Monster - Rebirth

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Bonjour ! Voici du RimbaudxVerlaine pour ce second jour ! Bonne lecture !

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Paul avait souri. Arthur s'en souviendrai encore des années plus tard. Ils avaient réussi à accomplir leur mission, ils avaient dérobé Arahabaki. Ou du moins l'artefact dans lequel le dieu de la destruction était scellé.

Après des mois de dur labeur et après avoir tant de fois risqué leur vie, il sont libérés de leur mission. Ils peuvent rentrer chez eux, en France. Ils vont enfin vivre une vie moins risquée, ils reverront leurs familles, leurs amis. Et surtout, Arthur se sent pousser des ailes à l'idée qu'il pourra vivre avec Paul. Son amant lui a promis quelques jours auparavant d'abandonner son poste d'espion clandestin en même temps que lui pour consacrer sa vie à leur amour. Il lui a même dit qu'il le présenterait à sa famille dès leur retour triomphal au pays. Après tout, plus rien ne les retient. Ils sont libres ! Arthur a envie de le crier au vaste Océan Pacifique qui leur fait face. Malgré ses trente ans passés, il a envie de courir sur le sable, sa main dans celle de Paul, de danser, de chanter. Son cœur est prisonnier d'une douce chaleur. Tout lui paraît terriblement envoûtant et réconfortant. Ce serait parfait si Paul pouvait lâcher Arahabaki pour venir l'enlacer, l'embrasser, sur cette plage étrangère où leur amour pourrait enfin vivre. Il le voulait tant. Et pourtant, quand il se tourne vers lui, il peut voir une lueur inconnue dans les yeux du bon Paul Verlaine. Cela ressemble à de l'avidité. Et Arthur lui trouve un air de serpent couvant du regard un trésor, obsédé par ce dernier. Il ne le regarde pas. Il ne l'entend pas. Ce maudit objet l'emmène trop loin d'Arthur qui a envie de le lui arracher des mains pour le jeter dans l'océan. Il est pris du désagréable sentiment d'avoir échoué dans sa protection de Paul. Que plus rien ne sera comme avant.

Rimbaud ne veut pas perdre Verlaine. Alors il vient le voir, pose sa main sur la sienne. Paul, son Paul, lève sur lui des yeux écarquillés, comme s'il se souvenait tout juste de sa présence. Et Arthur a l'impression de le redécouvrir. Qu'une facette de son amant vient de prendre le dessus, une part de lui qu'il ne connaît pas... Et que son instinct lui dicte de fuir au plus vite.

L'homme est une bête avide et cruelle. Elle ment, en plus de tous ses autres défauts. Elle oublie et pardonne selon ses désirs égoïstes. Les hommes se livrent au plus offrant, et sont en perpétuelle quête de reconnaissance. En même temps, ils ne vivent que pour eux. L'être aimé peut-il être une exception à cette triste vérité ? Qu'Arthur aurait aimé qu'il en soit ainsi...

Paul a changé après leur mission. Il sort moins souvent avec lui, garde Arahabaki en sa possession, médit sur leurs supérieurs, leurs collègues. Les reproches se font plus courants. Arthur sent son amour s'éloigner. Les disputes deviennent fréquentes. Et la bombe explose. Paul ne veut plus rentrer en France. Plus le présenter à sa famille. Il veut être à son propre compte, sans personne pour remettre ses paroles en question. Celui qui paraissait si sage autrefois explique à son compagnon que si ses paroles lui déplaisent il peut le quitter. Que fuir ne serait que la preuve qu'il ne mérite pas son amour. Il n'a qu'à lui faire confiance après tout. Cela est bien la moindre des preuves d'amour qu'il peut lui offrir, non ?

Et à chaque fois que les deux espions s'enlacent, que les mains de Paul caressent les longs cheveux du brun, Arthur peut sentir le regard de son amant se poser sur la sphère dans laquelle réside le Dieu du Chaos qui éclaire la pièce de sa sinistre présence.

Arrive toutefois le moment où les belles paroles de Paul ne peuvent rassurer Arthur. Les objets ont volé. Ils se sont hurlés dessus. Paul ne criait presque jamais avant. Il a répondu en criant lui aussi. Leurs traits déformés par la colère, leurs âmes hurlaient de détresse. Puis le coup part tout seul. Les yeux d'Arthur expriment successivement mille émotions : le choc, l'incompréhension, la colère, le doute,... Ceux de Verlaine s'écarquillent. Il regrette. Il aime Arthur, comment a-t-il pu lui faire ça. D'eux deux, il est définitivement le plus amoureux. Alors pourquoi ? Il bafouille. Son amant ne répond pas. Puis, il lui adresse un regard désolé et part dans leur chambre récupérer un pull, son chapeau et son manteau avant de descendre à la réception de leur hôtel.

Paul reprend ses esprits. Sa colère et sa soif de pouvoir s'évanouissent, sa tristesse et sa passion pour le poète reprennent le dessus. Il faut qu'il le rejoigne. Vêtu d'une simple chemise, sans manteau, il se lance à sa poursuite. Puis il se rend compte d'un détail en passant dans la pièce commune. Arahabaki n'est plus là.

Au bord de la falaise, Arthur hésite à jeter à la mer la source de leurs souffrances. Tout serait alors terminé. Il pourrait retrouver son Paul. Le Paul qui l'avait séduit et emmené avec lui dans ce pays lointain, lui murmurant des mots doux et ronronnant dans ses bras. Le Paul qui s'était dit prêt à tout quitter pour lui. Et pourtant, cette époque pleine d'insouciance lui semble si loin. Il prend son élan, sert son poing. Puis, il ressent une pulsion meurtrière qui le fait reculer tout en se baissant. Il a failli mourir, poignardé par un pouvoir. On a tenté de le tuer. Paul, le visage en sueur et les yeux déments, un rictus sordide aux lèvres, a tenté de le tuer.

"Rends-le-moi Arthur. Rends-le-moi. Rends-le-moi !"

Ces paroles sont hurlées à la lune. Rimbaud esquive, n'ose attaquer son amour. Mais ce n'est plus Paul qui est en face de lui. C'est quelqu'un d'autre. Qui veut le tuer pour récupérer le Dieu maudit qu'ils ont dérobé. Un coup de lance donné par Verlaine près de sa jugulaire active ses réflexes d'espion. un simple réflexe. Puis du sang. Verlaine qui titube. Le pouvoir d'Arthur qui le retient prisonnier, au dessus du sol. Une partie de la falaise qui s'effondre, celle au dessus de laquelle Verlaine se trouve. Arthur qui ne s'en rend pas compte, perdu dans la contemplation du sang s'échappant de la paie béante ouvrant la poitrine de l'autre homme. Il ne contrôle plus son pouvoir. Et sans aucun contrôle sur son corps, il voit la barrière dorée s'évaporer, laissant tomber dans l'océan immense la grande carcasse de Paul.

Arthur suffoque. Il a mal, il fait si froid dans sa poitrine d'un coup. Il a mal. Il a mal de Paul. Il ressent un manque abominable, se voit pris d'hallucinations. Ses poings serrent le pull qu'il porte jusqu'à l'en déchirer. Un pull vert forêt avec un arbre noir sur lequel deux oiseaux sont perchés. Un pull de Paul qu'il a mis avant de quitter leur chambre pour se redonner contenance. Son esprit est brouillé. Puis une voix dans son crâne réclame vengeance.

Il s'approche de Arahabaki, le saisit et le serre de toutes ses forces, le regard fou. Il veut détruire cette chose qui a transformé son amour en monstre. Il n'a pas assez de force en cet instant. Alors il prend la route jusqu'à un endroit sans valeur où personne ne viendra le déranger. Au milieu d'un bidonville désert, il saisit un poignard caché dans sa poche et bande ses muscles. La lame, toutefois, s'arrête à quelques centimètres de l'objet. Et Arthur pleure de frustration. Lâche son arme. Et s'effondre. Il a si mal, et personne n'est là pour l'écouter.

Personne ?

La pression ambiante se fait de plus en plus forte. Les murs de tôle tremblent. La mer s'agite. Le sol est pris de secousses. Une présence se fait ressentir. Arahabaki embrase l'atmosphère. Son réceptacle brille de mille feux dans la nuit. Arthur tend les mains pour l'attraper. Une explosion retentit. Il a cependant le temps d'apercevoir un visage jeune entouré de mèches rousses. Puis tout part en fumée.

Cette nuit-là, un homme devenu monstre est mort, dévoré par l'avidité. Un monstre au cœur humain naît. C'est une nouvelle ère qui commence.

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J'espère que ce texte vous a plu ! Bonne journée  à tous et à demain !

Cycla'


Monarque - Recueil Bungou Stray DogsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant