# the sun and the star #

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Chaque jour fut rythmé par ces pauses que les deux jeunes hommes passaient ensemble. Lorsqu'il en avait le pouvoir, Orion amenait l'un des souhaits du patient. Aël ne comprenait pas comment il faisait pour tomber toujours juste et l'apprenti se gardait bien de lui révéler son aptitude.

Il se contentait de sourire et laissait Aël profiter de cette pause dans ses journées à l'hôpital. Orion était toujours étonné de la bonne humeur du patient alors qu'il vivait dans cet endroit morne et dépourvu de réelle joie.

La maladie progressait. Les traitements n'avaient pas énormément d'effet, et Aël somnolait de plus en plus souvent durant la journée. Parfois, Orion le réveillait en lui secouant doucement l'épaule, et le blond avait un sourire plus triste que les autres. Orion faisait mine de ne pas s'en rendre compte et poursuivait leur discussion.

Cette nuit-là, Orion prenait le chemin des rêves d'Aël lorsqu'il sentit que le sommeil du patient était différent. Plus profond, moins coloré. Aël était assis dans un coin éclairé, alors que tout le reste était plongé dans le noir le plus total.

Recroquevillé contre le mur, les genoux remontés contre la poitrine, la tête posée sur les bras, Aël semblait aussi petit qu'un enfant. De lui n'émanait plus aucun rayon, aucune lumière chaleureuse, et lorsqu'il releva le visage pour observer les alentours comme s'il n'y voyait rien, Orion vit ses yeux dorés voilés par la peur.

— Je ne veux pas... Non...

Il ne voulait pas quoi ?

Orion s'approcha, toujours invisible. Toutes ces nuits lui avaient appris à se déplacer par sa propre volonté, mais il ne parvenait toujours pas à prendre forme dans les rêves d'Aël. Il le regretta à cet instant, tant il aurait désiré le prendre dans ses bras et plonger son nez dans ses cheveux.

— Je ne veux pas mourir...

Un choc lui comprima la poitrine. Il n'avait pas de corps ici, mais ce fut tout comme ; Orion se sentit dépourvu du moindre souffle, comme si ses poumons avaient été écrasés par une force inconnue.

— Je ne veux pas mourir, répéta Aël d'une voix faible et éteinte. Je veux rester avec lui. Je ne veux pas dormir, je veux rester éveillé pour le voir.

Orion fusa vers la silhouette du rêveur et tenta, de toutes ses forces, de le toucher. De lui montrer qu'il était là. Qu'Aël n'était pas seul.

Voilà ses véritables pensées, alors, songea douloureusement Orion. Aël souriait, mais se savait mourant. Un jour, il se ne réveillerait pas d'un de ses cycles. Et il semblait qu'une de ces périodes ait commencé. Ce sommeil n'était pas comme les autres, il était noir et dépourvu de vie.

Aël se recroquevilla et ses épaules tressautèrent.

Orion fut aspiré hors du songe.

*

— Aël !

Orion poussa la porte de la chambre et se précipita au pied du lit. Ses yeux se brouillèrent devant ce qu'il aperçut ; la silhouette mince du malade sous la couverture rouge, le visage inexpressif, les yeux clos. Ses joues pâles et ses traits détendus le faisaient paraître encore plus jeune. Ses boucles blondes étaient éparses sur l'oreiller, comme une auréole d'or.

Un instant, lorsqu'il avait été tiré hors du rêve d'Aël, Orion avait cru que le malade s'était réveillé dans sa chambre d'hôpital et qu'il pourrait s'assurer qu'il allait bien en venant travailler. Mais le voir là, endormi, plongé dans ce sommeil forcé, lui détruisit le cœur. Et s'il ne se réveillait pas ?

Et si Aël disparaissait, devenant un simple souvenir de lumière dans un monde monochrome ?

Orion le refusa. Le soleil n'allait pas mourir. C'était impossible.

Sleeping AngelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant