Chapitre 2

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Lorsque j’ouvris les yeux, je vis un plafond et des murs jaunes que je ne reconnaissais pas. Mon mal de tête revint à la vue de la lumière, et l’envie de me rendormir aussitôt me prit. Je fermais mes yeux en grognant en me tournant dans le lit dans lequel j’étais confortablement allongée. Et évidemment, cette foutue mélodie était toujours là…

Quelques secondes plus tard j’ouvris à nouveau les yeux , et tombais nez à nez sur un autre lit, avec quelqu’un dedans aussi. Mes yeux commençaient déjà à s’habituer à la lumière, alors je commençais à me relever doucement en m’aidant de mon bras. J’arrivais après quelques secondes à me mettre en position assise. Mon regard se dirigea vers le lit en face et je vis mon frère, les yeux grands ouverts en fixant le plafond. Il avait l’air totalement perdu dans ses pensées.

Mais pourquoi il est là aussi ? Il... Il a fait un malaise aussi ?

« K-Kook ? » l’appelais-je

Il revint à la réalité et tourna sa tête vers moi. Ses yeux étaient mouillés, signifiant qu’il était comme sur le point de pleurer. Il reporta son regard sur le plafond.

Comment ça ? Pourquoi il pleurerait ? Pourquoi il ne m’a pas répondu ? Il… Il m’évite ? Est-ce que… il se doute de quelque chose ? Il ne me tournerait pas le dos si il le découvrait hein ?

Pas vrai ?

Jamais il ne me dénoncerait, hein ?
Après avoir reniflé, il se releva à son tour et s’assit sur le bord de son lit, la tête toujours basse. Il se frotta les yeux, et remonta son visage vers moi, un sourire qui se voulait rassurant aux lèvres.

« Je m’en veux d’avoir autant stressé hier soir maintenant. Dit-il en riant tout doucement, presque faussement

-Moi aussi… Mais ça va ?

-Oui ça va mieux, t'inquiète pas… On a loupé nos 2 derniers cours, et Maman va venir nous chercher. » Me répondit-il

On a loupé nos cours ?! Merde. Ça ne va pas dans notre sens ça… Après j’ai déjà entendu que les malaises dus au manque de sommeil ou au stress aux alentours du 16ème anniversaire sont fréquents, alors c’est pas catastrophique…

Attendez…

« Pourquoi Maman n’est pas là si on est là depuis 2h déjà ? Et on est bien à l’infirmerie, hein ? » Lui demandais-je

Il baissa à nouveau la tête, ses mains accrochant brièvement le matelas sur lequel il était assis.

« Oui oui, on est bien à l’infirmerie. Et... »

Il s’arrêta et prit une profonde inspiration avant de lâcher la bombe.

《On a rendez-vous chez le proviseur.》

A ces mots je me figeais. Rendez-vous chez le proviseur ? Pourquoi ? Il a déjà des doutes ? Qu’est-ce qu’il va se passer ? Ça va pas quand même déjà être la fin pour moi. Pour les gens qui sont suspectés, il y a des rumeurs qui parlent de torture pour leur faire admettre la vérité. Je ne veux pas ça. Non non, je ne veux pas subir de torture. Et... Et je suis trop jeune pour mourir, hein ?

Ma respiration commença à s’accélérer sans que je ne puisse rien contrôler, et des larmes commencèrent à se former dans mes yeux. La peur commençait à me prendre aux tripes.

En entendant ma respiration se désordonner, Jungkook releva sa tête vers moi et me vis paniquer. Il se leva rapidement, en chancelant car il était encore un peu faible, et vint jusqu’à moi pour ensuite me prendre dans ses bras. Je me réfugiais immédiatement dans son cou, et inspirais son odeur qui était synonyme de sécurité et de confort pour moi.

Depuis que j’étais petite, lorsque je pleurais il me faisait un câlin et je me réfugiais toujours dans son épaule ou son cou. C’est là où je me sentais le mieux, j’avais l’impression d’être protégée du monde entier, cachée dans ses bras. Et en étant cachée je pouvais pleurer autant de temps que je le voulais, personne ne me voyait.

Mais pas aujourd’hui.

Aujourd’hui je n’avais pas le droit. Parce que tout le monde avait ses yeux rivés sur moi.

Alors je pris plusieurs longues et profondes respirations afin de me calmer. Paniquer ne te mènera à rien, June. Tout ce que ça t’apportera c’est de te faire suspecter, rien d’autre. Alors reste calme et forte encore juste un peu pour aujourd’hui. Quand tu rentrera tu pourra exploser. Mais pas maintenant.

Alors ma respiration se calma et je me retirais rapidement de l’étreinte de mon frère. J’essuyais rapidement les larmes qui avaient réussies à s’échapper de mes yeux et revêtis mon masque.

« C’est bon, ça va merci ! Lui dis-je en souriant

A ce moment-là, on s’est regardé réellement dans les yeux pour la première fois de la journée. Et j’ai ressenti un truc. On a toujours eu tendance à se comprendre d’un seul regard, mais là... C’est comme si il était si loin de moi alors que j’étais dans ses bras. C’est sûrement dû au fait que je lui mens depuis ce matin, et que je le ferais pour le reste de ma vie… Je m’en voulais de briser la promesse que l’on s’était faite hier soir, mais je n’avais pas le choix…
J’ai beau toujours avoir eu une confiance aveugle en lui depuis ma naissance, je savais que c’était la seule chose que je ne pouvais pas lui dire, et que je ne pourrais dire à personne d’ailleurs…
Lorsque cela concernait la non-hétérosexualité, l’anormalité, le sujet était non seulement tabou et haï, mais des récompenses énormes étaient données aux gens qui les (Il faut que je dise ‘nous’ maintenant ?) découvraient, et tout le monde sait que l’appel de l’argent est toujours plus fort que l’amour de qui que ce soit. Alors on ne pouvait faire confiance à personne : ni à nos parents, ni à nos frères et sœurs, ni à nos meilleurs amis.
On était vraiment seuls dans cette merde…

« June… commença-t-il d’une petite voix, comme si il allait se briser

-Ah ! Vous êtes debout les enfants ! Comment ça va ? Vous nous avez fait une belle frayeur ! l’interrompit l’infirmière, qui entrait dans la pièce avec une joie presque agaçante

-Oui tout va bien madame. Et je suis désolée, j’aurais dû dormir plus cette nuit, mais vous savez… Avec le stress on a eu du mal… lui répondis-je, alors que j’avais senti mon frère se raidir à l’entente de sa voix

-Oui je m’en doute ! Mais ce n'est pas grave, vous allez mieux dormir cette nuit, n’est-ce pas ? »

J’en suis pas tout à fait certaine.

« Oui, bien-sûr ! Lui répondis-je tout de même

-Bon alors je vous ai apporté un jus de fruit et quelques gâteaux chacun, pour que vous repreniez des forces, d’accord ? Le proviseur ne devrait pas tarder à vous faire venir, alors dépêchez vous de vous requinquer. »

Elle nous tendit ses briquettes de jus de fruit et 2 paquets de gâteaux individuels. Nous la remercions et prîmes les gâteaux avec nous. Elle ressortit alors de la pièce en fermant la porte derrière elle, et nous avons silencieusement commencé à manger et boire, côte-à-côte mais en sentant toujours cet immense fossé.

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Nous étions assis sur les chaises devant la porte du proviseur, toujours aussi silencieux. Pour ma part mon regard était dirigé directement sur le carrelage devant moi, et ma jambe tressautait. J’étais en train de rassembler toutes mes forces pour me concentrer pour ne pas rater cette sorte d’entretien. C’était le plus gros challenge que j’ai dû affronter depuis ce matin.

Allez tu va y arriver, il faut que tu réfléchisses vite à tes réponses, mais il ne faut pas répondre trop vite, sinon ce sera suspicieux. N’oublies pas que c’est normal de s’évanouir, tu n’a pas dormi longtemps cette nuit, et officiellement tu as dormi 2h. Ce n’est qu’une visite de contrôle pour te tester, pour voir si tu es assez forte. Et comme tu es forte, tu va y arriver !

Je pris une grande inspiration avant d’expirer lentement. Je relevais mon regard déterminé sur le mur en face. Un petit sourire s’installa sur mes lèvres.

Ça va le faire.

C’est la dernière pensée qui a put me traverser l’esprit avant que la porte du bureau du proviseur ne s’ouvre. Une sorte de sourire, qui paraissait totalement faux, ornait ses lèvres lorsqu’il fit son apparition devant nous.

« Bonjour. Je vais vous recevoir individuellement. Mademoiselle June, voulez-vous bien me suivre dans mon bureau ? »

J’hochais doucement la tête, puis me levais pour le suivre, avec un sourire poli sur les lèvres. Lorsque le proviseur eut le dos tourné, je me retournais vers mon frère, qui me regardait déjà, une lueur étrange dans les yeux. Je lui fis le sourire le plus rassurant que je puisse faire, en espérant qu’il paraisse sincère, et qu’il fonctionne.
J’entrais alors dans le bureau du proviseur. Je n’y étais jamais allée avant, alors je me mis à détailler sa décoration. C’était assez simple, pas vraiment comme je l’imaginais. Il y avait un bureau au centre de la pièce avec 2 chaises, qui semblaient au premier coup d’œil assez confortables. Sur les murs autour se trouvaient de grandes étagères, contenant le dossier de tous les élèves du lycée, classés dans l’ordre alphabétique. Tous les échecs et les réussites des lycéens de cet établissement étaient donc répertoriés dans cette pièce... Une fenêtre éclairait l’endroit, le coucher du soleil rendant le moment presque chaleureux, si on oubliait la raison de ma présence ici.
Le bruit de la porte qui se fermait derrière moi me sortit de ma contemplation, et le proviseur se posta derrière son bureau, m’invitant à m’asseoir.

Un nouvel acte de cette journée commençait.

« Tout d’abord, joyeux anniversaire June, je vous souhaite une nouvelle année remplie de bonheur et de réussite.

-Merci monsieur. Lui répondis-je avec un sourire poli

-Si je vous ai demandé de venir aujourd’hui, c’est parce que j’ai eu vent de votre malaise, et de celui de votre frère. Vous allez mieux ? Demanda-t-il, avec un ton plutôt hypocrite, vainement dissimulé derrière un sourire

-Oui monsieur, ça va beaucoup mieux, merci.

-Très bien, vous m’en voyez ravi. Bon, comme tu dois le savoir, le jour de notre 16ème anniversaire, nous découvrons notre sexualité. Si tu es normale, tu passes une journée d’anniversaire ordinaire, tandis que si tu es homosexuel, ou autre, tu passes toute une journée avec une mélodie coincée dans la tête. Alors, par pure curiosité, j’aimerais te poser une petite question. Est-ce que tu entends cette mélodie, June ? »

Je devais avouer que j’étais très surprise par sa question, je ne pensais pas qu’il allait la poser directement comme ça. Et il se met à me tutoyer maintenant.

« Non monsieur, je n’entends rien.

-Très bien, tant mieux pour toi. Et tant mieux pour nous tous aussi. Tu dois sûrement le savoir aussi, mais ces gens sont vraiment dégoûtants. Ce sont pour la plupart des criminels. Mais ce n’est pas de leur faute, c’est la mauvaise éducation de leurs parents. Imagine apprendre à ton enfant, la chair de ta chair, que c’est normal d’aimer des personnes du même sexe. Inimaginable pour moi. Et je pense que les pires c’est les personnes qui les protège. Tu te rends compte qu’il y a des personnes qui sont au courant des atrocités qu’ils font et qui les garde quand même, sous prétexte que c’est leurs enfants, leur frère ou sœur, ou leur ami ? Je ne pourrais pas vivre sereinement en sachant que je laisse un proche se bousiller la vie comme ça... Tu ne trouve pas ça bizarre, toi ? »

L’expression de dégoût qu’il portait durant son discours me donna envie de pleurer. Je n’ai rien demandé moi… Et mes parents m’ont très bien éduquée… Enfin, comme les autres enfants il me semble...

« Oui je suis d’accord avec vous, monsieur. Mes parents m’ont dit la même chose, et ils m’ont aussi appris que si j’apprenais qu’un de mes camarades était une de ses personnes, il fallait que je leur dise et que j’arrête de les fréquenter. »

Et c’était vrai. C’est ce qu’on apprend à tous les enfants dès le plus jeune âge. Heureusement l’occasion ne s’est jamais présentée à moi.

« Et ils ont bien fait de te dire ça. Ça t’est déjà arrivé d’avoir un proche comme ça ?

-Non, ça ne m’est heureusement jamais arrivé, pour le moment, du moins.

-Et si ça devait t’arriver, tu dénoncerais la personne ?

Jamais.

-Je pense oui. »

« Bien. Si tu le faisais, je serais fier de toi, tes parents et ton frère aussi, et même la société en général. Tu ferais partie des héros de la nation. »

Plutôt crever.

Et j’avais tellement envie de lui crier. Parce que ses mots m’avaient blessés. Il m’aurait dit ça hier, je l’aurais peut-être cru, mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui ses mots me blessent. Mais c’est sûrement la vérité, après tout...

Il n’y a que la vérité qui blesse, non ?

« Bon, j’espère que cette journée n’a pas été trop dure, mais heureusement c’est le week-end, tu va pouvoir te reposer et fêter ton anniversaire avec tes proches !

-Oui, après cette nuit, je vais avoir besoin de repos !》 Ris-je faussement

Il joint son faux rire au mien. Puis il claqua ses mains, ce qui me fit un peu sursauter.

« Bon, je pense que nous avons fini notre petite discussion pour aujourd’hui. A moins que tu aie autre chose à me dire ?

-Non, monsieur, je n’ai rien à ajouter. »

C’est alors que je me levais et que l’on s’échangea des marques de politesses. Avant que je sorte de la pièce et que mon frère y entre il me dit une phrase qui resta coincée dans mon esprit.

« Fais attention à toi, il y a des yeux et des oreilles de partout. »

Un regard avec mon frère.

Une expiration forcée.

Et une montée d’adrénaline.

Qui n’est jamais vraiment redescendue.

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Après L'entretien de Jungkook avec le proviseur, notre mère est venue nous chercher, et nous sommes rentrés. Je me suis directement dirigée vers ma chambre pour me reposer. De base, je voulais vraiment dormir, mais finalement je m’étais retrouvée à fixer mon plafond en pensant à tout ce qu’il s’est passé aujourd’hui.

Déjà, j’entends cette mélodie. Ça veut dire que je ne suis pas hétéro.
Je suis soit lesbienne, soit bisexuelle, soit asexuelle. Seul le temps et de la réflexion sur moi-même me donnera la réponse, je suppose.

Ensuite, j’étais seule dans cette merde. Le destin m’a choisie pour vivre ça. Mais la question était : est-ce que j’avais vraiment envie de vivre ça ? Je veux vivre, je veux voir ce que la vie a à m’offrir, je veux vivre, être heureuse… Mais est-ce que je le méritais vraiment ? Est-ce que cette mélodie n’est pas le signal que je n’étais qu’un accident ? Que… Que je n’aurais pas dû vivre ?
Le proviseur l’a lui-même dit, les personnes qui entendent cette mélodie sont nocives à la société, ils sont même des criminels ! Je ne veux pas devenir comme ça… Je ne veux pas devenir une criminelle…

Mais d’ailleurs, en quoi une simple mélodie nous ferait devenir des criminels ?
C’est insensé quand on y pense…
Mais je suppose que cela fait partie des choses que la science ne peut pas expliquer…

Cette journée ressemble à une pièce de théâtre grandeur nature, qui a commencé dès que j’ai ouvert les yeux ce matin et qui ne finirait que lorsque je les refermerait ce soir. Chaque acte a eu son importance : faire bonne figure auprès de ma famille et de mes amis étant le premier.
La première impression était toujours la plus importante. Je me devais de paraître heureuse. Alors porter un sourire toute la matinée était important. Dans l’idéal, j’aurais voulu le porter toute la journée, et j’ai essayé, mais je suppose que ça m’a coûté trop d’énergie…
J’avais déjà remarqué lors de l’anniversaire de mon meilleur ami qu’aucune question n’était posée sur cette mélodie. Vraiment aucune. Les gestes devaient parler. Tout reposait sur mon apparence, et mon apparence seule. Alors j’avais fait au mieux pour cacher mes cernes, et garder bien en place mon masque. C’était le seul jour où il ne pouvait pas se briser.

Le deuxième acte de la journée était un jeu de concentration. Je n’ai jamais eu à être autant concentrée qu’aujourd’hui. Aussi bien en cours pour répondre aux questions des professeurs qu’avec mes amis. Je ne pouvais me permettre aucune erreur. Si il devait y avoir une erreur dans mes mensonges, ou dans mes sourires, tout autant que mes réponses en cours, je serais en très mauvaise position. Comme si j’étais sur une scène de théâtre, tous les yeux étaient rivés sur moi, sur chacun de mes faits et gestes. Aucune erreur de script ne peut être tolérée.

Une erreur coûtait notre renvoi de la troupe d’acteurs. Un renvoi de la société. Un renvoi de la vie elle-même, nous plaçant entre les mains de sa sœur la mort.

Le troisième acte n’était pas sensé exister, mais le destin avait visiblement besoin d’une petite distraction. J’étais sensée rester concentrée, mais un changement de script de dernière minute m’est tombé dessus. Littéralement. Et sur mon frère aussi, visiblement. Je ne lui avait même pas demandé quand il s’était évanoui… Je… Je deviens une mauvaise sœur ? J’espère que non...
De mon côté, heureusement que Jimin avait été là pour me rattraper dans le couloir. Il n’a pas eu l’occasion de me poser des questions sur mon état, même si je ne pense pas qu’il en aurait posé. Quelque part au fond de moi je m’en voulais de lui avoir menti, même si en soi c’était un tout petit mensonge… Mais c’était parce que je savais que ce serait le premier d’une longue série.

Moi qui détestait mentir, je devais être condamnée à mentir toute ma vie ?

Mais la question était : Est-ce qu’il se doutait de quelque chose maintenant ? Déjà ce matin il a vu que je me perdais dans mes pensées, et ce midi il avait dit ce « je vois » que je ne sais toujours pas comment interpréter, et maintenant il m’a vue m’évanouir… Est-ce que c’était lui qui était allé le dire au proviseur ? Non, il ne ferait pas ça, hein ? Il avait toujours promis de nous protéger, non ? Mais…

Mais on ne peut avoir confiance à personne dans ce cas là.

D’ailleurs je me demande toujours pourquoi je cherche à me cacher… Est-ce que c’est parce que je sais qu’ils se cachent tous ? Alors j’ai fait pareil ? Mais est-ce que ce serait pas mieux si je dénonçais et que je me faisais soigner ?

Mais c’était peut-être aussi mon instinct de survie… Ces rumeurs sur la torture, et tout ce qu’il se passe dans ces camps... Les camps que le gouvernement a mis en place pour nous faire redevenir hétéro font vraiment peur... Personne ne sait réellement ce qu’il se passe dedans, mais ce n’a pas l’air bien... Et honnêtement je ne veux pas savoir ce qu'il s'y passe...

Le quatrième acte de la journée c’était quand je suis entrée dans le bureau du proviseur. Cet acte a peut-être été le plus stressant et le plus bouleversant de toute cette pièce. Tout ce qu’il a dit sur moi, sur les gens comme moi. Rien que cette formulation était bizarre : les gens comme moi… Étions-nous vraiment comme il nous présentait ? Des criminels ? Des mal-éduqués ? Des personnes qui commettent des atrocités ? Ça faisait vraiment peur à entendre… J’allais devenir comme ça moi aussi ? Ses mots m’avaient blessés, mais j’avais aussi été en colère. Quand il m’avait demandé si j’allais dénoncer une personne qui avait entendu cette mélodie, un des… miens ? A ce moment-là j’avais cru voir rouge.
Mais c’était envers moi-même. Parce que si avant aujourd'hui j’avais rencontré une personne comme moi, je l’aurais probablement dénoncée. Parce que c’est ce qu’on m’a dit de faire depuis que j’étais petite. J’ai été conditionnée, comme les autres enfants, à dénoncer sans pitié. Et rejoindre les rangs des ‘héros de la nation’.

Mais plus aujourd’hui. Aujourd’hui, j’ai appris à quel point c’était compliqué de survivre avec cette mélodie. Même après une seule journée. Alors je n’imagine même pas ce que se serait plus tard...
C’est amusant non ? Une mélodie, la musique, ce n’est pas sensé apporter de la joie et de la sérénité ? La musique est un outil universel, sans aucune barrière qui rapproche les personnes, qui les fait bouger, qui les fait sourire, pleurer, rire. La musique est une fontaine à émotions. Souvent à émotions positives… Et pourtant…
Et pourtant cette mélodie là ne m’a apporté que du malheur, du stress, de la colère, de la souffrance, et elle m’a éloignée des gens que j’aime. Tout ça en une seule et unique journée.
En une seule journée, ma vie était passée de parfaitement normale, à un jeu de survie. En mode difficile.
Et la dernière phrase que le proviseur m’a adressée ne fait que prouver ça. « Il y a des yeux et des oreilles de partout ». Je savais que durant cette journée tous les regards seraient tournés sur moi, ce n’est pas un secret, j’avais moi-même déjà fait partie de ces yeux-là, alors pourquoi me dire ça ? J’ai retourné la phrase dans tous les sens pour y trouver une signification cachée ou quoi que ce soit, mais… Tout revenait au fait que je serais épiée 24h/24 et 7j/7… Pas seulement aujourd’hui, mais les autres jours aussi… Mais ça n’avait aucun sens hein ? Comment je pourrais être épiée ? Comment c’est possible de créer un tel dispositif ?
Il a probablement dû dire ça pour me faire peur ou je sais pas quoi… Enfin, c’est ce que j’espère...

Et le cinquième acte… Et bien, cet acte n’a même pas encore commencé.

《 À table les enfants !》

Oh ! Et bien il commençait maintenant.

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Coucou ! 

Je viens juste écrire un petit mot sur ce chapitre. Le personnage principal ne connaît pour le moment que 4 sexualités : hétérosexuel, homosexuel, bisexuel, et asexuel, et c'est 'normal' puisque dans la société où elle vit c'est un sujet totalement tabou, donc il n'y a aucune information sur les autres sexualités. C'est les seules que leur gouvernement reconnait.

Voilà pourquoi il n'y a que celles-là de mentionnées, pour le moment du moins ;)

Et par la même occasion : si vous voyez ce message, j'espère que vous prenez bien soin de vous-même, c'est important !!

A bientôt j'espère !

Save usOù les histoires vivent. Découvrez maintenant