Le sourire cache les larmes ~ OS Jérémy Ferrari

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J'arrive dans ma chambre d'hôtel, et je m'affale sur le lit. Je suis épuisé. Il faudrait que j'aille prendre ma douche, ranger mes habits de scène. Pas envie. J'ai juste envie de rester comme ça, avachi sur mon lit, et de m'endormir paisiblement. Visiblement ce n'est pas ce que mon corps a prévu. Je me lève, comme porté par une énergie inconnue, et me dirige vers mon sac, à l'autre bout de la chambre. J'en sort une bouteille de vin, en me disant « Juste un peu » et retourne m'effondrer sur le lit. Je regarde par la fenêtre juste à côté. Le ciel est complètement dégagé, mais les lumières d'Aix-en-Provence cachent les étoiles.

Du haut du vingtième étage, je n'entends pas les bruits de la ville. Tout est silencieux. Ce silence est tellement pesant. Je me remémore cette belle soirée, ce spectacle dont je suis si fier, les éclats de rire de tous ces gens, tous ces gens debout qui applaudissent à cœur joie. J'étais bien sur cette scène. Deux heures de bonheur. Deux heures où j'ai tout oublié. Maintenant c'est fini, et je me sens vide. Je remarque alors que la bouteille que je tenais dans la main est vide, elle aussi. Je me lève et ramène sur le lit le sac qui contient les autres. Toute cette énergie que je mets devant mon public, toute cette énergie qui étire leurs sourires, toute cette énergie s'est envolée, emportant toute ma joie. Je me sens terriblement seul. Si ma copine pouvait être là, près de moi, à me caresser les cheveux pour me réconforter. C'est à elle que je dédie tous mes spectacles, elle me manque, et même si je ne lui dis pas souvent, je l'aime plus que tout.

Je veux oublier. Je veux tout oublier. Je ne compte plus les litres d'alcool que je viens machinalement d'ingérer. Je sais que je devrais pas, mais je n'ai pas le choix. J'aimerais pouvoir dire non, mais mon corps ne me laisse pas décider. J'ai besoin de chasser tous les problèmes de ma tête. Le liquide coule naturellement dans ma gorge. Il faut que j'appelle Andy. J'attrape mon téléphone et l'appelle en tremblant. De grosses larmes commencent à rouler lentement sur mes joues.

« Allô ?

- Ma chérie ?

- Oui Jérémy. Comment tu vas ?

- Je... Oui ça va. »

Elle soupire, mais ne semble pas prendre en compte mon hésitation, et ma voix qui doit être désastreuse. Ça me fait tellement de bien de l'entendre.

« Comment s'est passé ton spectacle ?

- Très bien...

- Pourquoi tu ne dors pas ? »

Qu'est-ce que je suis censé lui répondre ? Lui dire que je vais mal, sans vraiment savoir pourquoi ? Ou que c'est juste que je suis rentré très tard de ma séance de dédicaces ? Fondre en larmes au téléphone ?

« Bon Jérémy. Il faut qu'on arrête de se voiler la face. Dis-moi ce qu'il se passe tout de suite. »

Je suis surpris par son changement de ton. Un peu vexé aussi. Je ne réponds rien.

« Ne me dis surtout pas que tu as encore bu.

- Je... Non ! »

Silence pesant. J'essaie de retenir mes sanglots, ne pouvant déjà plus retenir mes larmes qui coulent en torrent sur mes joues. J'ai un énorme poids sur le cœur. J'ai menti à Andy. Je lui avais promis d'y aller doucement avec l'alcool. J'ai l'impression de l'avoir trahie. Je m'en veux atrocement. Je ne la mérite pas. Je ne peux plus me faire confiance.

« Tu m'avais promis Jérémy... Je pensais pouvoir te faire confiance. Je m'inquiète vraiment pour toi. Je sais que tu vas mal, et tu ne me dis jamais rien. Tu ne dis jamais rien à personne. Tu veux tout faire seul, mais tu te détruis. Tu m'as déçu, Jérémy. »

Le sourire cache les larmes ~ OS Jérémy FerrariOù les histoires vivent. Découvrez maintenant