HRP

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Bonjour bonjour !

Je m'excuse avant tout de mon manque d'activité, mais avec la rentrée, toutes les p'tites choses pour mon appartement et l'administratif, c'est assez mouvementé en ce moment! Sans compter quelques problèmes...

Mais la nouvelle des jeux de la Communauté n'est pas tombée dans l'oreille d'un sourd, comme dirait ce brave Cassios!

Voilà donc ma participation pour le jeu numéro 2!

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Il ne savait pas comment ni pourquoi mais il s'était retrouvé en surplis dans le centre d'une petite ville, en pleine nuit et à priori en plein hiver. A moins que les gros flocons tombant sur les façades grisâtres des bâtiments et commerces fermés soient la nouvelle décoration du Cocyte, ce dont le spectre doutait fortement.

C'était la veille du jour de l'an, de ce qu'il se souvenait. Ses frères avaient insisté pour qu'il passe la prochaine soirée ensemble, histoire de conserver des liens autres que professionnels, mais cela n'anchentait guère le Garuda. Il avait beau tenir à eux, il ne se sentait plus si proche d'eux qu'il l'était autrefois. La faute au travail de plus en plus long à effectuer au fil des ans, aussi bien en tant que spectre qu'en tant que Juge des Enfers.

Eaque ruminait tout cela en déambulant, ne faisant pas attention aux regards et murmures des quelques passants quand une lueur, faible mais perçant l'épais manteau de morosité sombre des lieux, attira son regard. Il se dirigea naturellement vers sa source, qui s'avéra être une allumette à moitié consumée, tenue par une petite fille vêtue de haillons, sans chaussures ni couvre-chef.
Elle avait l'air d'un ange d'Elysion tombé dans le cruel monde des hommes, pensa-t-il. L'enfant, qui devait avoir tout au plus 10 ans, était fine, pour ne pas dire chétive, mais elle dégageait une impression de bonheur absolu et de félicité. Peut-être cela venait-il de ses cheveux d'or aux courbes et boucles élégantes parsemées de crasse?

- Qu'est-ce que tu fais ici vêtu comme ça ? Demanda-t-il.

Mais aucune réponse ne lui vint, si ce n'est le grattemment d'une nouvelle allumette sur le papier abrasif.
Il se plaça donc devant la fillette, qui d'un coup ouvrit de grands yeux.

- Êtes-vous un ange? Vous venez m'emmener voir ma grand-mère ?

-Moi? Un ange?

Alors celle là, on ne lui avait jamais fait! Il était à deux doigts de s'emporter là-dessus avec son impétuosité habituelle mais quelque chose le retint au dernier moment.  Les yeux de l'enfant le regardaient avec toute l'innocence qu'il n'eût jamais vu. Avec tant de douceur, d'espoir et d'amour qu'il n'avait observé chez aucun être humain auparavant. Tout cela l'avait transpercé, avait détruit tout le sadisme et la méchanceté dans lesquels il se roulait depuis des siècles.

- Oui, je suppose que l'on peut dire ça... Et tu vas retrouver ta grand-mère d'ici peu de temps.

- C'est vrai? Monsieur l'Ange... Est-ce que ma grand-mère est heureuse ?

Déjà, l'allumette était finie et la petite en craqua une nouvelle, ne voulant pas que l'ange disparaisse comme la dinde rôtie et le magnifique arbre illuminé de chandelles.

Déjà, le Juge savait qu'elle allait être consumée par le froid, engloutie par la neige. Que sa vie allait s'éteindre comme une allumette. Malgré tout et pour la première fois, il ne voulait pas que quelqu'un meurt. Il trouvait cela même injuste. Oui, lui, Eaque du Garuda, l'un des trois Juges des Enfers, trouvait une mort injuste. Oh, cela le révoltait, il avait l'impression d'être un traître, qu'il ne valait pas mieux que tous ceux qu'il avait envoyé au Cocyte, mais c'était plus fort que lui. La Mort était injuste.

S'il ne pouvait rien faire contre les dieux seul, il allait au moins aider la fillette.

- Oui, ta grand-mère est heureuse. Elle... Elle veille sur toi depuis qu'elle nous a rejoint.

- Alors j'ai hâte de pouvoir la rassurer et lui dire que je vais bien!

Une nouvelle allumette fut allumée. L'autre récupérée par le spectre et gardée dans sa paume de main.

- Elle sera heureuse de te revoir.

- Vous savez, Monsieur l'Ange, elle disait toujours qu'il y avait un Ange gardien pour chaque personne qui en était digne! Si c'est vous mon Ange gardien, je suis heureuse de vous rencontrer ! J'espère que je ne vous ai pas trop causé de soucis...

Les petites mains bleutées tremblaient en tenant les allumettes mais un doux sourire ornait le visage fatigué.

Encore deux fins bâtonnets brûlés qu'Eaque prenait dans sa paume de main avec la désagréable impression que le bord de ses paupières ne demandait qu'à geler.

- Ce n'était pas moi à l'origine. Mais nos chemins se sont croisés par la volonté de quelqu'un d'autre.

- Alors merci à cette personne! Et merci à vous de rester avec moi... Dîtes... Je peux vous faire un câlin ?

Elle levait ses yeux aussi beaux que des pierres précieuses vers l'homme au service des Enfers, toujours avec autant d'amour, d'innocence et de confiance aveugle. Eaque flancha rapidement et lui ouvrit ses bras.

Maintenant, c'était lui qui craquait les allumettes. Les petites flammes lui lèchaient les doigts, comme essayant de s'accrocher à lui avant de disparaitre à jamais dans l'air glacial. Il sentait l'étreinte de l'enfant autour de lui, le peu de chaleur qu'elle dégageait encore. Il ne savait pas si elle s'accrochait à la vie ou la mort, en s'accrochant à lui ainsi.

Un bras malhabile passa autour des épaules de la petite blonde, s'accrochant désespérément à elle, alors que la dernière allumette venait de s'enflammer.

- M-monsieur... L'Ange... Est... Est-ce que je vais... Aller au P-paradis?

- Oui, j'y veillerai personnellement.

- M-mer...ci...

L'allumette s'éteignit.
L'épais manteau de neige amorti le choc de deux genoux tombant au sol.

Un corps frêle et gelé fut déposé sur l'écrin de neige, des boucles blondes resplendissantes à travers la crasse entourant un visage souriant avec douceur.

Un homme vêtu d'une drôle d'armure, les doigts brûlés et gardant quelque chose dans ses poings regagna la rue alors que le soleil se levait.

Une unique larme s'échappa et glissa sur la joue d'Eaque alors que les traces de pas dans la neige immaculée s'arrêtèrent sans raison, preuve de son retour dans sa dimension.

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Et voilà !

972 mots pour cet o.s et un énorme désolé pour le retard...

J'espère qu'il vous aura plus, pour ma part, ça a été très émouvant à écrire, très prenant émotionnellement également...

Le Garuda sur InstaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant