Les Cœurs Emprisonnés

Chapitre 7 partie 2 (John)

Une silhouette sortit de l'ombre du rideau, se faufila sur le devant de la scène. Puis le projecteur braqué sur la scène s'alluma et éclaira celle-ci. Il eut un moment avant que la musique ne démarre. Le temps nécessaire pour que Cherry se positionne, une main sur la hanche, l'autre tenant un Panama noir sur sa tête pendant que les premiers applaudissements d'encouragement résonnaient. Elle portait un ensemble blazer et pantalon noir, un haut bordeaux et ce qui semblait être des bottines à talons aiguilles de la même couleur que le top. C'était sa couleur signature, elle en portait très souvent. Son regard balayait l'assistance et son visage arborait un rictus. Je la sentais tendue, certainement le trac qui s'emparait d'elle. On en avait souvent parlé à Los Angeles et elle m'avait confié qu'elle redoutait beaucoup ce moment car elle craignait notre réaction. Elle angoissait de nous décevoir car on comptait énormément pour elle. Pour moi, il ne se faisait aucun doute qu'elle allait tout déchirer et totalement nous surprendre. J'avais essayé à plusieurs reprises de lui faire cracher le morceau ou de la convaincre de me laisser assister à ses entrainements afin de la rassurer. Mais cette tête de mule avait tenu bon.

Je remarquais un rapide et grand soulèvement de ses épaules avant qu'elles ne descendent tout doucement montrant qu'elle venait de prendre une grande inspiration avant se jeter dans la fosse aux lions. Ses yeux rencontrèrent les miens. Je lui fis un petit hochement de la tête et un clin d'œil pour lui montrer mon soutien, c'était notre code pour encourager l'autre. Elle l'avait fait, pour la première fois lors, d'un entrainement de parkour où je travaillais sur des nouveaux mouvements. Son visage s'illumina enfin par un sourire plus sincère. Normalement, il y avait un signe en retour mais elle ne pouvais pas le faire car il était moins discret que le premier.

Les premiers notes de musique sonnèrent le départ du spectacle, aussitôt son corps commença à suivre la musique. Ses hanches et ses épaules se balançaient au rythme du tempo. La voix chaude de Beyoncé sur le titre Fever donna immédiatement le ton de la soirée.

Ayant deux jeunes sœurs qui avaient pratiqué la danse, je connaissais ce monde. J'avais souvent assister aux répétitions ou les spectacles. Je compris que Cherry maîtrisait deux types de danse en la voyant évoluer. Ses mouvements, déplacements étaient gracieux, légers mais également très précis et techniques. Sa danse était mêlée de pointes, pirouettes classiques, de pas et enchaînements plutôt contemporains . Ses épaules répondaient aux percussions par des gestes saccadés.

L'ambiance prit ensuite une autre tournure. Après avoir adopté une démarche plus féline, plus sensuelle, elle alla chercher une chaise sur le cote de la scène pour la ramener vers le milieu de celle-ci sous les chaudes clameurs de la salle. J'échangeais un coup d'œil rapide autour de ma table captant leurs regards impatients.

_Cabaret! s'exclamèrent ils d'une seule voix.

_Attendons de voir!

_C'est évident John. Soit pas de mauvaise fois

_Je ne pense pas Miz. Si c'était la bonne réponse, Cherry ne ferait pas autant de mystère. Je dis ça, je dis rien.

_Ça saute aux yeux. Trish a dit qu'elle faisait parti d'une troupe de cabaret...

_Quand elle était à Londres! le coupais je. Qui a dit qu'elle a continué ?

_Tu crois qu'en ayant couché avec elle un soir, tu la connais mieux que personne, mieux que son mari peut-être? Tu n'as jamais fait attention à elle pendant 1 an et tu crois savoir ?

La tension commença à remonter entre Miz et moi.

_Tu es bizarre John ce soir. Depuis qu'on a quitté l'arène...

_Les gars, stop! ordonna Maryse.

Il grimaça, sembla vouloir me dire quelque chose mais il se ravisa et roula des yeux. Pendant ce temps, le numéro se poursuivait avec Cherry complètement à l'aise, confiante mais également complice avec le public. Elle jouait du regard, lançait des œillades tout en utilisant la chaise comme accessoire pour adopter certaines poses ou se cambrer. L'assistance réagissait à chaque battement de cils, déhanchés par des cris, des applaudissements.