélangeait dans cette nuit d'équilibre fragile.
Alors que la lune brillait au-dessus d'eux, elle sentit que les liens entre les mondes s'étaient entrelacés pour toujours. Et dans ce moment de communion entre le songe et la réalité, elle comprit que la frontière entre ces deux états n'était qu'une illusion, et que la vérité était bien plus complexe et mystérieuse que ce qu'elle aurait pu imaginer.
La nuit s'étendait devant elle, pleine de possibilités et de promesses. Et même si elle ne savait pas ce que l'avenir lui réservait, une chose était sûre : elle ne sera plus jamais la même. Les leçons de cette nuit d'équilibre fragile entre les mondes la guideront vers l'inconnu avec courage et détermination, car elle a touché l'essence même de la réalité et du rêve, et elle en est ressortie plus forte que jamais, plus vivante et éveillée qu'elle ne l'avait jamais été de toute son existence.
Les étoiles continueront de briller, témoins silencieuses de l'histoire qui s'est déroulée dans l'obscurité de cette ruelle. Et quelque part, entre les dimensions du rêve et de la réalité, une connexion spéciale restera gravée à jamais, liant ces deux mondes d'une manière qui ne pourra jamais être brisée.
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Ce Que La Réalité Doit Au Rêve
Short StoryUne nuit sombre, une fuite désespérée. Des ombres menaçantes, une fenêtre brisée. Une voix qui guide dans l'obscurité. Entre rêve et réalité, des secrets s'entrelacent et la raison prend place.