CHAPITRE 1

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Qu'est-ce que j'ai bien pu faire à Lucifer pour qu'il m'en veuille à ce point ? La sonnette de mon immeuble n'arrête pas de retentir. Je sais qui se cache derrière ce bruit infernal de si bon matin et je vais la tuer !

Je me lève péniblement et appuie sur l'ouverture automatique. Je déverrouille la porte d'entrée de l'appartement et fais volte-face pour aller donner ses croquettes à Moka. Alors que je caresse mon chat, j'entends le bruit sec de talons qui claquent sur le sol, puis une voix claironnante me demandant où je suis.

Quelques instants plus tard, Camille apparaît sur le seuil de la cuisine et vient s'installer autour de la table, sur laquelle elle dépose un sachet de viennoiseries. Ses gestes sont d'une telle délicatesse que je la compare souvent à un éléphant qui marche.

— Tu ne m'as pas répondu hier soir ! lance-t-elle, agacée.

— Camille, par pitié, parle moins fort !

— Ça va, ça va, madame qui fait la grasse matinée. Il est plus de onze heures, j'ai été gentille de t'apporter des croissants, déjà...

Un bref silence s'installe avant que je reprenne :

— Tu es adorable, et je dirais même que tu l'es encore plus quand tu gardes tes décibels à un niveau raisonnable ! répliqué-je en lui donnant son café.

Nous échangeons un regard avant d'éclater de rire.

Oh, Camille !

Elle passe ses mains dans ses cheveux châtains tout en s'esclaffant à pleines dents. Une fois que je lui ai balancé tous mes reproches quant à sa mélodieuse voix, elle me demande comment s'est déroulée ma journée d'hier et c'est tout en déjeunant que je la lui raconte en détail, sans omettre de mentionner que le souvenir d'Antoine est venu hanter mes pensées. À ce moment-là, elle se lève de sa chaise et vient me prendre dans ses bras en me serrant fort contre elle.

— Ce n'est pas ta faute, Adèle, sors-toi ça de la tête.

— Pourquoi je ne suis pas morte avec eux... avec lui ?

— Ce n'était pas ton heure, c'est tout... Et même sans eux, il faut que tu continues de vivre.

Je ne dis rien. Ma meilleure amie s'assied à mes côtés et prend mes mains dans les siennes. Je sens son regard plein de tendresse, mais je n'arrive pas à la fixer ni à retenir mes larmes.

— Antoine n'aimerait pas te voir dans cet état...

— Justement, il n'est plus là pour me sermonner.

— Rappelle-toi ton premier livre. Celui qui t'a fait connaître ! Tu y as mis toutes tes émotions pour t'aider à vaincre ce chagrin. Il t'a permis de faire entendre ton histoire avec une plume pleine de légèreté et de douceur. Tu l'as fait pour lui, pour eux, et je suis certaine qu'ils sont fiers de toi ! Rappelle-toi comme tu t'es sentie soulagée et en paix après avoir écrit le mot « FIN», et même si tu as pleuré dans mes bras toute la soirée qui a suivi, le lendemain tu étais rayonnante !

Un rire nerveux se mélange à mes larmes, et Camille reprend de plus belle :

— Je veux revoir ce sourire, ma belle. Je veux te voir heureuse à nouveau, ça fait des mois que tu ne souris plus...

Elle a raison... Cela fait six mois que, sans même m'en rendre compte, je m'engouffre dans l'obscurité. Je n'ai plus envie de rien, et c'est de pis en pis. Depuis que je suis rentrée de ce Noël passé chez mes parents, je sombre. En revenant, j'ai aperçu une photo d'Antoine sur le rebord de la cheminée et j'ai remarqué que je n'avais plus pensé à lui depuis bien longtemps, comme si les souvenirs de lui s'étaient évaporés avec le temps... Je lutte de toutes mes forces pour ne pas oublier le timbre grave de sa voix, ou bien les traits de son visage. La sensation de ses bras qui encerclaient ma taille et surtout, la chaleur de ses baisers dans mon cou.

L'amour ? Non merci ! [SOUS CONTRAT CherryPubishing]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant