SACRE LAMINE
Ce Lamine, il nous étonnera toujours ! Tels étaient les mots de son proviseur à la fin de son
premier cycle.
Lamine est un jeune issu d'une famille modeste. Fils unique et lycéen fraîchement sorti du collège, Il fut la fierté de ses parents durant son cursus scolaire du premier cycle, mais il était la risée de ses camarades. Pourtant cela est appelé à changer. Ses parents et ses professeurs se vantaient de l'intellect de leur fils et élève qui enchantait par ses belles performances. Il excellait dans toutes les matières. Toujours premier de sa classe, jamais détrôné malgré les nombreuses tentatives de ses camarades de classe afin de le faire tomber de son piédestal. Lamine accordait très peu d'importance aux futilités qui rythmaient le quotidien des adolescents normaux (s'amourachant par-ci, prenant des risques par-là) et ne vivait que pour les études si l'on pouvait le dire ainsi. Les professeurs se l'arrachaient, tous cherchaient à l'avoir dans leur classe. Il faisait preuve d'une modestie que nul ne pouvait qualifier de fausse. Il était tellement pétri de qualités que si on se mettait à toutes les énumérer, on ne finirait pas. Notre protagoniste avait un avenir tout tracé jusqu'à ce que la puberté, étape obligatoire pour tout être humain normalement constitué, s'en mêle, assez tardivement d'ailleurs. Cela allait bouleverser tous les plans de l'adolescent, la faute à la transformation radicale de sa manière de penser. Dans sa tête, à la place de l'habituel agencement de ses pensées, régnait un grand capharnaüm sans pour autant en être vraiment un. Il y bourdonnait de multiples pensées, souvent saugrenues (vous ne pouvez imaginer la quantité de choses qui bourdonnent dans la caboche d'un ado en pleine puberté).
Pourquoi, diable, les changements s'opérant dans mon corps m'affectent-ils de cette ma- nière ? Me dis-je tout haut arpentant l'espace familial et me remuant les méninges. Dois-je continuer à faire fi de la concupiscence qui s'insinue en moi afin de continuer à faire la fierté de mes parents ? Cela impliquerait que je continue donc d'éluder la question de ma vie sociale. Dois-je tout faire pour m'intégrer parmi les jeunes de mon âge ? Cela impliquerait trop d'engagements aléatoires. Que faire ?
Comment pourrais-je me faire accepter de mes congénères sans pour autant perdre l'estime que me portent parents et professeurs ? Telle est la question qui le tourmente jour et nuit.
Le jeune Lamine trouva un moyen qui pourrait l'aider à friser le juste milieu. Il s'en fut profitant de son temps libre pour se lier d'amitié avec les camarades qu'il pensait assez sérieux pour ne pas se laisser déranger dans ses études tout en entretenant un tant soit peu de vie sociale , la série S n'est pas une série facile surtout lors de notre première année au lycée. Au bout de quelques temps, notre jeune homme ne trouva plus cet équilibre satisfaisant. Il commença à aimer les situations à risques à un tel point qu'on ne pouvait reconnaître en lui le garçon bien éduqué qu'il fut. Il donna à sa vie une tournure déplorable. Lamine avait commencé à fréquenter des personnes peu recommandables de la même classe d'âge que lui, bien décidés à le changer de fond en comble. Les premiers à s'apercevoir de cette transformation furent ses parents. Ils remarquèrent un éloignement de leur fils, ce-dernier qui n'était, en général, aucunement distant. Vers la moitié de l'année scolaire, les résultats du premier semestre tombèrent. Ses notes dégringolèrent, passant d'un excellent ni- veau à un niveau passable tout d'un coup. Naturellement, les parents en furent alarmés et convoquèrent leur fils pour parler de la baisse de niveau criante de ce dernier qui tenta de les rassurer en leur rappelant que la seconde était l'une des classes les plus dures du cycle secondaire et en leur promettant de se rattraper en haussant sa moyenne au second semestre. Mais c'était sans compter sur l'intervention de ses ''nouveaux amis''. Ils l'initièrent aux relations amoureuses. De fil
en aiguille Lamine en arriva à avoir une petite-amie. Ce qui raviva la flamme de sa concupiscence longtemps enfouie sous les cendres des obligations scolaires. Se laissant guider par ces amis, il franchit maintes limites dont il ne se serait jamais approché s'il avait encore toute sa tête qui rappelons-le est chamboulée par la puberté. Ensuite, les choses ne se passaient plus de la même manière entre sa copine et lui, ses potes le pressaient afin qu'il franchisse le pas, << qu'il soit un homme, un vrai >> selon leurs propos. Seulement, ils ne lui laissaient pas trop le choix, sa copine n'étant pas d'accord, ses amis lui mirent la pression pour qu'il la ''largue'', l'affublant de toutes les tares du monde et la traitant de tous les noms d'oiseau. Lorsqu'il s'en départit, ils en profitèrent pour élargir son cercle et lui présenter des filles d'un autre acabit. La conséquence logique de cet élargissement de son horizon est la débauche à laquelle il s'adonna durant les quelques semaines qui le séparaient des compositions. Il s'en donna à cœur joie, ses performances scolaires en prirent un grand coup. Lamine, non seulement ne pouvait tenir ses engagements, mais aussi se retrouva dans une position peu enviable (soit il double ou il se résigne à aller en classe littéraire). Je pourrais retrouver une moyenne assez décente tout en continuant à ''profiter'' de la vie. Lamine se fit passer un savon par ses parents qui s'inquiétaient de plus en plus de l'état de leur fils, ne sachant ce qui en était l'origine. Les vacances passèrent et il ne se tint toujours pas tranquille, du moins jusqu'au début de l'année scolaire. Se rendant compte finalement du mauvais chemin qu'il avait emprunté, Lamine se mit à faire une introspection, poussé par un accès de maturité venu de nulle part. Il se mit à planifier un redressement de la situation, bien décidé à la reprendre en main et à regagner l'estime perdue. Cela s'est soldé par la perte de contact avec ses amis du moment. Il comprit le sens du proverbe « mieux vaut être seul que mal accompagné». Lamine est un jeune homme déterminé, donc il n'est pas surprenant qu'il soit parvenu à rattraper le retard accusé lors de sa première année au lycée. Tout allait mieux dans le meilleur des mondes, jusqu'à la moitié de l'année scolaire. Il se retrouva avec un gros problème sur les bras. Une fille au ventre bedonnant, avec laquelle il avait une aventure durant les vacances, vint le trouver pour le désigner comme père du bébé. Incrédule, il nia d'abord en être l'auteur puis se rendit finalement à l'évidence. Mamie (car c'était son nom) n'avait connu aucun autre homme à part lui. Il en informa ses parents, préférant qu'ils le sussent de sa bouche. Ils en restèrent bouche bée. Eux qui avaient commencé à oublier cette sombre période de la vie de leur fils n'en revenaient pas. Les pièces du puzzle se mettaient enfin en place. Ils y voyaient plus clair. Les parents de la jeune fille vinrent les trouver pour trouver une solution à leur problème commun. L'usage voulait que Lamine épousât leur fille; ce qu'acceptèrent les parents de ce-dernier. Lamine n'était pas contre la perspective d'un mariage arrangé si cela permettait de sauver l'honneur de leurs familles respectives. D'ailleurs, il n'avait pas trop le choix. Il lui paraissait injuste que ce petit bout d'homme puisse grandir sans la présence d'un père. Personne ne trouva nécessaire de demander son avis à la future mère, se disant sans doute que c'est sa légèreté qui l'avait conduite à cette situation. Le jeune homme trouva du réconfort dans le fait que Mamie était belle et qu'avec un peu de temps, il pourrait extirper de la jeune fille, la naïveté qui la fit tomber dans ses bras. «Il faut que j'assume mes responsabilités», se dit-il. «Ceci est peut-être le fruit d'une erreur survenue dans une période assez floue de mon existence, il n'en reste pas moins que je suis aussi fautif que cette frêle jeune femme, sinon plus... Serai-je en mesure de m'occuper de ce petit être qui bourgeonne dans le ventre de ma future femme ? Serai-je capable de me comporter en un père digne de ce nom ? Tant de questions dont je n'ai pas la réponse. Seul l'avenir me le dira !!!»
