Avant-propos

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L'idée d'élaborer des poèmes d'adieu m'a été suggérée par un défi d'écriture, lancé par un haïjin avec lequel j'échangeais régulièrement. Cela m'a intéressée, car même si le Jisei japonais ne correspond pas totalement à l'épitaphe occidentale, on y retrouve l'esprit du "message laissé à la postérité" : le "Jisei no ku" est un poème d'adieu au monde, en théorie le dernier qu'on écrit avant la mort. Alors bien entendu, sauf à être très gravement malade ou suicidaire, il est difficile de connaître avec certitude l'heure des derniers adieux... Ceci laisse toute latitude aux perfectionnistes (ou aux hypocondriaques et autres pessimistes) d'en écrire une grande quantité au cours de leur vie.

Traditionnellement, toutes les formes de poésies japonaises sont admises pour le Jisei, et sans volonté particulière de me restreindre par avance, il est toutefois probable que je considère ici le tanka comme la limite absolue (cinq vers en 5/7/5 7/7, éventuellement dans un ordre différent si le poème me semble le nécessiter).

Normalement, le Jisei ne doit pas inclure de mention explicite de la mort, mais plus représenter un instantané du moment de cette mort, une dernière interrogation, ou bien encore une synthèse de ce qui a fait une vie, avec sérieux sous la forme d'un dernier enseignement ― sorte de testament spirituel ―, ou au contraire avec dérision, voir moquerie.

Il est toutefois tentant d'inclure ici des haïkus non métaphoriques parlant de ce thème... J'essaierai de résister, sans toutefois promettre d'être toujours irréprochable sur ce point.
Mais qui vivr... heu... je veux dire "qui mourra verra", bien entendu !

Les métaphores riches en symboles usités au Japon sont classiquement encouragées, mais cela pose ici une question culturelle. Je donnerai une petite explication de texte après les poésies qui me sembleront le nécessiter, comme à mon habitude.

Dernier point : à l'instar du célèbre Bashô, j'ai tendance à considérer que chacun de mes poèmes (et surtout mon dernier haïku écrit, quel qu'il soit) pourrait assez bien faire office de Jisei, car ma poésie retrace toujours le moment que je suis en train de vivre.
Si elle est réussie, je parviens à partager ce moment avec le lecteur : c'est le fameux "saisir l'instant" qui fonde le haïku. Si elle ne l'est pas, ma foi... j'aurai au moins tenté avec sincérité de communiquer l'émotion liée à ce fameux dernier instant. Ceci me semble représenter un clap de fin assez honnête, pour un poète. Mais au titre de l'exercice, j'ai malgré tout décidé de travailler quelques "poèmes d'adieu" spécifiques dans ce recueil un peu particulier.

Bonne lecture, et merci par avance à tous ceux qui, par leurs commentaires, m'aideront à choisir mon meilleur Jisei, pour... Vous-Savez-Quoi.
(Je précise que je fais partie des perfectionnistes, hein !)

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© Clelia Maria CASANOVA - 5 septembre 2020.

Jisei no ku - Les poèmes d'adieu du CoquillageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant