Comment peut-on être boomer ?

- On peut plus rien dire !

Ce n'était pas la première fois que le vieil homme lâchai tcette phrase. Il l'avait dite avec mépris, avec colère, avec parfois une pointe de sarcasme mais cette fois semblait-il, c'était la résignation qui dominait.

Le présentateur holotélé, un modèle PPDA 3.5, chef d'œuvre de l'ingénierie génétique, visage glabre sans défaut, brushing impeccable et dents éclatantes lui adressa un léger sourire de connivence tout en acquiesçant.

Sur le récepteur réseau, une salve d'emoji cœur s'afficha, et le compteur d'audience augmenta à côté. Les chiffres se stabilisèrent autour de 8 millions et demi. 8millions et demi d'auditeurs qui partageaient ce sentiment.

***

Le vieil homme quitta finalement le plateau, mais une salve de bot d'interview l'attendaient à la sortie. Il avait beau être coutumier de ces saillies outrancière,cela fonctionnait toujours. C'était sans cesse le même schéma. D'abord, la déclaration en direct, ensuite, les interviews, puis les chroniques, les éditos et enfin retour sur le plateau avec le débat de la semaine et éventuellement un contradicteur un peu naïf et peu coutumier de l'excercisse qui se faisait étriller devant la meute assoiffée d'audience. Et toujours la même antienne, quelque soit lesujet : « On ne peut plus rien dire ».

La loi Verlau de responsabilité était finalement passé l'année dernière et bien sûr elle avait fait les choux gras des Corpomedias.

Le gouvernement nous jurait que :« Enfin, enfin, les outranciers, les insultants, les toxiques devraient répondre de leurs actes, assumer leurs responsabilités. La liberté d'expressions ne serait plus la porte ouverte au n'importe quoi, chacun serait tenu responsable de ses paroles et devrait en assumer les conséquences ! Merci de respecter les gestes barrière. » Encore aurait-il fallut que les gouvernement aient encore un peu de pouvoir réel.

Dans les fait, les Corpos avaient toutes un budget pour ça et la seule chose qui changeait c'était maintenant la médiatisation des procès. Les IA judiciare tournaient à plein régime pour désengorger les tribunaux mais ceux-ci ne désemplissaient pas. Le vieil homme était un habitué d'ailleurs.

Mais peu importe, lui, comme les autres, s'en sortait toujours. La jurisprudence Lunar 56, s'appliquait quasiment à chaque fois et ils n'étaient jamais condamnés. De toute façon, du pognon, du pouvoir, une exploitation de données personnel non protégées et hop le tour était joué.

Le vieil homme finit par atteindre le parking et monter dans sa EL-MSK automatisée. Il s'installa sur la banquette, ouvrit le minibar et sortit une bouteille de distillat sélénique.

L'alcool tournait lentement dans le verre, jetait des reflets argentés sur les parois de l'habitacle. Un parfum fruité et frais embaumait l'endroit.

Le vieil homme était pensif. 8millions et demi d'auditeurs, c'était deux fois moins qu'il y a un mois, la tendance était d'ailleurs à la baisse depuis un moment. Pourtant la polémique était belle, clivante, insultante. Mais peut-être que ce n'était plus suffisant.

Il se sentit las l'espace d'un instant avant que la colère reprenne le dessus. Mais merde quoi, il avait encore le droit de penser ce qu'il voulait, il n'allait pas se laisser museler ainsi !

Un geste suffit à matérialiser un clavier dans son champs de vision pour qu'il commence à taper un nouveau pamphlet. Les même mots, tournés différemment. Les même récriminations entendu trop souvent. Les même obsessions d'un petit homme aigri, mais toujours cet aveuglement, cet entêtement à rester le vestige inébranlable d'un monde en déconstruction dont plus personne ou presque ne veut. Ce sentiment d'être un résistant quand il n'était en réalité plus qu'une relique d'un autre âge.

Le vieil homme avait finalement terminé son texte. Il était prêt à être publié sur son espace en ligne.

Il s'adressa à son IA d'assistance.

- Al, effectue la relecture et la mise en page.

- Effectué monsieur.

- Bien, tu peux envoyer la publication.

Il y eu un petit temps de latence, presque imperceptible et très inhabituel avant que l'IA réponde d'un ton tout aussi inhabituel.

- Ok boomer.