Chapitre 1

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Les yeux grands ouverts, le regard dans le vide, ça nuit a encore été ponctués de mauvais rêves. Toujours le même, celui où elle est perdue dans dans une forêt avec pour seul guide la voix d'un garçon. Elle en avait parlé à sa psychologue, qui lui disait de chercher du côté de son enfance. C'est tout ce que savait lui dire les psys qu'elle avait consultés, lui parler de son " enfant intérieur " blessé. Tu parles. Bon, elle reconnaissait quand même en avoir changé trop souvent pour percevoir une réelle amélioration.

<< Elwing, lève-toi, tu ne vas pas rester toute la journée au lit, se dit-elle à voix haute tout en consultant l'heure sur son téléphone. Merde, il est déjà 9h30. Je m'en ficherais des claques, je te jure. >>

Nous sommes jeudi, elle doit assurer. Il faut préparer le repas pour la résidence et c'est de son ressort. Elle vit avec d'autres étudiants, avec lesquels elle s'entend plutôt bien. Étudiante, elle l'a été quelques mois avant d'abandonner. Ça lui donne la chaire de poule, rien que de repenser à l'idée de remettre les pieds dans une de ces salles de classe. Ses angoisses ont pris une fois de plus le dessus sur ses projets. À force, elle ne s'en formalise plus, elle a l'habitude.

La cuisson s'achève, quand quand arrive ses premiers camarades et amis. Il y'a des matins où c'est une réelle torture de se lever et de démarrer la journée, mais les voirs et papoter avec eux est toujours un réel plaisir et une bonne motivation. C'est l'une des choses qui la retient ici-bas, se dit-elle, en sortant de la cuisine et en rabaissant ses manches, sur les scarifications de ses bras de la veille.

<< Hey, Maël, je me doutais bien que c'était toi. Tu es toujours, en avance. Comment vas-tu ?

- Bien et toi ?

- Ça va.

- Super, tu sais j'ai appris qu'au tennis les mecs ils... >>

Aloïse et les autres ne tardèrent pas à arriver. Ce sont toujours à peu près les mêmes à venir. Ils parlent. Ils rigolent. Ils la félicitent pour le repas. Certains, repartent assez pressés et d'autres s'attellent à faire la vaisselle. Le lieu se vide, peu à peu. Elle se retrouve à nouveau seule avec ses pensées, pour quelques heures.

Elle ouvre son ordinateur, parcourt ses mails, tente d'écrire. Elle ouvre un bouquin, reprenant là où elle s'était arrêté hier. En vain. La colère contre elle-même ne fait qu'augmenter. Elle retire ses mitaines. Des petits cercles d'anciennes brûlures à l'alumette figure sur le dessus de ses mains. Les larmes lui montent aux yeux. Elle balance à terre tout ce qui se trouve sur la table et qui atterrissent sur le carrelage, dans un fracas.

<< Je ne suis qu'un monstre. Incapable. Je me déteste. DETESTE, hurle t-elle en se dirigeant vers la salle de bain. >>

Avant de refermer la porte sur elle et ses démons, la couleur du coucher de soleil l'interpelle. Il est particulièrement beau, en cette fin de journée. Elle s'approche comme hypnotisée. Elle s'agenouille et commence à prier. La voix du garçon de ses cauchemars apparaît dans un chuchotement, qui se transforme en un cri de détresse.

Méline rentre et voit les affaires de son amie par terre, avant d'apercevoir celle-ci. Elle pense tout de suite à une nouvelle crise et se précipite, mais elle lui fait volte face, manquant de la faire tomber au passage. Elle se dirige vers l'entrée.

<< Elwing, où vas-tu, comme ça ?

- Il faut que j'y aille. Un ami à besoin de moi.

- Quel ami ? Tu ne peux pas sortir, maintenant, il peut à verse et... >>

Elle était déjà sortie, avant que Méline ait pu terminer sa phrase. Alors, elle pria tout bas pour que son Dieu prenne soin de sa chère amie et qu'il ne lui arrive rien en chemin.

********

Il se réveille, alors qu'il est déjà midi passé. C'est ainsi depuis, maintenant, quelques années. Les boîtes trônant sur sa table de chevet, ne lui rappelle que trop bien tout ses problèmes et la volonté de faire quoi que ce soit qu'il a perdu. Il soupire et s'asseoid sur le rebord de son lit. Encore et toujours, le même rêve où il criait un prénom féminin à travers une forêt. Voilà des mois, qu'il fait le même rêve. À force, il l'a mit sur le compte de son détraqué de cerveau. Ses mains trembles. Il les observe quelques instants, ne se souvenant même plus de la dernière fois où ce n'était pas le cas.

Devant le miroir de sa salle de bain, il voit bien qu'il a pris du poids, mais il n'est pas question qu'il se pèse. Un brouhaha incompréhensible commence à s'emparer de ses pensées. À l'aide d'un cachet, il la chasse et va se doucher.

L'après-midi, il a la passe à trainer devant la télévision, sur les réseaux sociaux, à écouter de la musique et à s'essayer à quelques accords de guitare. Il attend que la luminosité baisse, pour faire sa sortie de la journée. Il préfère sortir à l'heure où les gens commence à rentrer, quand le soleil décline. Il se sent plus en sécurité à marcher seul, que quand les rues grouilles de monde. Le casque sur les oreilles, la Playlist dans la poche, il se dirige vers la forêt.

Le son à fond, il n'entends pas l'homme arriver derrière lui, une seringue à la main. En se débattant, il la voit apparaître distinctement devant lui, mais il sait qu'elle ne peut être là. Ce n'est pas lui qu'elle regarde, agenouillée. Alors, sans vraiment trop savoir pourquoi il cri son nom et tout devient noir.

Les clairvoyants Où les histoires vivent. Découvrez maintenant