Partie 11

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Impatiente, les sourcils froncés, cheveux dégoulinants et toujours dans les vapes, elle souffla et prit le violet au hasard, voulant faire cesser toute cette mascarade. Elle voulut imiter grossièrement la voix à tendance mystérieuse ridicule du capitaine et demanda:

-Alors ? Ça veut dire que je vais affronter des requins ? Me faire manger par des tarentules ? Dites-moi, j’ai pris le violet ! Qu’est ce que ça peut bien dire ?

Le second se mit à rire dans sa barbe de ses grandes dents sales et lui répondit le plus calmement possible malgré sa voix enraillée.

-Le foulard dans ta main n’est pas violet gamine.

Elle le regarda de plus près et constata qu’en effet, il était bleu. Elle fut perdue une seconde, dans l'incompréhension la plus totale, le sang bouillant dans ses tempes.

-Partir en paix, chuchota-t-elle pour elle-même. A cet instant précis, elle ressentit un immense soulagement, comme si toutes ses peines s’étaient envolées d’un coup, elle fut délestée d'un immense poids. Elle allait enfin mourir, mettre un terme à tout ceci. Elle prit une longue inspiration, tentant de détendre chaque muscle de son petit corps. En une seconde, tout allait beaucoup mieux pour elle. Comme si elle n’y avait jamais pensé avant, Lilith se rendit compte que se laisser aller était en réalité la solution la plus simple et efficace. Sur le moment, elle ne sentit même pas qu'elle souriait légèrement.

Le capitaine avec son perroquet ridiculement empaillé sur l’épaule interrompit la jolie blonde dans ses pensées.

-Pouvons nous y aller? Je dois retrouver ma baleine dans exactement trente-quatre minutes !

-Comment ça ? Maintenant ? Mais vous allez faire comment ? Je veux dire… comment voulez-vous vous y prendre ? Même si elle était heureuse de ce choix, Lilith paniquait. Ce n’était pas anodin, deux pirates qui l’avaient pêchée lui disaient « maintenant on va te tuer ». Les yeux écarquillés, les poings serrés elle se demandait ce qu'elle aurait voulu faire avant de mourir.

Le bras droit se voulut rassurant et s’approcha doucement d’elle.

-On va simplement te noyer dans une barrique de rhum, ça ne va pas durer très longtemps et tu ne vas rien sentir, ne t’en fais pas !

Elle le regarda avec un peu d’appréhension, mais après tout c’était le choix le plus responsable. Alors, elle se laissa aller et suivit les deux gros bonhommes jusque sur le pont. Etonnement, il faisait nuit. Le Soleil avait laissé sa place à la Lune, l’âme de la mère des démons allait s’envoler sous le regard attendri des étoiles. Ses vieilles amies qui avaient essuyées toutes ses larmes et essorées ses peines.

Lilith se fit guider jusqu’à des barriques et le capitaine lui laissa le choix entre deux de celles-ci, ne s’y connaissant absolument pas en rhum, elle choisit celui qui sentait le moins fort. Le bras droit du capitaine lui fit une petite tape amicale sur le haut du crâne et la laissa s’avancer.

Elle mit sa tête dans le liquide d’elle-même, celui-ci lui brûla les yeux et elle tenta plusieurs fois de respirer le rhum pour en finir plus rapidement, sachant que ses poumons ne supporteraient pas un tel liquide. Pourtant, rien n’y faisait, elle n’arrivait pas à mourir, plutôt ironique comme situation. Alors elle ne bougeait pas, ses cheveux flottant divinement autour de son visage, des bulles remontant régulièrement, les joues gonflées, tandis que sa vision s'habituait, la laissant distinguer les tracés du bois et des clous.

Comme s’ils avaient lu dans ses pensées, les deux hommes l’aidèrent à s’enfoncer dans la barrique qui, elle, s’élargissait. Elle souffla de désespoir, les pieds maintenus en l’air, elle aurait simplement voulu que cette fois-ci, tout se passe normalement. Elle attendait patiemment depuis déjà une dizaine de minutes sans réussir à respirer, ni à asphyxier, pas même à se noyer. Et cela jusqu’à ce que les poignes autour de ses chevilles disparaissent en un battement de cil.

Elle s’attendit à se cogner au fond et ferma les yeux très fort, mais au lieu de ça, elle atterrit sur une surface molle et duveteuse. Lilith ne comprit pas, elle tâta rapidement son corps et ouvrit les yeux pour remarquer qu’elle n’était pas mouillée le moins du monde et que le décor atypique du bateau avait disparu.

Autour d’elle, des murs violet lilas décorés de vieux posters de boys band, un bureau en bois brut orné de toutes sortes d’objets pour travailler, des crayons, pinceaux et les œuvres d’art réalisées grâce à ceux-ci. La jeune fille se trouvait allongée sur un lit drapé de tissu blanc à fleurs.

C’était sa chambre.

1- Fuir de nouveau = Partie 14
2- Retrouver son père = Partie 15

Lilith & l'Enfer (CHOIX MULTIPLES)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant