blue eyes / n.g

twenty one

PDV Nash

Chloé est projetée par la voiture à une dizaine de mètres, je la vois voler, je l'entend crier. Je ne sais pas quoi faire. Je n'ai jamais vraiment compris la haine que je ressens envers elle.

Avant que sa tête ne frappe durement le sol, je croise son regard, pétrifié, on peut voir tellement de douleur et de haine. Ses yeux gris croisent les miens. Je ne peux m'empêcher de faire un sourire fier mais crispé.

Elana et les autres courent, moi, je reste là, cloué au sol, mon coeur bat vite, mes pensées se mélangent, mes lèvres tremblent.

Il y a des flashs, des bruits, je peux voir des gens courir partout, je peux voir le regard des autres sur moi. Plein d'amertumes. En même temps, je l'ai tuée, c'est à cause de moi si elle est maintenant dans un brancard, prête à aller à l'hôpital, c'est à cause de moi qu'Elana est à genoux, pleurant toutes les larmes de son corps.

Tellement de choses se passent, j'entends des bruits électriques, j'entends les battements de son coeur qui ralentissent, j'entends les lamentations douloureuses de sa mère qui chaque seconde me lance des regards noirs.

Je vois les policiers me regarder suspicieusement, à croire qu'ils allaient m'embarquer.

Je ferme les yeux et me laisse tomber au sol, les genoux d'abord, puis mon torse, mon cerveau refuse de m'obéir et de me relever.

Alors je me roule en boule et je pleure. Ce n'est pas la première fois, mais la dernière fois c'était lors de l'enterrement de Sophia, où je me suis promis de ne plus jamais pleurer pour une fille. Où je me suis promis de ne jamais aimer une fille, où je me suis promis de ne jamais faire confiance à une fille au risque qu'une vie se perde comme celle de Sophia.

Je n'ai pas envie de souffrir alors je fais souffrir les autres. Je n'ai pas envie d'aimer, alors j'haïs les autres.

C'est comme ça chez moi, je ne peux pas faire face à la réalité, alors je m'en crée une.

Je peux voir des ombres autour de moi, je lève les yeux et je vois un ciel sans étoile, pas une seule, comme si elles s'étaient éteintes à cause de moi. Je cherche et je croise le regard de Cameron. Il est impassible, il ne me réprime pas, il ne me jette pas des regards haineux, mais il ne me réconforte pas non plus.

J'entends des bruits sourds, des portes claquer et une ambulance partir.

Elle n'est plus là.

On me soulève et on me pose sur un banc, je croise mon propre regard dans une vitre de voiture de police, un regard froid, un regard sans émotion, un regard vide.

Je ne ressens plus rien, j'entends des voix, quelqu'un me parle, quelqu'un me tapote l'épaule mais je ne fais rien, je ne peux rien faire.

C'est bizarre, mes oreilles vibrent, il y a un son continu, un son inconnu, un son froid.

Je ne ressens plus rien.

Mes yeux se ferment, et je croise le regard de Chloé, encré dans mes pensées, dans ma mémoire, dans mon âme.

Son regard me brûlait les yeux.

Elle avait le regard d'une fille apeurée qui en avait marre de se battre,
et qui se moquait de mourir.