Chapitre 1

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Cela fait plus d'une semaine que j'habite chez Tom et que je tiens de temps à autre le bar. Rien de très compliqué, si l'on sait ignorer les grognements de ceux n'appréciant pas de voir une inconnue dans leur zone de confort... Jusqu'à ce que quelqu'un leur chuchote mon nom, et ils sont soudain beaucoup plus – voire trop – chaleureux. L'un d'eux a d'ailleurs regretté un geste déplacé lorsqu'il est reparti d'où il venait en tenant douloureusement sa main baladeuse.

A part cet incident, je me suis aisément habituée à l'environnement majoritairement masculin. Les loups aboient mais ne mordent pas. Enfin, pas leurs congénères.

La cohabitation avec Tom est également plus facile que je ne l'aurais pensé. Il ne pose pas de questions personnelles, notamment sur ma présence ici, et je ne pose pas de question sur les conquêtes qu'il ramène régulièrement. C'est comme un pacte silencieux que nous avons passé.

Nous ne nous sommes uniquement pas entendus sur un sujet : l'apparence du bar. Je lui ai fortement suggéré le lendemain de mon arrivée de donner un grand coup de frais, en commençant par une serpillère, et en allant jusqu'à un produit à carreaux et la réparation de quelques planches pourries sur la façade. Mais Tom a fermement refusé toutes mes propositions en mettant en avant qu'il se sent bien ici et que c'est pour cette ambiance précisément que les clients viennent.

Au fond, nous savons tous les deux que c'est faux. Les clients viennent pour une seule et unique raison : le bar est identifié comme un lieu de ralliement pour les loups-garous, leur permettant d'assumer quelques heures par jour leur réelle identité.

Je le sais car je suis moi aussi un peu moins sur la défensive depuis que j'ai posé un pied ici.

Mais j'ai fini par céder à la volonté de Tom quand il a mis en avant que l'apparence du bar est aussi ce qui permet de rebuter les clients « indésirables ». Entendez par là « d'une autre espèce ».

Je n'ai donc rien changé à la 'décoration' de son bar. Enfin, j'ai quand même passé un grand coup de torchon sur le bar ce matin avant qu'il ne se lève. Je n'en pouvais plus de retrouver ma manche collée sur le bois sale.

Je jette un coup d'œil vers mon œuvre, certaine que Tom ne s'en rendra même pas compte quand il aura terminé sa grasse matinée. Depuis qu'il sait que je peux ouvrir sans lui, il en profite.

Je suis concentrée sur la dernière tâche visible tout au bout du bar lorsque la porte d'entrée grince vivement. Je n'y prête plus vraiment attention, déjà habituée à ce bruit sinistre. De toute façon, je suis certaine que Tom refuserait aussi de graisser les gonds.

Mais quelques secondes plus tard, je suis forcée de relever la tête, abandonnant à contrecœur la tâche tenace, lorsque l'intégralité de la clientèle déjà présente devient parfaitement silencieuse. La chose est assez inhabituelle pour que je m'inquiète immédiatement.

Lorsque je me tourne vers l'entrée, je découvre la raison d'une telle réaction. Un homme que je n'ai jamais vu auparavant, ni au bar, ni ailleurs, se tient là. Il a des cheveux noirs, légèrement trop longs, à mon avis. Il porte un t-shirt gris, sur lequel il a passé une veste en cuir qui semble avoir déjà vécu d'autres aventures, un jean noir et des bottes assorties. Son regard gris scrute lentement les visages qui l'entourent et qui sont rivés sur lui.

Je le vois hausser les sourcils, peut-être par surprise, puis décider tout de même d'avancer en direction du bar.

Dès qu'il fait un mouvement, j'entends plusieurs grognements menaçants. L'inconnu ne semble pas s'en préoccuper et s'assoit juste en face de moi.

Il semble avoir le même âge que moi... mais, à l'odeur naturelle qui émane de lui, je ne saurais pas dire depuis combien d'années.

Voilà la raison de la réaction de tous les loups-garous présents, sans exception. Un vampire vient d'entrer sur leur territoire, et ça ne peut pas être un bon présage.

Hybrid Twins [TVD]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant