CHAPITRE VI - Réconciliation

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  • Dédié à Julien.L , Didy.S
                                    

CHAPITRE VI

C'est dur de devoir faire abstraction d'une personne considérée comme acquise.

Nous sommes dimanche soir. Depuis hier après-midi je n'ai pas eu de nouvelles de Julien. Je suis vraiment déçue, j'aurais pensé qu'il me texterais..
Enfin après tout je me demande à quoi je m'attendais...
Je n'arrête pas de penser au moment où il m'a pris la main...
Demain je vais sûrement le voir au lycée...

Je ne sais même pas si il viendra me dire bonjour...

Bref, je ne vais pas penser à ça.

- Sylvie !!
- Oui chérie ?
- J'y vais comment en cours demain moi ?
- Tu prends le bus.
- Mais je sais même pas où c'est moi !
- Tu demandes ton chemin je sais pas moi, il est tard je vais dormir.
- Ah ouais super merci.

Je vais me coucher, j'aurais besoin de forces pour reprendre les cours.

BIP-BIP-BIP-BIP-BIP

J'avais oublié à quel point je détestais cette sonnerie.

J'ai envie de me rendormir mais il faut que je prenne le bus tôt pour trouver mon chemin..
Je vais rapidement prendre mon petit-déjeuner, constitué uniquement d'un café très corsé. Puis je me prépare.
Lentement, j'enfile un top noir avec une jupe de même couleur, et met des ballerines noires également. Je me brosse les dents, me coiffe longuement pour finalement jeter ma brosse sans aucune raison. Mes sautes d'humeur sont plutôt déplorables. Je ramasse alors mes cheveux dans ma nuque et les attache avec une pince en hauteur.

- Sylviiiie !
- Oui quoi ma chérie ?
- Mon lycée est sur ton chemin non ?
- Oui mais je commence beaucoup plus tôt que toi

- Ce n'est pas grave, comme ça je verrais le chemin à prendre
- D'accord, si tu es dans la voiture dans cinq minutes.

Je me suis dépêchée, et j'ai été dans la voiture à temps.

Ma mère me dépose devant le lycée. Ça sonne dans une heure et demie, mais l'établissement est déjà ouvert, prêt à accueillir ses étudiants.
Je suis en Terminale. Mais les classes ne sont pas organisées de la même façon en Amérique.

L'année dernière j'avais décidé de m'orienter dans une filière littéraire. Je ne regrette pas mon choix, surtout en sachant toutes les possibilités que contient ce pays.

En marchant pour visiter l'établissement, j'aperçois Julien avec sa bande d'amis.
Il me voit, je le vois. Il baisse la tête.
J'ai compris le message. Il ne souhaite vraiment plus me parler. La gorge serrée, je m'engage dans un couloir qui me mènera jusqu'au secrétariat. Il faut bien que je me renseigne sur mon emploi du temps.

Une vieille dame aigrie et acariâtre me regarde d'un air bougon.
Je l'avais certainement tiré de la lecture du grand journal étalé devant elle.
Ses cheveux blancs filandreux avaient été rapidement ramenés en haut sa tête et noués à la va-vite par un élastique noir à fanfreluches. Ses yeux étaient encore embués derrière ses verres de lunettes qui lui tombaient sur le nez, et on voyait bien qu'elle n'aurait rien eu contre le fait de continuer à dormir en ce beau lundi matin.

- Quoi ?!
Pas très agréable.
- Bonjour madame, je m'appelle Noa, ma mère est venue faire mon inscription la semaine dernière !
- Noa...Noa... Noa Faivre ?
- Oui c'est moi.
- Oui, que voulez-vous ?
- Hem... Et bien j'aimerais bien avoir mon emploi du temps, ainsi que mes papiers comme mon carnet de correspondance, enfin vous voyez ?

Pas très conciliante, elle me détailla de haut en bas. Puis elle se mit à fouiller dans un tiroir, et en retira une feuille ainsi qu'un carnet marqué du symbole de l'école : une tête de tigre noire et rouge.
Sans m'adresser un regard de plus, elle baissa les yeux sur son journal qu'elle recommença à feuilleter, comme si elle était seule..

Je retournais dans les couloirs de cette école. Je fus bien heureuse de trouver un banc pour m'y asseoir et détailler les papiers reçus.
Je fis vite le tour du carnet de liaison. Il était simple. De couleur grise, avec, comme je l'ai déjà dit, le blason de l'école en en-tête.
À l'intérieur y étaient demandés les renseignements habituels.
Je pris ensuite la feuille, d'un côté y figurait mon emploi du temps, assez chargé tous les jours, sauf le jeudi où j'étais libre toute l'après-midi. J'ai également la chance de ne pas avoir cours le samedi, je ne sais pas pourquoi. Derrière figure le plan de l'établissement. Je jette un coup d'œil à ma montre : 7h25.
Je décide de trouver ma salle de cours avant d'être en retard. Mon premier cours est Philo.

C'est une salle comme les autres, elle n'a pas été repeinte depuis longtemps à première vue, les murs y sont d'un jaune déteint pas très agréable. Les rideaux sont d'un vert trop pâle, des élèves y ont laissé une trace de leur passage, autant au marqueur qu'au blanco.
Les tables ont elles aussi souffert.

Je me trouve une place au fond, et m'y installe.
Plusieurs élèves entrent quelques minutes après moi. Je constate avec effroi que Julien en fait partie. Il est accompagné d'une fille brune, assez bien fichue. Elle le dévorait des yeux, et éclatait d'un rire aigü à chaque plaisanterie de Julien. Un petit pincement m'a pris au cœur.
La philosophie étant le cours que j'ai privilégié, j'en ai pratiquement deux heures par jour. Deux heures par jour à passer dans la même salle que Julien.
Comme pour appuyer mes pensées, il jette un coup d'œil dans ma direction, et s'approche de moi.
Sans me regarder, il traverse la salle, et s'assied à côté de moi. Il se penche dans ma direction comme pour me parler, mais le professeur décida d'entrer au même moment.

Un homme ayant largement passé la cinquantaine, petit, ses cheveux immaculés en bataille, portant des lunettes rondes qui lui faisaient des gros yeux. L'image même de ce que je me faisais d'un professeur de philosophie. Il prit la parole :

- Bonjour. Voici notre nouvelle élève : Noa Faivre. Elle nous vient tout droit de... Marelle, en France si je ne me trompe.
- Marseille
- Oui, c'est ce que j'ai dit. Heureusement pour vous mademoiselle Faivre, nous n'avons même pas achevé le premier trimestre, vous auriez eu du mal à suivre sinon.
Bien, je suis monsieur Léonard. Les présentations sont faites, sortez vos manuels à la page deux cent vingt-deux.

Julien me jeta un regard amusé

- Alors, il fait forte impression ce petit bout de prof n'est-ce pas ?
- Ah tiens, tu me reparles maintenant toi ?!
- Il le faut bien, comment tu pourrais faire sans moi ? plaisanta-t-i
- Monsieur Wild, veuillez laisser cette jeune personne s'intéresser à mon cours, intervint le professeur, vous aurez largement le temps de déployer votre charme en dehors de ma salle de classe !

Cette remarque fit ricaner gentiment toute la classe, même Julien y prit part.

Je suivais le cours attentivement depuis près d'une demi-heure lorsqu'un petit bout de papier vint interrompre ma concentration.
Je regardais Julien, qui esquissa un sourire, et je pris le morceau de papier, que je dépliai :

Quelque chose de prévu après les cours miss ?

Je griffonnais une rapide réponse :

Doit retrouver ma maison, galère

Julien le lut et rigola :

Si tu viens avec moi, je te raccompagne chez toi ;)

L'oiseau, il allait m'avoir. Je dois reconnaître que l'idée de passer du temps avec lui me plaisait beaucoup, mais il m'avait assez mal traité ce week-end, et je n'avais pas envie que ça se reproduise. Je pris un autre morceau de papier où je rédigeai :

À une condition : tu m'expliques ton comportement de ce week-end, et tu me jures que ça ne se reproduira plus.

Ses sourcils se froncèrent brièvement, et son sourire habituel vint reprendre sa place :

Promis, et oui je t'expliquerais. Attend-moi à 18h à la sortie du lycée.

Ragaillardie, je souris. Je vis la brune de tout à l'heure me dévisager de l'autre bout de la salle. Je fronçais les sourcils et elle en fit autant. Elle avait suivit notre échange de bout de papiers avec Julien, et je vis passer dans ses yeux un éclair de colère. Je ne puis jurer qu'il ne s'agisse pas de jalousie. Je lui envoyais alors mon sourire le plus éclatant, et retournais mon attention au professeur.

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