Chapitre 5

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Dès que Jimin fut installé, Seokjin démarra sa voiture. Son frère tremblait, il lança rapidement le chauffage.

" - Alors Minie, comment s'est passé cette première journée ?" entreprit de demander Seokjin. Il était réellement curieux de savoir comment se sentait Jimin. Il voulait être capable de l'aider en toutes circonstances.

" - Hum, c'était plutôt ennuyant, les profs nous ont rabâchés les mêmes choses que les années précédentes."

Jin se mit à rire en tapotant le volant.

" - C'est ce qui ne me plaisait pas avec cette université ! Et comment vont Taehyung, Hoseok et la petite...comment s'appelle-t-elle déjà ? "

" - Ae-cha. Tout le monde à l'air de plutôt bien se porter. Ils m'ont tous raconté leurs vacances de février, ils se sont vraiment amusés !"

Jimin émit un rire nerveux avant de regarder la route. Lui aussi avait passé de bonnes vacances : entre les réunions de gestion d'entreprise avec son père et les repas de famille, c'était l'extase ! Jin profita d'un feu rouge pour observer le visage fatigué de son frère. Il cherchait à trouver un sujet de conversation quand Jimin prit la parole.

" - Et toi comment cela se passe dans ta boutique ? JinxJIN à l'air de faire fureur à l'université, j'ai vu beaucoup de jeunes avec votre marque !"

"- Oh oui, on a trouvé de nouveaux investisseurs et les dernières collections ont été vendu comme des petits pains !"

Jin avait arrêté les études d'économie pour suivre son rêve : diriger sa propre boutique de vêtements. Et ses efforts ont porté leurs fruits : en un an, le magasin avait su s'imposer parmi les nombreuses échoppes de la capitale malgré l'importante concurrence.

Le reste du chemin se passa dans un semblant de calme. Jin ne voulait pas en rester là. Il devait le faire, il devait engager cette conversation, même s'il en craignait toujours les conséquences.

" - En fait, je voulais te dire que je suis vraiment fier. Je te trouve beaucoup plus rayonnant qu'il a plusieurs semaines. Tu manges à nouveau normalement et je te vois sourire plus souvent. Cela me fait du bien de voir que mon petit Jimin est en train de revenir !"

Jimin se tendit mais sourit sincèrement. Jin avait vu. Jin avait remarqué à quel point il essayait de faire des efforts. Il avait vu que la douleur en lui avait peu à peu été réduite à un sentiment de vide qui finira lui-même par disparaitre un jour.

" - Oui, je pense que je suis en train de tourner la page, je me sens beaucoup mieux qu'il...qu'il y a six mois."

" - Je vois ça et j'en suis sincèrement heureux. Lee-tuk n'aurait pas voulu te voir te morfondre. C'était un bon garçon, on l'aimait beaucoup. Mais il voudrait que tu puisses aimer quelqu'un d'autre et vivre dans le bonheur."

"- Je ne suis pas encore prêt à aimer quelqu'un d'autre. J'ai toujours l'impression de le voir partout. Il n'a jamais disparu, il est toujours là...dans mon cœur."

"- Je sais Jimin. Tu ne dois pas l'oublier, tu dois juste le garder quelque part dans ta tête. Quand tu penses à lui, les souvenirs douloureux doivent se transformer en réminiscences affectives."

Jimin hocha la tête et sourit en regardant à nouveau dehors. Il s'en sortira, il oubliera. Il a juste besoin de temps.

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Allongé dans son lit, douché et prêt à se coucher, Jimin rêvassait. Sa mère était passée plus tôt pour discuter avec lui autour d'appétissants cookies. Comme toujours, elle lui avait apporté ce confort maternel dont il avait tant besoin. L'oiseau nécessite l'amour de sa mère avant de sauter du nid. Si Jimin essayait maintenant de s'envoler, il s'écraserait la tête au sol. Il devait attendre, il devait être prêt.

Il avait surtout eu besoin de ce support lorsqu'il a tout perdu il y a six mois. Sa mère était dans la même pièce que lui lorsque la police l'appela pour lui annoncer que la voiture de Lee-tuk avait sombré dans l'un des gouffres d'une dangereuse route alors qu'il rentrait de Daegu. Après ce tragique appel téléphonique, Jimin était passé par tous les états possibles : il n'avait d'abord pas voulu y croire et hurlait au mensonge. Pour lui, Lee-tuk allait passer sa porte d'un moment à l'autre. Quelques semaines plus tard, il s'était fait une raison : son chair et tendre ne reviendra pas. Alors, il s'était senti mourir, son corps bouillait de culpabilité. Il n'aurait jamais dû le laisser partir à Daegu pour l'un de ses événements intellectuels inutiles ! Il aurait dû être avec lui et le prévenir de s'endormir au volant ! Il avait tant hait Lee-tuk pour l'avoir abandonné et avait hait le ciel pour lui avoir pris celui qu'il aimait. Par la suite, il avait demandé qu'on échange la vie de Lee-tuk contre la sienne. Sa vie ne comptait pas si Lee-tuk n'en faisait plus partit.  Pendant des mois, il traversa la longue étape de la dépression et du chagrin. Regret, mélancolie, frustration : il a fait face à ses propres démons pendant bien trop longtemps. Ils n'ont jamais pu faire de vraies funérailles parce que l'engin avait pris feu et qu'il ne restait malheureusement plus rien du corps de son petit ami. Le deuil était donc bien difficile et le chemin de l'acceptation avait été très long. Ce n'est que très récemment qu'il a commencé à l'admettre et à se reconstruire. Il comprend qu'il ne peut rien y faire et doit apprendre à revivre. Jimin est conscient que sans ses nombreux proches, le parcours du deuil aurait été beaucoup plus long. Et il leur sera toujours reconnaissant pour cela. C'est alors sous les yeux attendris de ses parents, cachés derrière l'ouverture de la porte, que Jimin rejoignit pour la première fois un monde sans douleur, sans peine et sans remords. Dans le monde des rêves, Jimin était libre.

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Trois ombres observaient une grande bâtisse. La nuit était tombée et leurs présences étaient plutôt angoissantes. Ils étaient là, habillés de noir, sacs de sport à la main à rentrer dans le jardin d'une demeure abandonnée. L'un, plus grand que les autres, prit la parole.

" - C'est donc ici que ce connard vivait ?"

Un plus petit hocha la tête.

" - Ouais, il a vécu ici pendant deux ans. Je n'ai pas trouvé son ancienne adresse, je n'ai que le moment où il s'est installé ici. C'est la seule piste que nous avons."

Un rire féminin coupa l'harmonie masculine et une voix ironique se joint à leurs messes basses :

" - On peut dire qu'il savait se mettre bien. Se loger ici doit coûter un bras."

Ils chuchotaient dans une langue inhabituelle pour ce grand pays asiatique. Leurs voix n'étaient que des murmures fantomatiques qui s'échouaient sur le mur en brique de la maison. Il n'y avait aucune lumière dans la grande demeure, témoignant donc de son inhabitation. D'ailleurs, la jeune femme se pencha vers une petite pancarte qui indiquait que le terrain était en liquidation. Elle se retourna vers le plus petit et bougea ses jolis petits morceaux de chair :

" - Qu'as-tu trouvé sur cette demeure, Yoongi ?"

Celui-ci la rejoignit. Il avait un sourire malveillant aux lèvres.

" - Vous n'allez pas le croire !"

Le second garçon, aux grandes cernes cachées sous l'ombre de sa casquette, tourna la tête vers lui et l'incita à continuer.

" - J'ai longtemps cherché des traces sur la propriétaire et les autres locataires. Je voulais les interroger sur lui mais je n'ai rien trouvé. En fait, lorsque j'ai fouiné sur la personne qui avait acquis le bâtiment avant la disparition de notre cible, j'ai découvert que le logis entier avait appartenu à un certain...attention retenez vos souffles... Macbe Leetuk ! De plus, j'ai fouillé partout mais je n'ai pas trouvé aucune empreinte de Jihoon Yeon sur les dossiers coréens. Ce garçon n'existe plus. "

" - Non vraiment ? C'est...c'est incroyable ! Que sait-on des autres locataires ? L'annonce dit bien qu'on recherchait trois locataires ? "

" - C'est vrai. Mais je n'ai rien trouvé. Pas de nom, pas de visage, rien. Ils se sont volatilisés en même temps que lui. Ce Leetuk vivait avec des fantômes."

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Le Menteur et L'Arnaqueur -jikook-Où les histoires vivent. Découvrez maintenant